tions semblent avoir perdu leur signification précise par le transport
dans notre bassin lacustre.
Quant aux bateaux eux-mêmes, nous n’en savons pas grand’chose.
La seule note sur leur construction que nous ayons est la suivante :
Le 14 nov. 1375, la ville de Nyon est autorisée par Amédée VI de Savoie
à lever certaines taxes, entre autres : pour chaque petit bateau
deux deniers lausannois; si le bateau a plus de quatre pieds de large,
quatre sous lausannois; si le bateau a pius de 8 pieds, 8 sous; s’il a
plus de 10 pieds, un florin d’o r ( I). Cela nous indique qu’il y avait sur
le lac des bateaux dépassant dix pieds ou 3m de largeur; nos cochères
actuelles ont 4m de large au maître bau. Ces bateaux de trois mètres
de largeur devaient appartenir au type de la naue que nous retrouverons
bientôt ; c’étaient probablement les corseyres dont nous venons
de parler.
CHAPITRE V. FLOTTES DE GUERRE.
Nous aurons besoin, lorsque nous chercherons à retrouver l’origine
de la barque marchande du Léman, de nous appuyer sur l’histoire des
flottes de guerre de notre lac, sur l’apparition des galères. Nous allons
donc la résumer en nous fondant sur les travaux antérieurs:
E. Von R o d t. Geschichte des bernischen Kriegswesen, Bern 1834.
Das Seewesen, II, 170 ;
A. de G o um o ë n s -W u r s tem b e rg e r . La marine bernoise sur le
lac Léman. Gazette de Lausanne, 6 mai 1881;
B. H a lle r . Die bernisché Marine auf dem Genfersee. Bern 1896.
Trad. H. May or. Revue hist, vaudoise IV, 161 et 193. Lausannel896;
J.-D. B l a v ig n a c . Armorial Genevois. Exercice de la Navigation.
Mém. et Doc. Soc. d’hist. de Genève; VI, 315. Genève 1852;
Ad. Mo y n ie r. Histoire de la navigation sur le lac Léman. Dans
G. F a t io . Le Yachting sur le lac Léman. Genève 1896;
C1) F. Forel. Franchises communales. Mém. et Doc. Soc. bist. S. R. XXVII,
p. 165.
pour les époques les plus anciennes, sur les mémoires encore inédits
de M. A. N a e f , d’après les comptes de là châtellenie de Chillon;
et enfin sur nos recherches personnelles dans . les archives de Lau-.
sanne, Genève et Berne. ,
Les plus anciens documents que nous ayons sur là marine militaire
du Léman remontent à la fin du XIIIe siècle. Dans les comptes de la
châtellenie de Chillon et dans ceux du péage de Villeneuve, qui sont
conservés aux archives de Turin Q) on voit déjà en 1258 une barque
du comte P i e r r e , le Petit Charlemagne, bar g a domini, que l’on tire
à terre et que l’on rentre sous un hangar. C’est peut-être le même bateau
que, à partir de 1283, sous le Comte P h i l ip p e , on voit désigner
sous le nom de «barque à barrières«, navis baragniata(?), un navire
de guerre, probablement une galère. Nous voyons ce terme cité jusqu’en
1304. La navis baragniata était un bateau de grande taille, muni
de 36 rames, soit 18 paires(3), ou 18 rames de chaque côté; il portait
jusqu’à 3 3 ou 3 7 matelots (rameurs), soit un rameur par rame, 10 à
20 archers (4), sans parler des officiers.
A partir de 1288 (comte A m é d é e V, le Grand) nous voyons apparaître
le nom des g a l è r e s proprement dites, galee, gualee, et elles
sont fréquemment mentionnées dans les comptes jusqu’en 1350, c’est-
à-dire sous les régnes d ’E d o u a r d , d ’A ymon et d ’A m é d é e VI,
' (>j Ces comptes ont été dépouillés et copiés en 1898 p a r M. A. Mi l l i o u d , aide-
archiviste des Archives cantonales de Lausanne. M, À. N aef , l’archéologue cantonal
qui poursuit avec ardeur et succès la restauration du château de Chillon a élaboré
ces notes : il m ’a communiqué le mémoire qu’il a lu le 11 octobre 1902 devant la
Société des architectes et ingénieurs Vaudois, et le manuscrit d’une étude su r la
flotte militaire de Savoie, qu’il publiera prochainement. M. Victor van B e r c h e m
a fait copier intégralement ces comptes de la châtellenie de Chillon qu’il publiera
bientôt dans les Mémoires et Documents de la Société d’histoire de la Suisse Romande.
I l m’a fait l’amitié de me communiquer ce précieux manuscrit qui s’étend
de 1257 à 1310. Je remercie ces collègues pour leu r obligeante assistance. -
Q Baragna, garde-fou, balustre, balustrade, rampe d’appui dans un ëscalier.
Doyen Bridel. Glossaire des patois. M. et D. S. B. S. .R. XXI, 27. L ausanne 1866.
(s) Les rames des galères n ’étaient pas disposées p a r paires dans le sens que
nous donnons à'ce mot, lorsque nous parlons d’un rameur qui manie à la-fois deux
rames symétriques, une de chaque main, une paire de rames. Sur ces'galères les,
rames étaient ce que nous appelons des avirons, maniés chacun p a r un ou plusieurs
rameurs. Pour abréger la description j ’emploierai cependant le terme de
paires de rames et j ’indiquerai le nombre des rames qu’il y a d’un seul côté de la
galère. Le nombre total des rames se ra donc le double de celui des paires, ou de
celui des rames d’un des côtés du bâtiment, ou encpre de celui des bancs p a r bande.
(4) La paye des rameurs était de 8 deniers, celle des archers de 12 deniers p a r
jour. Comptes de Chillon de 1288.