Les mêmes faits se sont produits à la iin de l'époque glaciaire. A
mesure quelesgrands glaciers se raccourcissaientpar fusion, à mesure
que le sol se dégageait, celui-ci était envahi par la végétation qui rentrait
dans une direction centripète, des plaines environnantes vers la
Suisse et vers les Alpes. La population animale et végétale qui a repeuplé
la Suisse après l’époque glaciaire lui est revenue des plaines voisines,
des plaines de F rance, d’Allemagne et d’Italie.
La population biologique actuelle de la Suisse descend donc, à l’exception
d’une partie des sociétés des hautes Alpes, de ces immigrés
entiés après I époque glaciaire. Elle est d’importation, d’immigration
récente, géologiquement parlant.
Ce qui est vrai pour les'populations animales et végétales en général,
I est aussi pour les populations aquatiques. De même que la terre et
l’air se sont repeuplés par immigration, de même aussi les eaux. Mais
ici nous nous trouvons en présence d e plus de difficultés.
En effet 1 immigration était de direction centripète, de la périférie
au centre. Mais notre pays étant plus élevé en altitude que les plaines
environnantes, les eaux s’écoulent dans des directions centrifuges.
Pour entrer en Suisse, les organismes, aquatiques ont donc dû lutter
contre les courants souvent très violents des fleuves.
Une telle lutte est-elle possible avec quelque chance de succès pour
tous les organismes aquatiques de nos eaux subalpines1?
La réponse n’est pas absolument négative pour tous. Analysons le
phénomène. Si nous étudions le courant d’un fleuve, nous voyons le
transport général de l’eau d’amont vers aval, c’est incontestable. Mais
en même temps nous constatons que, presque partout, i! y a sur les
parties latérales des remous qui ramènent temporairement et localement
une partie de l’eau en sens inverse; que ces remous sont irrégu
liers, se déplacent et empiètent alternativement les uns sur les autres
II peut donc y avoir transport d’aval vers l’amont d’organismes non
spontanément mobiles, comme les plantes et les animaux fixés. Ils
peuvent avec le temps et très lentement remonter le cours d’un fleuve
de plaine. Mais sont-ils capables de franchir par ce procédé un rapide,
un défilé rocheux, iine cascade? Je n’en vois pas la possibilité. Y a-t-il
d autre part dans notre plaine suisse une seule rivière qui ne présente
pas de tels défilés infranchissables, d’oiigine naturelle, indépendam-
ments des ponts et barrages de construction humaine? La Perte du
Rhône'de Beliegarde, le rapide de Laufenbourg, pour ne parler que de •
nos deux grands fleuves de plaine, sont, semble-t-il, des obstacles?
insurmontables à la migration des espèces môme mobiles, surtout
quand elles ne sont pas grandes nageuses comme les Poissons.
Donc, s’il n’y a pas en général pour les organismes aquatiques impossibilité
absolue à ce qu’ils remontent le cours des rivières, cependant
dans notre plaine Subalpine du nord des Alpes et spécialement
pour les bassins du Rhin en amont de Laufenbourg et de Neu-
hausen, et du Rhône en amont de Beliegarde, l’obstacle est probablement
infranchissable, et nous devons étudier la question générale »
Gomment la nature procède-t-elle à la dissémination des organismes-
aquatiques? — Pour y répondre, cherchons les voies et moyens desmigrations
des animaux et des plantes.
Les migrations qui transportent les animaux d’un pays à l’autre-
peuvent se- faire suivant deux modes tout différents : elles peuvent
être a c tiv e s ou p a s s iv e s . Les migrations des plantes sont toutes passives.
„
Par migration active, les animaux se transportént spontanément,
volontairement, par les procédés de locomotion propres à leur espèce,
en volant comme les Oiseaux et les Insectes, en nageant comme les
Poissons et les Crustacés, en rampant comme les Mollusques et les?
Vers.
Par migration passive, les animaux et les plantes sont transportés?
par un agent quelconque, par un véhicule qui les fait voyager sans?
qu’ils aient à faire intervenir leur mode naturel de locomotion. Comme-
exemples tirés des organismes lacustres, je citerai :
a) Le transport par les vents de graines, d’oeufs et de germes à
l’état de poussières sèches.
h) Le transport par les fleuves, dans l’eau, sur des bois flottés, suides
glaçons,
c) Le transport d’amont en aval par l’éboulement d’un terrain qui
déplace avec le sol les organismes animaux et végétaux qui l’habitent.
d) Le transport sur d’autres animaux migrateurs, les Poissons et
surtout les Oiseaux d’eau. Sans parler ici des parasites proprement
dit, les endoparasites, les Poissons transportent les organismes qui,
s’accrochent normalement ou accidentellement à leurs écailles (larves
de Naïades, par exemple); les Palmipèdes nageant à la surface d’un