traite de Peau, du lac, et non de la pierre sous-jacente. Quant à la
sculpture des pierres sous les algues incrustantes, il prend une position
intermédiaire entre l’opinion de C h o d a t d’une part, et celle de
K ir c h n e r et de moi-même d’autre part. Je traduis sa conclusion:
« L’attaque qui aboutit à la corrosion et à la perforation de la pierre
est due à la fois aux algues et aux animaux. Lequel des deux groupes
d’organismes est le plus actif? C’est difficile à dire. La première attaque
est due incontestablement aux algues; plus tard les animaux, en
ouvrant des chemins par lesquels l’eau arrive à la surface de la pierre,
et en excavant l’écorce corrodée, jouent un grand rôle dans le procès
des sculptures. » La nature pétrographique de la pierre a une importance
notable sur la production de ces sculptures ; la grande action a
lieu sur les calcaires; cependant dans les lacs du Danemark on peut
démontrer une action de corrosion môme sur dés silex.
Dans sa Monographie du lac de Starnberg(*), U le décrit deux
types de pierres sculptées; toutes les sculptures des galets étant du type
méandrique : les unes sont couvertes d’un revêtement d’algues, les autres
n ’en ont point. Ces dernières, il les attribue à des larves d’insectes
(Mückenlarven). Quant à la couche des Algues, il la tient pour une
production secondaire, surajoutée, qui n’a rien à faire avec les sculptures.
;
- — Je constate que le problème de la sculpture des galets dans les lacs
d ’eau.douce n’est.pas encore entièrement résolu; il y a encore beaucoup
d’inconnues. Mais je crois que certains faits sont acquis. Je vais
essayer de les exposer ici. Le sujet est difficile, et il a.été trop souvent
compliqué par des interprétations erronées d’observations parfaitement
justes (2).
Le principe général qui m’a guidé dès le début de mes recherches
et observations sur ce sujet, et que j ’ai toujours exprimé très explicitement^),
c’est qu’il y a plusieurs causes efficientes de la sculpture
des galets lacustres, causes différentes suivant les cas, les stations et
f1) Willi Ule. Der Wiirmsee. Leipzig 1901, p. 75.
(-) C’est le sort commun de tout naturaliste d’être parfois mal compris, et de se
voir attribuer des opinions étranges auxquelles il n’a jamais songé. Cela m’est
souvent arrivé. Mais dans aucun chapitre de la limnologie je n’ai plus fréquemment
subi cette maie chance comme dans celui des galets sculptés. Est-ce que j ’y
a i été particulièrement maladroit dans mes descriptions 7
d) Sauf peut-être dans ma première lettre sur ce thème à Jean de la Harpe, en
1866, où je n’avais encore vu qu’une des faces de la question.
les lacs. Cette notion a été négligée par la plupart de mes honorables
contradicteurs, et c’est là une des raisons de l’inextricable confusion
qui a été apportée dans ce chapitre de l’histoire naturelle des lacs. Je
décrirai ici les actions insculptantes que je connais; je n’ai pas la prétention
de pouvoir épuiser toutes les possibilités.
A. Erosion indéfinie, érosion chimique et mécanique
de l’eau littorale.
Les pierres des parois rocheuses naturelles^ celles des murs des
quais’ et ports artificiels qui ont été longtemps en contact avec l’eau
du lac, sont attaquées par cette eau, à peu près comme le sont, par les
agents atmosphériques, les pierres exposées à l’air libre. Cela se re connaît
surtout sur les pierres taillées. Les minuties de la taille, les
coups de la boucharde sur les faces, sur les arêtes vives des angles,
sont émoussés, arrondis, effacés. J’attribue cette usure, d’une part à la
dissolution par l’acide carbonique de l’eau, d’autre part au frottement
mécanique de l’eau tenant en suspension des poussières minérales
soulevées par les vagues.
Cette érosion des pierres est péu active et mal définie. Il est probable
qu’on trouverait une différence entre les parties qui, battues p a r
les grandes vagues venues du large, sont débarrassées du revêtement
des algues filamenteuses et incrustantes qui recouvre la face libre des
murs, et célles où ce revêtement persiste. Ces algues,' insérées directement
sur la pierre, doivent, d’autre part, la corroder et l’éroder insensiblement.
Mais ces actions sont tellement faibles qu’il ne vaut
vraiment pas la peine de les décrire, et que je me borne à les signaler.
Des pierres de taille, calcaire jaune du Jura, qui revêtent les jetées du ■
port de Morges sont' exposées depuis 1690 à cette action des eaux;
elles sont émoussées,' usées, elles n’ont plus la fraîcheur dè la taille
primitive, les veines plus tendres de la pierre sont plus fortement éro-
dées que les veines plus dures qui sont restées en saillie ; mais en deux
cents ans l’érosion n ’est pas assez profonde ou caractéristique pour
mériter une description plus allongée. ■
B. Erosion chimique, dans la vase du sol du lac.
Les pierres calcaires enfoncées dans la vase sont soumises à une
érosion spéciale que j’attribue aux bulles d’acide carbonique dégagées