
Ziëell. j
f i t
cSi H i s t o i r e E c c l e s i a s t i q u e .
prefencedece jeune homme fert de libelle , il ne faut
point d’autre écrit que fon y ifa g e , qui vous eft connu.
V o u s qui fçavez ce que vous aviez accoutumé de
voir en lui avec douleur , lifez ce que vous votez en
lui avec joïe : afin que Dieu foit plus honoré, 5c que
ce q u ie f t i c r i t dans ce lib e lle , demeure dans votre
mémoire. Pardonnez-moi fi je ne vous parle pas plus
long-temps : vous fçavez combien je fuis fatigué. Je
n’aurois pas eu la force de faire hier tant de chofes a
jeûn , & de vous parler aujourd’h u i, fans les prières
de faint Etienne. Saint Auguftin n’en dit pas davantage
aimant mieux , comme il d i t , leur laiffer goû ter
l’éloquence de Dieu même,quis’expliquoit par ce
miracle. Pour mieux entendre ce qu’il dit de fa fa tigue
, il faut fe fouvenir qu’il avoit foixante 5c dix ans,
que l’on ne mangeoit point tout le famedi fa in t , ôc
que la plus grande partie de la nuit fe paifoit à la be-
nediCtion des fonts ôc au baptême folemnel. Il fit dîner
avec lui Paul qui avoit été g u é r i, 5c s’informa
exactement de fon h iflo ir e , que Paul raconta en cette
maniéré :
pfl Je fuis né à Cefarée en Cappadoce , d’une famille
qui n’eft pas des moindres. Nous fommesdix enfans,
fept gardons 5c trois filles : je fuis le fixiéme, ma ioeur
Palladia eft après moi. Comme nous étions encore
chez n o u s , notre frere aîné maltraita notre mere ,
jufques à porter la main fur elle. Quoique nous fuf-
fions tous ejifemble, nous le fouffrîmes fans lui en-
dire m o t , ni lui demander feulement pourquoi il en
ufoit ainfi. Notre mere outrée de douleur, réiolutde
lui donner fa malédiction -, & à ce deifein elle alla au
baptiftere dès le grand marin. En y allant elle rencontra
je ne fçai qui fous la figure de notre oncle fon
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beaufrere , apparemment un d émon, qui lui demanda
où elle alloit. Elle dit qu’elle alloit maudire fon
fils, pour l’injure infupportablé qu’elle en avoit reçue.
Il lui confeilla de maudire tous fes enfans -, 5c elle le
crut. Etant donc profternée dans le baptifte re, elle
prit les facrez fo n ts , 5c aïant les cheveux épars & le
fein découvert, elle demanda à Dieu que nous fu liions
bannis de notre païs & errans par le monde , enforte
que tout le genre humain fut épouvanté de notre
exemple.
Auifi- tôt notre frere aîné fut faifi d ’un tremblement
, -tel que vous avez vû en moi ces jours paifez.
Nous fûmes tous attaquez du même mal , dans l ’année
l ’un après l’autre , fuivant l’ordre de notre naif-
fance. Notre mere voïant que fes malediCîions a-
voient été fi efficaces, ne put fouffrir plus lon g temps
le reproche de fa confidence & celui des hommes :
elle fe p en d it, 5c finit ainfi fa malheureufe vie. NoUs
fortîmes tous de Cefarée, ne pouvant fupporter notre
infamie , nous abandonnâmes -notre pa ïs , 5c nous
difpersâmes en divers lieux. Nous avons appris que
le fécond de nos freres a recouvré la fanté a R a ven-
ne , à la mémoire du glorieux martyr faint Laurent,
qui y eft érigé depuis peu.
Pour moi quand j’apprenois qu’il y avoit des lieux
faints où Dieu faifoit des miracles, j’y alloisavec un
grand defir d’être g u é r i, 5c ma foeur avec moi. J’ai
été à Ancone én Italie , & à Uzale en Afrique , fça-
chant que S. Etienne faifoit de grands miracles en
l ’une 5c en l’autre ville. Enfin il y a trois mois que
ma foeur 5c moi nous fûmes avertis par une telle v i-
fion. Un perfonnage lumineux 5c venerable par fes
cheveux'blancs f ine dit que je ferois guéri dans trois