
 
		objets délicats  qui  étaient  autrefois  sur  les  anciens  planchers  des cabanes  
 sont tombés dans  l’eau,  et  dans  une  eau  assez  profonde pour  
 qu’ils  n’aient  pas  été  roulés  par  les  vagues ;  les  tessons  de  poteries  
 entre  autres  n’ont  nulle  part ,,les  angles  et  bords  émoussés  qu’ils  
 auraient  eus  s’ils  avaient  été maniés,  roulés  et frottés par les  flots. 
 Nouâ  pouvons  même  d’après  ce  dernier  détail  compléter  notre  
 conclusion. En môme  temps que nous pouvons affirmer que, à l’époque  
 lacustre, le  lac avait  à peu  près — j ’entends  à 2 ou  4 mètres près —  le  
 môme  niveau  que  de  nos  jours,  nous  pouvons  ajouter  que,  entre  
 cette  époque  et l’époque  actuelle, le lac ne s ’est  jamais  abaissé, môme  
 temporairement,  assez pour  que  ces  poteries  aient  été  roulées  sur la-  
 grève.  Il  est possible que dans  cet  intervalle le  lac  ait  été  plus  élevé ;  
 il n est pas possible  qu’il  ait  été plus bas. Le sol de nos  cités lacustres1  
 n a jamais  fait  partie de  la grève (')  depuis  que  les  objets  antiques y  
 sont tombés. 
 Une  autre observation  tirée du  même ordre  de faits  est la suivante :  
 S’il  est une loi  générale  dans  la  distribution des  stations  lacustres du  
 lac Léman,  réparties selon leur âge relatif,  c’est que  les  bourgades de  
 l’âge de la pierre sont notablement plus près  du  rivage,  ét;à  une  profondeur  
 d’eau plus  faible que  celles  de l’âge du  bronze. Cela  est visible  
 en particulier là où les  deux villages  sont  à  côté l’un  de  l’autre,  ainsi à  
 Morges,  la station  de l’Eglise  et la grande cité du  bronzé,  à Genève,  les  
 stations  des Pâquis  et des Eaux-Vives .de l’âge de la pierre au  bord  du  
 lac,  la  cité de Genève de l’âge du bronze  au milieu  de  la rade. Ainsi les  
 deux  stations  de  la Gabiule,  celles de Nernier,  celles  de Thonon,  e t c /  , 
 Voici  comme-exemple la  cote d’altitude des  extrêmes  des trois palafittes  
 de Morges.  Je les  rapporte à Z. L.,  l’étiage'du  lac  établi,  comme  
 on  le  sait à 3,0m  en  contrebas  du  repère  en  bronze  de  la Pierre  du  
 Niton,  de Genève (2). 
 ZL  =   RPN  -  3.0® 
 Station  de  l’Eglise. Age  de  la pierre  ZL  —  1.65  à     0.8® 
 Station  des Roseaux. Age  de transition  ZL  —  1,2  à  —  0.4®  
 Grande  cité de Morges. Bel  âgé  du bronze  ZL  —  2.8  à  —  1.0» 
 0) Disons  : pendant quelques  années.  L’abaissement  accidentel  des  eaux pendant  
 quelques  semaines, comme dans l’hiver de 1880, peut fort  bien .avoir  eu lieu  
 sans que des poteries mises  à nu  aient été. trop  roulées par les vagues. 
 Depuis l’an 1779 que nous  possédons  des  observations  limnimétri-  
 qués  repérables, nous  avons eu ’les  extrêmes de hauteur des  e a u x (‘) :  
 Minimum, 18  février 1830  ZL  +   0.224® 
 Maximum, 16 juillet 1817  ZL  +   2.886m 
 D’après  cela les  extrêmes  de  profondeur  d’eàu  dans  nos  trois  stations  
 de Morges auraient été : 
 En minimum,  le 18  février  1830'.  Station des Roseaux  0.6m' 
 En maximum,  le 16 juillet 1817.  ,Grande  cité de Morges  5.7® 
 Sans que j’aie pris  des  mesures  exactes  dans  les  autrés stations (2),  
 et sans  que je puisse  utiliser  les données  des  auteurs qui parlent bien  
 de profondeur  d’eau  grande ou  faible, mais qui  n’indiquent pas  à quel  
 niveau  du  lac  se rapportent lés  appréciations, j’estime que  ces valeurs  
 extrêmes  sont,  à 50  centimètres ou  un mètre  près,  valables  pour  lés  
 divers palafittes  du Léman. 
 On  pourrait expliquer  cette  différence en  admettant  une  légère variation  
 du  niveau  moyen  du  lac  qui  aurait  été  un  peu  plus  bas  à  
 l’époque du  bronze qu’à  celle de  la  pierre.  Mais  nous ne  pouvons pas  
 alier  très  loin  dans  cette direction, parce  qu’un  abaissement des  eaux  
 de deux mètres  à-F âge  du  bronze  aurait  mis  à  sec  nos palafittes  de  
 l’âge de la pierre  (station  des Roseaux de Morges, p. ex.). Or les vagues-  
 n’ont jamais  roulé les poteries tombées  dans les  ruines de  ces stations. 
 Nous  en  sommes  réduits  à  attribuer  aux  Palafîtteurs du bronze des  
 outils  et des moyens mécaniques plus  puissants  qu’à  ceux de l’âge de  
 la pierre ;  les premiers  auraient  pu  couper et  manier  des  troncs d’arbres  
 plus  longs  que  leurs  ancêtres néolithiques. 
 Nous  sommes  confirmés  dans  cette  interprétation  par le fait que  la  
 même différence  dans  la  position  relative  des palafittes de la pierre et  
 du  bronze se  retrouve  également  au  bord des autres  lacs;  les  stations  
 du  bronze  sont  en général  sous une profondeur d’eau  plus  grande que.  
 celles de  la pierre (3). 
 (<) V. ,t.  I, p.  400. 
 '  (’) Je  citerai cependant  la  profondeur  de  l'eau  sur  la station  de Rolle,  d’après  
 des notes de M. Henri Monod.  Zi.  — 0.75 à 1.85m. 
 (3)  E.  Desor.  Les pala1itt.es [loc.  cit. 443]  p.  8 et 81. — Heierli.  [loc.  cit p. 208.]