1° La grève exondée n’est jamais envahie par les eaux ; elle peut
être arrosée par les vagues de tempête, mais elle n’est jamais submergée:
C’est ce qui lui donne son caractère biologique. Elle est habitée
par des espèces végétales aériennes de la flore des sables et des graviers,
qui recherchent l’eau par leurs racines profondes, qui se plaisent
dans une atmosphère humide. Ce sont des plantes de sables et non
des plantes d’eau f1).
Nous citerons dans cette flore de la grève exondée d’après la liste
que m’a donnée le professeur Dr E. W ilc z ek , à Lausanne :1 Sedvm rupestre,
Scropliularia canina, Se. nodosa, Cladium Mariscus, Poa
rubella, Festuca rubra var. glaucescens, Agropyrum glaueum, var.
intermedium, Erucastrum Pollichii, Poa pratensis var. lmwiiis, Phra-
gmites communie, etc.
Sur la grève exondée, dans les sables, sur les cailloux, les murailles,
dans des stations sèches, et très sèches, vit une floride de Mousses
psammophiles ; un certain nombre de ces plantes sont caractéristiques
pour le climat spécial des rives du lac. En voici la liste dressée
par le Dr J. Aman n (2) :
Ceratodon purpureus. ' B ryum torqnescens.
Barbuta inclinata. B. caespiticium.
B. tortuosa. Thuidium abïetinum.
B. convoluta. T. delicatulum.
B. ruralis. Jdhynchostegiummegapôlitahum.
B. squarrosa. BrachytHecium salebrosum.
Ra.comitrium canescens. B. rutabulum. .
B ryum argenteum. B. albicans.
B. versicolor, Hypnum chrysopliyllum.
B. badium. H. stellatum.
B. capillare. Hylocomium rugosum.
B. pseudotriquetrum. H. triquetrum.
- En fait d’animaux nous voyons courir sur la grève exondée les Oiseaux
omnivores qui fouillent dans les débris' organiques entassés par
p) E. Wi l c z e k ine fait remarquer que la florule de la grève exondée a un caractère
nettement xérophytique, tandis que la florule murale présente un curieux
mélange de types xérophytes et de types ayant de grandes exigences au point de
vue de l ’humidité.
(8) J. Amann, 15 mai 1900, in. tilt.
les vagues, Corbeaux, Corneilles, les insectivores'qui chassent les
Insectes ailés sortant de l’eau, Bergeronnettes, Lavandières, etc. J’y ai
vu quelques Araignées, très rarement un Insecte. Sur le sable mouillé,
à la limite des vagues, quelques Mouches, entre autres une Antomyi-
dée Lispa consanguinea Lôw, et une Dolichopodidëe, Hydrophorus
balticus Meig. (') Aucun animal, sauf peut-être ces Mouches, n’est spécial
à cette zone.
Après une tempête je puis aller récolter sur les sables de la grève
de Préverenges des Limnées, Valvées, Ancyles, Anodontes (de très
jeunes Anodontes .de l’annéé, en particulier) que les vagues ont enlevées
à la beine ou à la grève inondée, et qu’elles ont déposées par décantation
sur la rive.
Les rochers et les murs de la grève exondée portent dans leurs cavités
étanches cette algue (2) rouge, Hæmatococcus (Sphcerella) pluvialis
qui ne végète que lorsqu’elle est mouillée par la pluie ou par l’embrun
des vagues, et qui colore alors l’eau d’une teinte vermeille de sang
frais. A l’état sec_ce n’est plus qu’un amas d’écailles recroquevillées
d ’un brun sale, sans'forme et sans figure.
Une variété de la grève exondée est formée par les m u r a i lle s naturelles
ou artificielles des bords du lac, masses rocheuses, ou murs
bâtis par la main des hommes. Dans les anfractuosités, dans les fentes
de ces murailles, quelques graines apportées par les vents arrivent à
prendre racine dans les parcelles d’humus formé par les poussières
accumulées. Toute une flore de plantes à graines mobiles peut se développer
dans ces conditions. J’en donnerai un exemple en énumérant
j.es plantes que j’ai recueillies sur les quais et jetées du port de Morges,
•en octobre 1893 : Ranunculus acris, Sinapis arvensis, Tunica
saxifraga, Sagina procumbens, Hypericum perforatum, Trifolium
■repens, Rubus sp., Sedum sexangulare-, Galium palustre, Lappa sp.,
Leontodon autumnalis, Achillea millefolium, Taraxacum officinale,
■Senecio vulgaris, Erigeron canadense, Scrofularia nodosa, Linaria
Cymbalaria, Calamintha acinos, Lycopus europseus, Saponaria offici-
nalis, Plantago major, Calamogrostis epigeios, Eragrostis pilosa, Poa
(') Détermination du Dr P. Ste i n , de Genthin, que je dois à l ’obligeanee du
Dr T E S teck, de Berne.
( ) Quand j’emploie le mot algue pour plante thallophyte aquatique, je laisse un
a minuscule.