de la féodalité, où les luttes pour l’existence et pour la puissance étaient
d’une violence extrême, le pays très divisé, très déchiré était probablement
peu peuplé et certainement fort malheureux.
Dans le milieu du XIIIe siècle, une de ces maisons féodales prit l’avance
sur ses rivaux, et sous Pierre de Savoie, connu dans nos pays
sous le nom de Petit Charlemagne, la prospérité merveilleuse de la dynastie
souveraine des Savoie commença à se développer. Les comtes
de Savoie dominèrent dès lors non seulement sur le Chablais au sud
du Léman, mais encore sur tout ou presque tout le pays de. Vaud. En
1410, après l’extinction des comtes de Genève, la ville épiscopale de
Genève, cité indépendante sous ses évêques, devint l’objet des convoitises
de la cour comtale — puis ducale, a partir de 1416 — deHa-
voie, qui -chercha par tous les moyens à s’y insinuer,' à y gagner des
partisans, à s’y installer par surprise ou par force. '
En 1526, Genève secoua le joug de Savoie et devint ville libre, alliée
de Berne et de Fribourg (traité du 6 février 1526), état qu’élle conserva
jusqu’à la fin du XVIIIe siècle.
En 1536, l’évêché de Lausanne, le pays de Vaud, le pays de Gex et
le Chablais jusqu’à Thonon furent brutalement conquis parles Bernois,
tandis que les Valaisans s’emparaient du Chablais oriental, jusqu’à la
D rance.
Le Chablais occidental et le pays de Gex furent rendus par Berne à
la Savoie par le traité de Lausanne du 30 octobre 1564; le 4 août 1569,
la Savoie obtint du Valais la restitution des mandements d’Evian et
d’Abondancë. Le pays de Vaud resta sujet de Berne pendant plus de
deux cent-soixante ans.
En 1601, par la paix de Lyon, le pays de Gex fut cédé par la Savoie
à la France. Le village de Vèrsoix qui); conquis à deux reprises par
Genève, en 1589, était resté une possession indécise et contestée, subit
le sort du reste du pays de Gex, comme le village dePregny. L aFrance
devenait donc, déjà à cette époque, riveraine du. Léman.
En 1792, le 22 septembre, la Savoie fut conquise par la France qui,
en 1798, envahit de même Genève et le pays- de Vaud. Ce dernier ne
fut que traversé, mais il le fut à réitérées fois par les armées de nos
voisins d’outre-Jura, qui avaient la prétention d’apporter la liberté au
monde.
Genève fut assujettie à la France jusqu’au 31 décembre 1813; la Savoie
du nord jusqu’en 1815. Le pays de Vaud, qui participa à partir de
1798 aux péripéties orageuses de la République helvétique, une et indivisible,
devint, le 10 mars 1803, à1 la suite de l’Acte de Médiation,
canton de la nouvelle Suisse, et inaugura, le 14 avril 1803, sa vie indépendante
d’état libre, définitivement constitué.
Le Valais, envahi par les Français en 1798, puis annexé à la France,
le 14 novembre 1810, fut libéré de l’armée étrangère en décembre 1813,
et le 28 septembre 1814 il fut admis au rang de canton de la Confédération
suisse, en même temps que Genève.
Le second traité de Paris du 20 novembre 1815 fit céder p a r la
France à Genève le bourg et le territoire de Versoix et la commune de
Pregny, qui, jusqu’alors possessions françaises, interrompaient à deux
' reprises, mais sur quelques kilomètres à peine, les communications
avec la Suisse de la République genevoise anciennement alliée, dorénavant
canton de la Confédération helvétique. Par convention du 16
mars 1816, la Sardaigne cédait à Gènève les rives du lac jusqu’à Hermanee.
Quant au Chablais lui-même, il suivit le sort de la Savoie qui était
rentrée, en 1815, sous le sceptre de la maison de Savoie et avait été
incorporée de nouveau au royaume de Sardaigne; elle fut cédée à
l’empire français le 24 mars 1860, en paiement, très onéreux pour le
Piémont, des services rendus à l’Italie par la France dans la guerre
de 1859 contre l’Autriche.
CHAPITRE II — LES QUATRE CANTONS DU LÉMAN
La géographie historique a montré le rôle (important que jouent les
lacs dans le développement du commerce et les rapports des sociétés
politiques. Un lac est une voie facile et toujours ouverte, de communication
internationale’; les vallées qui convergent vers le lac peuvent
devenir, chacune pour ce qui la regarde, le patrimoine d’une peuplade
distincte et à histoire spèciale; mais il est constant, il est normal que
des relations intimes s’établissent entré ces cantons divers; le plus souvent
leur histoire est commune et ils s’unissent fréquemment par des
traités plus ou moins serrés d’alliances ou de confédérations.