Je crois ces tentatives sans aucune valeur, et je chercherai à le démontrer.
Mais pour faire cette justification de mes idées à ce sujet, je
devrai avoir recours à des faits relevant de la genèse de la Société pélagique
et quant à'cette genèse, je ne pourrai l’étudier avec fruit que lorsque
je traiterai en même temps de la genèse des autres Sociétés lacustres.
En raison d’économie je renverrai donc à plus tard ce que j’ai à dire
de la caractéristique du plancton.
Je puis cependant déjà à présent indiquer les organismes les plus
abondants dans les pêches que j ’ai faites pendant les dix dernières années
du XIXe siècle. Ce sont, en fait d’Entomostraeés, avant tout les
Diaptomus et ensuite les Bosmina, les Dinoflagellés, Dinobryon et Ce-
ralîum ; en fait de Diatomées, les Fragïlaria crotoniensis, les Cyclotelal,
les Asterionella. L’espèce prédominante varie du reste avec la saison.
Je ne puis pas dire que j’en ai vu aucune qui l’ait Constamment emporté
en nombre ou en importance.
8° Dissémination ou agglomération en troupes des organismes
pélagiques.
Il est une question assez délicate, celle de la dissémination régulière
du plancton ou de sa concentration en troupes ou bancs-. Sans grande
importance pour les hauts problèmes de l’histoire naturelle des organismes
pélagiques, elle intéresse surtout la technique de la pêche du
naturaliste, qui cherche à se rendre compte de l’abondance du plancton.
En effet, si les organismes'sont disséminés également dans toute
l’étendue d’une même couche, quel que soit le point où notre filet traverse
cette couche, il capture partout le même nombre d’individus de
chaque espèce du plancton; un trait de filet bien lancé suffit à nous
faire connaître la population que nous cherchons à évaluer. Si, au contraire,
les organismes se réunissent en troupes, analogues aux bancs
des Pèrchettes du littoral, aux vols des Etourneaux, aux essaims des
Moucherons qui dansent au soleil, suivant que le filet traverse un de
ces rassemblements,-ou passe entre eux, suivant le cas il capturera
un très grand nombre, ou bien seulement quelques isolés des
organismes qu’il doit nous rapporter; le trait de filet donnera une
notion fausse, en trop ou en trop peu, de la densité de population de
ces espèces pélagiques. Depuis que H æ c k e l a soulevé cette objection
aux pèches quantitatives du plancton de H e n s e n , chaque naturaliste
a dû se poser la question, et chacun lui a donné sa propre réponse. Voici
ce que j ’ai à en dire.
A. Et d’abord une réponse expérimentale. Pour juger de l’approximation
de ma pratique personnelle du filet pélagique, et de l’évaluation
du plancton que j’en pouvais tirer, j ’ai répété le même jour, au
même point, des pêches successives à la même profondeur, et j ’ai
obtenu les résultats suivants :
Î4 novembre1896, pêche verticale à 60® de profondeur.
1er coup de filet, 0.8cmS de plancton.
2e — . 0.6 —
11 décembre 1896, à 60 m de profondeur.
1er coup de filet, 0.8™^ de plancton.
~ 0.75 — etc.
Les différences dans la quantité de plancton expriment la résultante
des irrégularités d’expérimentation : dans la capture des organismes
par le filet que je relevais avec une vitesse peut-être différente d’une
fois à l’autre, dans le lavage plus ou moins parfait du filtrateur du filet,
dans le tassement des organismes de grosseurs différentes au fond de
l’éprouvette graduée où je les mesure ; cela en admettant que la
densité de la population pélagique soit restée la même dans la même
colonne verticale du lac traversée par mon filet dans les deux pêches
successives.
D’autre part j’ai répété le même jour, à la même profondeur, dans
la même région du-lac, mais dans des points distants l’un de l’autre de
400 mètres environ, des pêches qui m’ont donné les résultats suivants
:
13 ju in 1896 : l e>' coup de filet 1.15 «m»
2e — ' L2
3e — • 0.9
- 4e — 0.8
Ils expriment, en plus des irrégularités que j’ai énumérées dans la
série précédente, celles qui proviendraient du passage du trait de
filet au travers ou à côté d’une troupe d’organismes pélagiques.
Les écarts ne sont pas aussi considérables que je les aurais attendus.
La méthode n’est pas d’une rigueur très parfaite, c’est incontestable;
il est rare que nos procédés d’interrogation de la nature en liberté at-
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