lié par les rapports les plus heureux et les meilleurs sentiments
“d ’amitié et de bon voisinage.
■CHAPITRE III -ré ANTIQUITÉS LACUSTRES. LES PALAFITTEURS
Dans l’hiver de 1853-54, les ouvriers qui creusaient la grève de
Dollikon prés Meilen, au lac de Zurich, pour en extraire des matériaux
■de comblement d’un quai, rencontrèrent dans le sol des débris de l’industrie
humaine. Haches et couteaux dè pierre, poteries, ossements
travaillés ou brisés d’animaux domestiques ou de bêtes sauvages
étaient dispersés entre des pilotis de bois fichés verticalement en terre,
«et des poutres horizontales. Le D>- F e r d in a n d K e l l e r , de Zurich, y
-reconnut de suite l’indice d’habitations de bois, bâties sur pilotis sur la
beine du lac, au-dessus des eaux; il comprit que ce n ’était pas simplement
un fait local, et par une heureuse généralisation il annonça que
-des stations analogues devaient se retrouver sur le littoral des autres
-lacs suisses. Sur cet avis on chercha partout, et partout l’on trouva.
Le 21 mai 1854, Frédéric Troyon, l’archéologue de Cheseaux, qui
savait introduit dans notre pays la notion Scandinave,^) des trois âges
de la civilisation primitive, l’âge de la pierre, l’âge du bronze et l’âge
«du fer, accompagné de son ami Adolphe Mo r lo t , de Berne, qui âu
«cours de ses pérégrinations scientifiques s’était arrêté depuis 1851 à
Lausanne, où il enseignait la géologie, demandaient à Morges si l’on n’y
connaîtrait point des pilotages visibles sur le littoral immergé. Tous,
pêcheurs et amateurs de canotage, leur signalèrent la forêt de pieux
qui sortaient du sol, sous 2 à 4 mètres d’eau devant la ville de Morges.
Le lendemain matin, montés sur un bateau, ils étaient en contemplation
de ces ruines qui leur rappelaient celles que le Dr K e 11 e r avait
-décrites à Meilen lorsque, gamin de 13 ans, je m’approchai dans mon
canot des amis de mon père; quelques minutes après, le crochet de
ma gaffe leur offrait trois beaux bracelets de bronze. C’était la confirmation
définitive des hypothèses de K e lle r, et des déductions de
T ro y o n et M o r lo t; c’était aùssi le commencement dés recherches
captivantes qui nous ont intéressés pendant bien des années.
Ces recherches archéologiques sont bientôt devenues populaires
dans tous nos cantons riverains des lacs. Elles ne demandaient pas
grande préparation scientifique, ni grande dextérité technique; en revanche
elles révélaient tant de faits nouveaux, jusqu’alors absolument
ignorés de l’histoire de notre pays; elles ouvraient des jours si étonnants
sur la géologie, la paléontologie, l’ethnologie de ce que nous appelions
alors les premiers aborigènes de l’Helvétie; elles permettaient des
études si complètes sur lés moeurs de ces ancêtres jusqu’alors inconnus;
elles offraient une base si solide à la nouvelle .science qui allait se
développer sous le nom d’anthropologie, que la découverledes antiquités
lacustres fut un grand événement scientifique pour notre patrie et
même pour le vaste monde philosophe. Notre Suisse a eu dans le
XIX* siècle le bonheur insigne d’être le siège de plusieurs travaux de
haute importance dans le domaine des sciences naturelles. Les études
glaciaires, à partir de 1820, les fouilles des palafittes à partir de 1854,
les recherches limnologiques à partir de 1870, les études géologiques
et les théories de tectonique alpine dans tout le cours du siècle, représentent
à eux seuls déjà une contribution suffisante offerte par notre
petite république de paysans et de bourgeois montagnards comme sa
part à l’édifice de la science que l’humanité entière s’efforce de construire.
Pour ce qui concerne les études d’antiquités lacustres, je suis le
dernier survivant de cette école d’explorateurs qui s’était groupée
autour des Ferdinand K e lle r, à Zurich, Louis R ü t im e y e r , à Bâle,
0. H e e r, à Zurich, J. U h lm a n n et A. J a h n , de Berne, Ed. D e s o r ,
à Neuchâtel, T r o y o n et M o r lo t, à Lausanne, Hippolyte G o sse , à
Genève, Louis R e v o n , à Annecy, André P e r r in , à Chambéryj1) et,
pourquoi ne le nommerai-je pas 7 mon vénéré père, le président Fran-
(') Je n’ai nommé ici que les hommes qui sont cités dans les trois premiers rapports
de Keller de 1854, 1858 .et 1860, et qui par leurs publications ont -créé la
science des palafittes. Je rappellerai encore le nom de quelques hommes qui ont
bien mérité de ces recherches par leurs, travaux sur le terrain et par leurs fouilles,
le colonel S c h w a b , à Bienne, le notaire Mi l l i e r , a Bienne, Am i e t , à
Soleure, le colonel R . , S u t e r - S u t e r , de Zofingen (fouilles de Wau-wyl), Jacob
Me s s i k omme r , à Robenhausen, Gaspard Lôhl e , - à Wangen, Henri R e y
et Be a tdeVe v e y , à Bstavayer, Louis R o c h a t , à Yverdon, le D'Cl ément ,
à Concise, E. T h i o l y , à Genève; je. rappellerai avant tout.-le- D* Edmond
de F e l l e n b e r g , de -Berne, qui plus tard ft tant fait pour l’étude des pala