
XX.
I ivres de l'ame &
de fon origine.
f i . Retraçt. c, 56.
tpb. 11. c. 1.
Aug.ep. t 66, ». 8.
<f up. I. ijpm. n.x 7 .
Vers le même temps , S. Auguftin écrivit: quatre
livres de lame & de fon origine , contre Viôtor fur-
nommé Vincent , jeune homme de la Mauritanie Ce-
farienne , qui aïant trouvé chez un prêtre Efpagnol
nommé Pierre un ouvrage de S. Auguftin , fut choqué
de ce qu’il difoit : Je ne fçai ii toutes les ames
viennent de celle du premier homme, oui! elles font
données à chacun en particulier : mais je fçai bien
que l’ame eft unefprit & non un corps. Viôtor fut
choqué & du doute de S. Auguft in & de ce qu’il
aifuroit ; Ôc écrivit contre lui deux livres adreiTez au
prêtre Pierre, où il foutenoit.fans y penfer quelques
dogmes des Pelagiens, &: d’autres encore pires.
Toutefois le prêtre Pierre aïant oiii la leéture des
livres de Vic to r , fe leva tranfporté de jo y e , lui baifa
la tête , & le remercia de lui avoir appris ce qu’il
ignoroit.
René moine laïque , mais d’une foi très-pure , qui
étoit à Cefarée de Mauritanie , fit copier exaétement
ces deux livres de Vidfcor, & les envoïa à Hippone à
faint Auguf t in , qui les aïant lûs, écrivit un livre, où
il répond à tous les palfages de l’écriture, que Viétor
employoit , pour montrer que Dieu créoit les ames
pour chacun en particulier, & montre que ces paiTa-
ges ne le prouvent point clairement. Ce n’eft pas que
S. Auguftin rejettât cette opinion de la création des
ames, qui étoit celle de S. Jerôme : il rejettoit feulement
les mauyaifes preuves que Viétor en apportoit;
& pour le fonds, il étoit encore en doute, quoiqu’il
inclinât à cetté opinion, pour laquelle l ’églife s’eft
déclarée depuis.
Comme René avoit craint de choquer S, Auguftin
en lui envoyant un ouvrage où il étoit maltraité, S.
L i v r e v i n g t - q u a t r i e ’m e . y43
Auguftin lui dit : Je fuis fâché que vous ne me con- «.».
noiniez, pas encore. Loin de me plaindre de v o u s , je
ne me plains pas même de Viôtor. Puifqu’il a penfé
autrement que mo i , a-t-il dû le cacher ? Il devoir
plutôt me l’écrire à moi-même , mais ne m’étant pas
connu , il n’a o f é ,& n’a pas cru me devoir coniulter,
croïant ioutenir une vérité certaine. Il a obéï à fon
ami, q u i , à ce qu’il di t , l’a forcé d’écrire; & fi dans
la chaleur de la difpute, il lui eft éehapé quelque parole
injurieufe contre moi : je veux croire qu’il l’a
fait plûtôt par la neceffité de foutenir fon opinion,
qua defïein de m’offenfer. Car quand je ne connois
pas la difpofition d’un homme, je croi qu’il vaut
mieux en avoir bonne opinion, que de la blâmer témérairement.
Peut-être l’a-t-il fait par affeétion ;
croïant me défabufer. Ainfi je dois lui fçavoir gré de
fa bonne volonté , quoique je fois obligé de défap-
prouver fes fentimens ; & je croi qu’il faut le corriger
avec douceur , plûtôt que lerejetter avec dureté,
vû principalement qu’il eft nouveau Catholique.
C ’eftque Viôfcor avoit été Dônatifte du fchifme particulier
des Rogatiftes.
S. Auguftin écrivit enfuite au prêtre Pierre une grande
lettre, qu’il compte pour le fécond livre de cet ouvrage
roù il l’avertit avec la même douceur, qu’écant
prêtre & avancé en âge, Une lui convient pas d’approuver
l’ouvrage d’un jeune laïque, rempli de tant d’erreurs
, dont il marqne les principales ; l’exhortant à
obliger V i& o r aies corriger. Enfin il écrivit deux livres
à Viôtor lui-même, dans l’un defquels il lui mon;
tre fes erreurs : dans l’autre il lui fait voir le tort qu il
a eu de le reprendre, foit de douter de l'origine'de l’a-
me,foit d’affurer qu’elle eft fpirituelle. Ces derniers li