les bords du Haut-lac où l’on est presque dans le régime des vallées
alpines.
Pour la pluie rien à signaler dans l’effet du lac : la cause des précipitations
d’eau est d’origine plus éloignée que ne le sont les actions de
la géographie locale. Ce sont les trajectoires des grands courants d’air,
-des cyclones et anticyclones, ce sont les faits du relief des .vallées, des
plateaux et des montagnes qui déterminent les zones de sécheresse ou
de pluie, les différences dans la fréquence et dans l’abondance-des
chutes d’eau atmosphérique.
Quant aux vents et courants de l’air, la présence du lac est d’effet
nul ou insignifiant sur les grands vents généraux et peut-être môme
■sur les vents d’orage. Le relief de la terré ferme, les grandes vallées,
les chaînes de montagne ont à ce point de vue beaucoup plus
d effet qu une nappe horizontale d’eau, eût-elle plus de cinq cents kilomètres
de superficie. Mais pour les brises locales qui déplacent de
-quelques lieues les masses d’air dans le calme du grand beau temps, la'
■nappe d’un lac est d’efficacité décisive; nous avons sur les bords du
Léman des brises de jour, dés brises de nuit, des brises de lac, des
brises de te rre; nous y avons nos morgets, nos rebats, nos séchards
qui sont dus aux allures différentes du réchauffement et du refroidissement
des surfaces terriennes ou aquatiques. Cela est incontestable;
mais d’autre part, si le lac n’existait pas, si nos villes riveraines étaient
logées sur les flancs d’une grande vallée parcourue à trois cents mètres
plus bas par le Rhône, nous y aurions presque exactement les mêmes
brises, avec les mômes alternances diurnes et nocturnes, seulement
mous les appellerions brises de montagnes, brises, de vallées (*).
Toutes ces conditions météorologiques et climatiques sont en somme
-de peu d’importance : leur efficacité doit être nulle sur l’habitabilité du
pays, leur efficacité directe du moins, car indirectement, par leur action
sur les cultures, elles peuvent avoir une certaine valeur dans le problème
que nous traitons.
On peut en effet attribuer une partie de la plus forte densité de là
population dans, la zone riveraine aux cultures riches, en particulier à
la culture de la vigne, qui y sont beaucoup plus développées que dans
■ la seconde zone. Les beaux vignobles de La Vaux et de La Côte nourrissent
une population plus serrée que les terres en nature de champs,
f1) V. t. i, p. 302 sq.
de prés ou de forêts des plateaux du Jorat, du pied du Jura et du pied
des Alpes du Chablais.
Depuis la fin du'XVIIle siècle, et surtout depuis la seconde moitié du
XIXe, l’homme a découvert ce qu’il ignorait absolument auparavant; il
a appris à admirer la nature; il a en particulier été charmé par les
grandes scènes du paysage du Léman et il s’est aggloméré sur ses
bords. L’afflux passager des touristes de l’été et l’établissement sédentaire
prolongé des fervents des beaux spectacles naturels, ont augmenté
-considérablement la population des rives du Léman. Mais à cet égard,
les stations -assez élevées au-dessus du lac semblent être plus favorisées
que les ■tilles riveraines ; la vue panoramique y est encore plus
belle. A elle seule, cette cause de surpopulation ne donne pas l’explication
du phénomène.
C’est dans la présence du lac lui-même, dans l’action économique
-(économique dans son sens le plus général, des faits de l’habitabilité
du pays) de son voisinage immédiat qu’il faut chercher l’attraction de
la popidation qui s’accumule dans la zone riveraine. Les facilités de la
pêche, dans les temps primitifs, l’ouverture d’une route toute tracée à
la limite de la grève et des forêts, plus tard la meilleure viabilité des
routes longeant le lac, ou les possibilités de la navigation, l’excellente
défense militaire contre les aggressions venant de terre ferme, ces circonstances
locales ont amené l’agrégation de quelques familles, et
bientôt la formation d’un hameau. Au fond d’un golfe protégé contre
les vagues de la tempête, Nyon, Morges, Thonon, à l’extrémité d’un
cap, St-Prex, auprès du pont qui traversait le Rhône émissaire, Genève
au point d’arrivée des routes venant de l’intérieur du pays, Villeneuve,
Bouveret, Thonon, Genève, Morges, des villages se sont développés.
Puis est intervenue la faculté d’attraction que possèdent les agglomérations
humaines : le hameau est devenu village, le village bourgade,
la bourgade ville. La ville s’est accrue en raison des bonnes conditions
•économiques et historiques que nous n’avons pas à exposer ici.
Je crois cependant avoir le droit d’illustrer par un exemple récent
w pris dans, notre voisinage, le phénomène de l’agglomération
des habitations humaines, le développement d’une ville. 11 n’appartient
.pas à l’histoire du lac, mais il n’en est pas moins intéressant et
f1) F.-A. Foret. Renens-la-gare, Gazette de Lausanne, 26 octobre 1902.