influencée par ia température des eaux qui y entrent, de môme aussi
la population indigène du lac peut être modifiée ou renouvelée partiellement
par apport de germes et d’organismes venant des eaux du
bassin d’alimentation. Ce sont ces eaux qui ont procuré le peuplement
primitif du lac; elles contribuent à un rajeunissement des flores et des
faunes. 11 ne semble du reste pas que cela annule en rien le caractère
d’individualité que nous avons reconnu au lac.
Mais il y a plus. Nous avons vu comment, par migration passive,
due surtout au transport par les Oiseaux migrateurs, la flore et la
faune reçoivent des apports fréquents, venant de lacs étrangers. C’est
à propos de la faune pélagique que nous avons étudié ces faits
(page 282); mais ils sont aussi applicables à la faune littorale, et à
l’ensemble de la flore lacustre. A ce point de vue, le lac est moins
isolé qu’il ne le paraît au premier abord : il y a influence, il y a réaction
réciproque d’un lac à l’autre. Notons cependant que ces actions à
distance, très intéressantes au point de vue théorique, tellement que
nous avons dû en étudier longuement le mécanisme, sont en réalité
de très faible efficacité; le nombre des germes transplantés avec succès,
d’un lac à l’autre, doit être relativement peu important. La très
grande majorité des organismes des sociétés lacustres, ont leur vie
uniquement localisée dans le lac où ils sont nés, qu’ils ont habité et où
ils mourront.
Toujours est-il, qu’à côté de l’individualisme fondamental de la biologie
du lac, il y a parfois, et accidentellement, intervention de faits venant
d’autres lacs; le lac est peut-être moins isolé à ce point de vùe,
que pour ce qui regarde sa physique et sa géologie. Ne serait-ce pas
abuser de trop grands termes, si je disais qu’à côté des faits égoïstes
de la vie individuelle du lac, on voit apparaître, dans sa biologie, certains
faits de solidarité avec les autres lacs? Ce serait parfaitement
exact, si l’on pouvait faire abstraction de l’idée morale qu’il y a au fond
de ces mots égoïsme et solidarité. Mais la notion de moralité est ignorée
par la géographie; disons donc simplement : Le lac est un individu
géographique qui a quelques rapports avec ses voisins et ses congénères.
L’individualité du lac, partie de l’hydrosphère, séparée de la mer
au milieu du continent, est analogue à celle d’une île, partie de la lithosphère,
séparée des terres continentales au milieu de l’océan.
DOUZIÈME PARTIE
HISTOIRE
CHAPITRE PREMIER I* .R É SUM É HISTORIQUE
11 ne peut entrer dans le plan de cet ouvrage de géographie d’y introduire
une histoire complète du pays que baigne le Léman. Il me paraît
cependant convenable d’en esquisser rapidement les grands traits;
ce sera le cadre où nous logerons les quelques événements historiques
qui intéressent notre lac.
L’histoire commence pour notre pays avec la pré-histoire, c’est-à-
dire avec cette série d’événements auxquels l’homme a assisté ou participé
avant qu’il sût les enregistrer dans des documents écrits ou
traditionnels; ils nous ont été révélés par l’étude archéologique des
monuments enfouis dans le sol ou dans les eaux. Cette pré-histoire se
distingue de l’histoire proprement dite en ce qu’elle n’est pas assise'
sur une chronologie à dates positives ou absolues. Sa chronologie n’est
que relative ; c’est de la chronologie géologique.
Lespremières traces de l’histoire antéhistorique de l’homme en Suisse
appartiennent à l’âge géologique connu sous le nom d’époque glaciaire.
Le glacier du Rhône, après avoir atteint les dimensions colossales qui