Ces quantités représentent un prix d’achat total de 200 000 francs
par an, payés aux pêcheurs ayant contrat avec ces marchands.
Essaierons-nous d’après des données si imparfaites et si insuffisantes
de chercher une évaluation de l’importance de la pèche dans notre
lac? C’est bien osé. Je me risque cependant, en demandant le bénéfice
des circonstances atténuantes.
D’après l’appréciation la plus plausible des hommes les plus compétents,
ce chiffre de 200000 f r , achats des Lugrin, devait être multiplié
par trois ou par quatre pour représenter la valeur totale du produit
de la pèche du Léman entre les mains des divers industriels qui la
pratiquent.
Quant au prix de vente, il doit être probablement le double du prix
d’achat. Le chiffre d’affaires que représenté la pêche dans le Léman
(vente de Poissons au consommateur) s’élèverait ainsi à près d’un
million et demi de francs par an. Inutile d’insister sur'ce que ce chiffre
a de vague et d’élastique.
Le nombre des pêcheurs travaillant dans le Léman doit s’élever à
onze ou douze cents hommes.
CHAPITRE IX. LA PISCICULTURE.
Les travaux d’empoissonnement industriel ou expérimental, fécondation
artificielle, incubation, alevinage, ont été commencés dans notre
pays vers le milieu du XIXe siècle. Nous essayerons d’en retracer
l’histoire dans chacun des cantons du Léman.
Genève.
Les premiers essais de pisciculture à Genève en 1852 et 1853 Q) ont
été faits par les Drs François et Jsaac Mayor , père et fils, et par le Dr
Du ch o s a l dans un petit établissement qu’ils avaient construit à Sous-
terre sur les bords du Rhône, rive droite, un peu aval de la Coulou-
(fj Dans l’article «Fischzucht in der Schwëiz» du catalogue Chasse et Pêche
de l’Exposition nationale de Genève en 1896, p. 106, Fritz de W a t t e n w y l donne
la date de 1862 pour les premiers essais de pisciculture à Genève. Il y a là erreur;
c’est 1852 qu’on doit lire.
vrenière. Ils recevaient des oeufs de Saumon de Bâle et de Huningue.
En 1854 quelques centaines de jeunes poissons, longs déjà de 8cm,
s’échappèrent dans le Rhône et remontèrent peut-être dans le lac (*).
Vingt ans après, en 1872, le Dr Isaac Mayor avait élevé des Epinoches,
Gasterosteus leiurus, dans l’étang de sa propriété d’Hermance (2). Ces*
poissons se sont maintenus dans le Ruisseau d’Hermance, oü il y en
avait encore, il y a quelques années. (3)-
A la suite de la Conférence internationale du 30 octobre 1871 au sujet
de la pêche dans le Léman, le professeur Dr Isaac Mayor proposa,
et le Grand Conseil de Genève admit, que la ferme de la pêche sur les
frayères de la Truite, abolie par la loi de 1862, fût rétablie en faveur
d un pêcheur très actif et très intelligent, François L u g r i n , à condition
que celui-ci organisât un atelier de pisciculture et fournît à l’Etat
une quantité déterminée d’alevins de Truite (^. Ensuite de cette convention
Lugrin dut verser dans le Rhône (5) ;
En 1871 12000 alevins. En 1875 350000 alevins.
1872 50000 ?— 1876 350000 —
1873 200 000 — 1877 350000 —
1874 200000 —
C’est ainsi que Lugrin doit avoir fourni plus de 1500 mille alevins de
Truites.
A partir de 1878, le dit pêcheur n ’ayant plus pu livrer la quantité
d’alevins exigée par l’autorité, la ferme de la pèche lui fut retirée et
l’Etat de Genève organisa lui-même, sous la direction du professeur
Dr Alfred V a u c h e r , un atelier de pisciculture dans le sous-solde
l’Ecole de médecine, assez grand pour y élever 800 000 oeufs. En 1878,
ces 800000 oeufs ne donnèrent que 200 000 alevins qui furent versés’
au Rhône(5). Ën 1879, 80 000 alevins ; en 1880,170 000.
En 1882, l’Etat fit construire sous la direction de Vaucher l’atelier
de pisciculture de St-Jean, encore aujourd’hui existant.
En 1884, Ernest C o v e l l e succéda à Vaucher et obtint des résultats
remarquables dans l’éducation des alevins, provenant d’oeufs de Truites
('), Lunel~[loc. cit., 55], p. 128.
(*) Folio, [loc. cit., p. 55], IV, p. 87.
(8) Dr Albert Mayor, Genève 30 oct. 1903 in litt.
(4) Lunel, p, 201. / f
(6) A. Vaucher. Renseignements sur la pisciculture à Genève rn « Internationale
F îscherei-Ausstellung zu Berlin, Abtheilung Schweiz », p. 61. Leipzig 1880.