étudier à leur sortie de l’eau. Que l’on veuille bien regarder attentivement
ma figure 216 : on y verra peut-être, ce qui est parfaitement distinct
su r i’échantillon en nature, le fond des trous avec la roche à nu,
les arêtes recouvertes de leurs coussinets d’algues incrustantes.
b. Je connais l’action cariante que C h o d a t a si bien décrite; je l’ai
vue sur de nombreux échantillons. Les pierres sculptées la présentent
souvent sur tout ou partie de leur surface. Je suis allé, le 27 juin 1901,
étudier à nouveau les faits à Clendy, près d’Yverdon, à Grandson, à-
Corcelettes, et j ’ai retrouvé sur un grand nombre de pierres la couche
tendre, crayeuse, de couleur différente de celle de la pierre saine que
le botaniste de Genève attribue avec raison à la pénétration par les filaments
des algues; sur d’autres pierres, une couche ocreuse, due à
la suroxydation des sels de fer. Mais ce qui me paraît constant ou au
moins le plus fréquent, c’est que cette écorce, cariée ou ocreuse, se retrouve
avec la même épaisseur sur toute la surface libre de la pierre,
aussi bien sur les parties saillantes, sur les arêtes où la pierre n’a pas
été insculptée, aussi bien dans le fond des sillons ou des creux où
l’action corrosive a été maximale. Sur les coupes, on la voit former une
écorce dont l’épaisseur est partout la môme. La conclusion de ce fait
est, si je ne me trompe, que la couche cariée, comme la couche
ocreuse, sont dues à des actions secondaires, postérieures à la sculpture
qui a entaillé la surface des pierres.
Suivant l’hypothèse de Chodat, la couche cariée, attaquée par l’ex-
foliation mécanique des animaux circulant dans les sillons, devrait
être plus ou moins complètement détruite dans le fond des sillons et
des creux de la sculpture. Cela n’est pas. 11 me parait évident, d’après
certains échantillons très démonstratifs, que la couche cariée n’a pas
été attaquée localement, pour laisser, comme résultat de cette attaque,
les creux et sillons des sculptures.
c. Si, sur un grand nombre de pierres, on constate facilement l’altération
signalée par Chodat, sur d’autres pierres, aussi brillamment
sculptées, on n’en voit pas trace; aussi bien dans le. fond des creux
que sur les arêtes, la pierre calcaire est intacte, et n’est nullement pénétrée
par l’action cariante. C’est surtout évident pour les galets formés
de calcaire alpin noir, ou certains calcaires jurassiens jaunes, très
compacts. Sur une soixantaine d’échantillons que j’ai rapportés de ma
course du 27 juin, une dizaine au moins, ne montrent pas trace de
l’écorce cariée de Chodat. J’ai vérifié le fait sur des coupes minces,transparentes,
où le microscope laisse voir la pierre intacte jusqu à la surface
limite, aussi bien dans les parties' saillantes que dans les excavations.
Si l’on me répond que la couche cariée aurait été enlevée par 1 érosion
mécanique des vagues et dé l’eau, tenant en suspension du sable,
promenée sur la grève, je répliquerai, tout d’abord, que les pierres en
question ne sont nullement roulées ou émoussées par une action mécanique
de ce genre; puis, que si une telle action d’érosion avait, été
efficace, elle se serait manifestée surtout sur les arêtes saillantes, et
aurait laissé quelques témoins de l’état antérieur, sous la forme de lambeaux
d’écorce cariée dans le fond des creux et parties en retraite.
Cela n’est pas.
Ces trois objections sont assez graves pour que j’ose prier mon ami,
le professeur de Genève, de les prendre en sérieuse considération.
XIV. Pelotes fibreuses.
Les vagues de la mer et des lacs, en déferlant sur la grève, roulent
et nouent ensemble les poils et fibres, plus ou moins flexibles, de quelque
nature qu’ils soient, qui sont accumulés dans les eaux de la beine;
elles en font des pelotes, des balles, des boules feutrées, qui sont rejetées
sur la rive. On les appelle par analogie avec les pelotes de poils
de l’estomac des Ruminants,des é g a g r o p ile s ou faux é g a g r o p ile s ;
je préfère un nom plus simple-, et je les désigne sous le nom de pelotes
fibreuses, le mot fibre pouvant s’étendre à toute partie filamenteuse,
qu’elle soit d’origine végétale ou animale, aussi bien à un poil de mammifère,
qu’à un débris des fibres d’une plante.
J’en connais dans la m e r(1), où elles sont formées de débris de
Zostères, de Cymodocées, etc, (elles étaient connues dans l’ancienne
pharmacopée, sous le nom de pilae marinae). Dans les lacs de Scandinavie,
d’Allemagne, d’Autriche, lès Seebàllen sont dues au peloton-
nage ou feutrage d’une Algue filamenteuse, Cladopliora aegagropila
Rab. Dans les lacs de l’Engadine, elles sont constituées par l’enchevè-
(l) Plage du Prado, à Marseille, par exemple.