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» D ’un autre côté, les campagnes, débarrassées de ce
fléau , commencent à refleurir ; les villages se repeuplent,
les villes s’embellissent, et les peuples jouissent en paix du
fruit de leurs travaux et de leur industrie.
» La dynastie régnante paraît solidement établie sur le
trône, et n’avoirrien à redouter que de l’invasion des Russes.
Le roi gouverne avec fermeté j il compte sur le dévoûment
de ses peuples | et particulièrement de ceux du Mazanderan ;
et c’est pour rester près d’eux qu’il préfère au séjour de
toute autre ville celui de Téhéran , où leur appui et des
fortifications le rassurent contre toute entreprise ennemie.
» Les visirs ne sont point, en Perse , investis de toute
l ’autorité du prince, et en quelque sorte en possession du
gouvernement, comme c’est l’usage dans l’Orient. Le Sophi
actuel dirige tout par lui-même ; ses visirs sont chargés de
l’exécution et des détails des affaires, et passeraient en tous
pays pour des ministres habiles.
» On voit souvent, à Téhéran , des ambassadeurs du Can-
dahar, de Cachemire, des Ouzbeqs et d’autres États de l’Asie,
sur lesquels le Sophi parait exercer une grande influence.
» Les Persans font aujourd’hui un commerce important
avec ces divers États , et surtout avec l’Inde. Il part continuellement
des caravanes pour Caboul, Delhi et Gehanabad
( Seringapatnam). Plus de vingt mille Indiens sont habituellement
répandus dans les bazars de la capitale : ils témoignent
tous un extrême mécontentement des Anglais ; ils se
plaignent avec amertume des exactions de la compagnie des
Indes de ses douanes , des impôts exorbitans qu’elle perçoit
sur toutes les espèces d’objets , et sous tous les prétextes.
» Comme le sol de la Perse n’est pas assez riche pour
fournir aux besoins réels et factices de ses habitans , ils sont
AVIS DU LIBRAIRE. vij
obligés d’avoir recours à leur industrie, et de s’adonner
beaucoup au commerce. Indépendamment des relations dont
il vient d’être parlé , ils ont des communications directes èt
fréquentes avec Samarcand, Bokhara et le Thibet. S’ils n’en
conservent pas avec la Chine, c’est que la secte d’Ali a cessé
d’y être tolérée. Au reste, les communications avec la Géorgie
n ont pas été interrompues par la guerre contre les Russes j
les caravanes vont et viennent de Tiflis , et la mer Caspienne
est couverte, comme en teins de paix , des vaisseaux des
deux nations.
» Les revenus du Sophi , fondés en grande partie sur le
commerce avec les nations voisines , s’élèvent, les troupes
payées , à près d’un million de tomans ( a5,000,000 fr. ),
L ’abondance du numéraire est très-grande , et son titre si
élevé, que le gouvernement a été obligé de prendre des
mesures pour en empêcher l ’exportation.
» La quantité de troupes que le roi peut mettre sur pied
serait difficile à évaluer avec exactitude ; mais il est certain
qu’elle est très-considérable. Chaque soldat reçoit i5 ou 20
tomans à l’époque de la revue annuelle.
» Les soldats cavaliers et fantassins sont tenus de se
fournir d’armes, de chevaux et de montures pour porter
leurs bagages : ils sont armés d’une manière assez légère,
et fort appropriée au service militaire ; ils ne marchent jamais
que de nuit, à la clarté d’une multitude de flambeaux et au
son d’une musique bruyante.
» Le Persan est particulièrement doué d’un esprit de
curiosité qui le porte à rechercher les choses utiles et à
apprécier les idées nouvelles ; il est essentiellement tolérant
et poli envers les étrangers, et accueille les Européens surtout
avec un empressement fondé sur l’opinion qu’on a ,