Cela dit. reprenons notre liste des Poissons du Léman et divisons-la.
en catégories suivant la voie de leur introduction.
1° Espèces d’importation artificielle, voulue et cherchée par les pisciculteurs,
dans la seconde moitié du XIXe siècle : Perche-soleil, grande
Marène, White-Fish, Saumon.
2o Espèces d’importation accidentelle, oeuvre non volontaire de
homme : l’Anguille échappée de l’étang de Fernex, le Poisson-dorê'de
la Chine évadé des aquariums d’amateurs.
3o Espèces d’immigration par voie fluviatile dans les. temps historiques:
la Lotte (probablement) à.la fm du XVIIe siècle, la Carpe (peut-
être, voir ci-dessus, p. 60). ' , . . (
4o Espèces d’immigration par voie fluviatile à des époques incon-
■ nues : Perche, Brochet, Chabot (Carpe), Tanche, Goujon, Spirlin,.
Ablette, Rotengle, Gardon, Chevaine, Vairon, Loche, Ombre Truite
Brochet, (Anguille).
, 5° Espèces lacustres, d’immigration par voies à nous absolument inconnues;
introduction inexplicable par les voies actuelles de communication
avec les bassins voisins. Les Corégones, Féra et Gravenche,
.et l’Omble-Chevalier, ne peuvent avoir passé pour arriver au Léman’
par les petits canaux, bief de moulin ou ruisseau de. faible débit qui
joignent le Nozon, affluent de la Thièle à la Venoge. La présence des
Poissons pélagiques dans le Léman implique de larges communications
fluviales avec les autres bassins hydrographiques du nord des
Alpes.
Ce sont ces distinctions que j ’ai traduites par quelques appellations
caractéristiques dans la dernière colonne de mon tableau de la
page 344.
Revenons à nos espèces indigènes, établies dans le Léman de toute
antiquité. Ce sont les Poissons de notre quatrième catégorie, espèces:
fluviátiles et fluvio-lacustres qui sont peut-être arrivées dans notre lac
par voie d’immigration active en passant par les canaux de jonction
entre le lac de Neqchâtel et le Léman. Ce sont ensuite les Poissons de
notre cinquième, catégorie, les espèces lacustres pélagiques dont nous
ne connaissons pas la voie d’immigration. Pour les unes et pour les
autres il y a quelques difficultés d’ordre historique, qui compliquent
la question de leur introduction dans le lac, et qui nous obligent à
-élargir les données du problème.
Nous avons dans le Léman et ses affluents dix-neuf espèces établies
de Poissons indigènes ; la plupart y sont de téute antiquité.
La Lotte est d’après ce que nous avons vu d’immigration probable
■à la fin du XVIIe siècle. Restent dix-huit espèces d’immigration ou d’importation
inconnues, de date en tout cas très ancienne.
De ces dix-huit espèces, dix-sept sont parfaitement reconnaissables
dans la planche du Syndic J. d u V i l l a r d de 1581 (*) et cela sous les
noms suivants :
Truite (il donne deux figures pour les grosses et petites truites).
Chassot (Chabot).
Perche (figurées sous le nom de Perches, de Folerie et de Mille-
•canton).
Bezole (Ferra).
Béchet (Brochet)..
Dormille (Loche),
Chavennoz (Chevaine).
Umbra (Ombre de rivière.)
Omble (Omble-Chevalier):
Carpe.
Tenche (Tanche).
Gogeon (Goujon).
Amaron(2) (Vairon).
Borreta (Ablette et Spirlin).
Brasma, Roffa (Rotengle).
Gravenche.
Vengeron (Gardon).
Les seules espèces qui ne soient pas nettement différenciées par le
vénérable Syndic sont l’Ablette et le Spirlin; mais ces deux espèces
sont réunies par nombre d’auteurs dans le même genre : il a fallu la
zoologie moderne pour les séparer.
(*) Voir ci-dessus, p. 329.
(2) Il y a une faute grave dans la figure de J. d u V i 11 a r d. Sur son dessin de
î ’Amaron il y a une seconde nageoire dorsale ressemblant par sa position à la nageoire
adipeuse des Salmonidés. Mais le nom d’Amaron, encore actuellement
•employé à Bonneville et à Annecy pour désigner le Vairon (G. L u n e 1, Aneron
sur la côte vaudoise du Léman) suffit pour la détermination de ce Poisson.