Moina bathycolla est un dérivé de M. bracchiala des eaux de
-surface.
Eurycercus lamëllaius, Camptocercus macrounts ne sont pas encore
connus dans les eaux littorales du Léman, ni môme dans les eaux
-campagnardes ¡du bassin de notre lac ; mais ce sont des espèces banales
-A aire très étendue..
Les trois Gythéridés abyssaux du Léman soulèvent un problème
plus délicat. Us n’existent pas dans la région littorale des lacs suisses;
A. Kaufmann, le spécialiste des Ostracodes de notre pays nous l’af-
iirme; il les a cherchés, il ne les a pas trouvés dans les eaux littorales
lacustres, ou dans les eaux campagnardes. Ils n’ont point d’espèces
voisines dans les eaux de surface. D’une autre part leur aire d’extension
est considérable, pour deux espèces du moins; pour la troisième
espèce, Kau fma n n l’a retrouvée dans trois lacs. La question d’origine
est donc dans ce cas fort délicate. Répétons-en les termes.
Cytheridea lacnstris a été découverte en Norwège en 1862 par
Sars ; elle a été retrouvée en Suède par L i 1 j e b o r g, en Angleterre par
Brady, No rma n et Robe r t son. Dans les lacs suisses elle a été
-draguée par nous dans le Léman, par K a u fm a n n dans vingt lacs
■suisses et dans deux lacs autrichiens. Elle existe en particulier dans
les lacs les plus voisins du Léman, les lacs de Joux, de Neuchâtel et
-de Morat.
Limnicythera sancti-patricii Brady et Robertson(') existe d’après la
liste de Ka u fma n n dans les îles Britanniques où elle est très répandue,
dans le Miôsen (Norwège), dans le Léman et dans vingt-trois lacs
suisses et autrichiens, y compris les lacs de Joux, de Neuchâtel et de
Morat, les plus proches voisins du Léman.
Leucocythera mirabilis. Cette espèce, pour laquelle Kaufmann a dû
créer un genre nouveau, n’est pas spéciale à notre lac; elle a été retrouvée
par notre auteur dans les fonds de 10 à 40™, avec les autres
•Ostracodes des lacs de Thoune et de Brienz. Elle n’est donc pas le
produit d’une différenciation locale.
Je le répète, pour ces trois Cythéridés, le Dr A. Ka u fma n n , qui
•depuis de longues années s’est voué à l’étude des Ostracodes suisses,
(*) Dans mon énumération des Ostracodes du Léman (p. 100) j’ai conservé le
nom de Limnicythera relicta, attribué' par les auteurs qui avaient distribué les
_Âcanthopus de Vernet. J’aurais dû lui donner le nom de Limnicythera Sancti-patricii,
-d’après la détermination qui semble plus exacte de Kaufmann.
n’a jamais su les retrouver dans les eaux superficielles(‘). Leur provenance
de la faune littorale n’est donc pas démontrée; elle serait
même douteuse si l’on pouvait se baser sur un argument négatif,
comme celui de leur non constatation dans les eaux de surface. Je
dois avouer que jusqu’à ce qu’on les ait rencontrés quelque part, dans
l’une des stations si diverses des divers faciès du littoral de nos lacs,
je resterai troublé par ce problème. Je n’y vois pas d’autre solution
que la même origine compliquée que nous admettons pour la plupart des
organismes lacustres : différenciation quelque part, dans un lieu où la
continuité n’a pas été interrompue dans la succession des êtres depuis
les époques géologiques anciennes, dissémination par les difîéients
procédés des migrations actives et passives, et spécialemént transport
par les Oiseaux migrateurs ; établissement dans la région littorale de
■chacun de nos lacs où ils seront retrouvés quelque jour ; de là, descente
dans les grands fonds où ils sont devenus des espèces abyssales.
Les Mollusques de la société abyssale, Limnaëa profunda, L. abys-
sicola, Valvata lacustris, Pisidtum Foreli. P .p ro fu n d um , descendent
-directement d’espèces des eaux littorales, ainsi que l’ont reconnu sans
hésitation A. Br o t et S. Cl e s sin.
Parmi les Vers, Bythonomus Lemani est une espèce des eaux littorales
comme des eaux profondes. Emboloceplialus velutinus n a pas
en'core été trouvé dans le littoral du Léman, ni des grands lacs subalpins;
en revanche Z s c h o k k e ( 2) l’indique comme abondant sous les
pierres de la grève dans les lacs du Rhætikon, surtout dans les lacs
aux eaux froides. C’est une espèce littorale, quelque part du moins;
il peut donc avoir été importé dans le littoral de nos lacs, et de là être
descendu dans la région profonde.
Macrorhynchus lemanus a d’abord été différencié par G. d u P l e s -
s i s , d’après des individus abyssaux; il a été depuis lors découvert pai
lui dans la région littorale du Léman et du lac de Neuchâtel.
Plagiostomum Lemani, fréquent dans les eaux abyssales de nos
lacs subalpins, n’a pas encore été trouvé dans le littoral du Léman ni
(ù « Je ne les ai jamais trouvées dans le littoral, pas plus sur le sol sableux dont
la nature et surtout la mobilité seraient peu favorables à leurs allures, que dans
les parties peu profondes, recouvertes de plantes, dont le sol, garni de feutre organique,
semblerait fait pour ces bestioles. » Kaufmann, toc. cit. [p. 101.1 p. 377.
' (2) F. Zschokke. Die Thierwelt in den Hochgebirgsseen. Denkschr. der Schvv.
Naturf. Ges. XXXVII. Zurich 1900, p. 110.