instinctif. Nous avons vu, en effet, dans les dix dernières années,,
naître une bourgade dont l’accroissement est dû à une cause facile
à démêler.
Renens, à la jonction des lignes de chemins de fer de Lausanne à.
Genève, à Paris par Pontarlier, à la Suisse nord-occidentale par Yver-
don, a reçu la gare de partage des marchandises de la Compagnie du.
Jura-Simplon, et un nombre assez considérable d’employés sont venus
s’y établir. Cet établissement y a attiré des industriels et négociants, et
le hameau est en train de devenir une ville. Les faits de cette métamorphose
peuvent se résumer ainsi;;
Renens-la-Gare est situé sur quatre communes : Renens, Chavannes,
Ecublens et Crissier. Voici les populations de ces villages lors des principaux
recensements du XIXe siècle.
Renens. Chavannes. Ecublens. Crissier. t o t a u x Différence.
4803 250 90 413 354 1107 _
i8 6 0 433 151 604 597 1785 S 678
Ú870 463 155 627 590 1835 50
4880 548 176 642 614 1980 f- 145
1888 645 181 646 648 - 2 120 -f- 140
4900 1295 285 785 880 3245 1125
Dans le Siècle dernier, la population s’est accrrie de 2138 habitants;
elle a triplé.
De 1803 à 1860 l’accroissement moyen a été de 12 habitants par
âri; de 1800 à 1888 il a été de même de douze habitants. C’est l’accroissement
normal de la population des quatre villages dans le-
XlXesiècle. A ce taux, dans les douze dernières années d e l 888 à 1900,
l’agglomération aurait dû gagner 144 habitants; elle en a gagné 1125;
donc, il y a eu dans ces douze années un accroissement anormal,'extraordinaire,
de 981 habitants:
La gare du chemin de fer établie à Renens en 1876 avec 5 ou 6 employés
au plus, a été transformée et agrandie en 1895 ; en 1900, on y
comptait 115 employés mariés avec 230 enfants, et 51 employés célibataires,
ensemble 166 employés, soit un accroissement de 160 employés
sur l’état d’avant 1895. Donc 160 employés amenés à Renens
par le développement de la gare ont été la cause efficiente d’un accroissement
anormal de population de 1125 habitants.
Comment se répartit cette population immigrante. 11 y a d’abord les-
166 employés eux-mêmes et leurs familles, 115 femmes et 230 enfants
;-ensemble 511 âmes. Le reste, soit 614, doit être essentiellement
formé d’artisans, de commerçants appelés par la prospérité de la nouvelle
ville: boulanger, boucher, épicier, cordonnier, tailleur, mercier,
aubergiste, cafetier, cabaretier, maçon, charpentier, serrurier, forgeron,
etc., chacun attiré par les promesses d’un gagne-pain assuré est
arrivé avec'sa famille et a augmenté la population dont la puissance
d’attraction a été d’autant accrue. -
Donc, l’arrivée accidentelle de 160 employés de chemin de fer, dans
un village rural, a transformé celui-ci en une ville naissante en y attirant
plus de six cents industriels, artisans et négociants. C’est un
-exemple intéressant, très instructif, parce qu’il s’est passé sous nos
yeux en quelques années, de la naissance et du développement d’une
ville. Avec d’autres proportions et d’autres allures, les bourgades de
pêcheurs des bords du Léman ont dû, dans le cours des siècles, présenter
des phénomènes analogues, mais dispersés sur un beaucoup
plus long espace de temps.