duit dans la Venoge, affluent du Léman. Il y a donc partage des eaux
du Nozon entre les deux grands bassins hydrographiques de l’Europe
centrale; c’est un canal de jonction qui permet le passage des organismes
du bassin du Rhin dans le bassin du Rhône, qui peut avoir aidé
par conséquent au peuplement du Léman.— Cette dérivation est antérieure
à la fin du XVe siècle; le moulin est déjà mentionné dans un
acte de 1481 (t).
c) Le canal d’Entreroches (2) devait former, dans l’intention de ses
créateurs, une voie commerciale entre le lac de Neuchâtel et le Léman;
s’il n’a jamais été terminé, il a fonctionné en partie pendant près
de deux cents ans. Le canal proprement dit, canal navigable, a été
creusé d’Yverdon au Mormont à travers la plaine de l’Orbe; il aboutissait,
au nord de la colline jurassique qui traverse la plaine, à la Maison
d’Entreroches où l’on chargeait les bateaux. Le canal navigable
recevait les eaux par un canal d’alimentation qui parti de la Venoge
près d’Eclépens se détachait de son bras du Bay, à la Graveyre, longeait
la colline, traversait la cluse du Mormont et arrivait à Entreroches.
Là une écluse de chasse faisait accumuler les eaux dans le canal de la
cluse; puis quand les quatre bateaux qui formaient un train étaient
chargés, on ouvrait les vannes(3) et une poussée d’eau entraînait le
convoi le long du canal. Il pouvait donc y avoir passage d’organismes
d’un bassin à l’autre par ce point de jonction. Si le passage était surtout
facile de la Venoge à la fhièle, du bassin du Léman à celui du
-Rhin, il y avait cependant possibilité de la traversée de quelques Poissons
qui remontant contre le courant auraient servi au peuplement
du Léman. Nous discuterons plus loin cette question à propos dé
l’histoire de l’introduction de la Lotte dans le Léman. Le canal
d’Entreroches a fonctionné avec plus ou moins d’activité de 1640
à 1829.
Constatons que, par ces voies, tout organisme qui remontant ces ruisseaux
se sera établi dans le Nozon en amont de Pompaples, dans le
(*) G. Favey. Supplément au Dictionnaire historique du Canton de Vaud, p -100
Lausanne 1886.
(■) J- °Siz- Le canal d’Entreroches. Revue historique vaudoise, III 204 Lausanne
1895. •
(8) A 1 ouverture de 1 écluse de chasse, la fille du directeur du canal plaçait un
panier ou une hotte en travers du courant d’eau et les retirait bientôt remplis de
Poissons vivants. (Récits de M. J. Ogiz, d’après ses souvenirs de famille.)
cours supérieur du Grenet ou dans le canal d’Entreroches, aura pu
redescendre par la Venoge ou par le Forestay jusqu’au Léman
et si les conditions lui ont été favorables, il aura pu aussi, lui et ses
descendants, devenir partie intégrante de- la société biologique du
Léman.
Il est assez difficile de dire à priori quel a été l’effet de ces voies de
communication directe entre le bassin hydrographique de la Tbièle, et
par conséquent le bassin du Rhin et celui du Rhône. Quels sont les
organismes qui en ont profité ? Si d’autre part nous voulons nous baser
sur l’observation, nous devons reconnaître que nous sommes incapables,
pour le moment, de tirer des conclusions utiles de ce qui est
connu siir les organismes inférieurs; les faits qui les concernent sont
encore trop mal coordonnés pour que nous puissions en dédufre quelque
chose d’utile sur les migrations qui les ont amenés dans notre
pays; ce travail mériterait d’être entrepris, et nous le recommandons a
l’attention de nos jeunes naturalistes. Les Poissons qui, en dehors de la
pisciculture, ne peuvent être arrivés au Léman que par migration active
et normale, nous seront plus utiles ; nous traiterons du peuplement
du Léman par les Poissons dans un chapitre spécial. Bornons-nous à
dire ici que, dans cette classe d’animaux puissants, actifs, aventureux,
bon nombre d’espèces n’ont pas su arriver jusqu’au Léman. Un tiers
environ de la faune ichthyologique des lacs du Nord de la Suisse m anque
à notre Léman. Si nous étendons cette notion que nous tirons de
l’observation des Poissons aux autres classes d’organismes pour lesquels
les faits ne sont pas encore suffisamment établis, .nous en déduirons
la conclusion suivante : Sauf les Poissons migrateurs et les
animaux et plantes de rivières qui ont pu utiliser les ponts de jonction
fluviatile entre le bassin de la Thièle et celui du Rhône, sauf les quelques
espèces d’insectes qui à l’état ailé peuvent à travers l’air passer
d’un bassin à l’autre où ils se développent à l’état de larves, le peuplement
du Léman s’est fait essentiellement par voie de migration passive
ou de migration anormale.
Nous avons indiqué^) les procédés les plus fréquents de ces migrations
passives; voici ceux qui nous paraissent avoir pu contribuer le.