de Balouadin , et à cinquante milles est-sud-est deKutayéli. M. Nié-
lmhr la place avec raison au 38e. degré 46 min. de latitude.
Elle a environ trois milles de circuit : on y compte dix mille
maisons, et à peu près soixante mille habitans. Elle est en amphithéâtre
au bas et à l’orient d’une montagne volcanique qui nous a
paru l'aire suite à celle d’Akshéer : les eaux y sont abondantes et
fort bonnes.
Cara-Hissar pouvait passer pour une place forte lorsqu’on ne
connaissait ni la bombe ni le canon ; elle était entourée de bons
remparts ,set défendue par un château isolé / auquel il est bien difficile
d’atteindre : il est au n o rd , sur un rocher .volcanique qui
s’élève en pyramide à une hauteur prodigieuse. C’est la couleur de
ce rocherj la position du château et la culture en grand du pavot,
q u i. ont1 fait, donner par les Turcs , à cette .ville,'le nom <X A fiant-
ta ra IIissa r ou Château noir de l ’opium..
c Cette yilleidépendait autrefois du pachaide Kutayéh, et n’avait
qu’Un’ sanjak-bey ; elle a aujourd’hui un pacha à deux queues,.et
elle est-le-chef-lieu d’une province peu étendue,.mais bien importante
par ses productions et son commerce j elle sert d’entrepôt
à toutes lés denrées d e :la contrée, et elle est très-fréquentée par
les parasanes qui se,rendent de la Syrie ou de ¡l'intérieur de l’Asie
^.¡Smÿraie et ù'Constantinople;: l ’ind<ustrie d’ailleurs y a pris, depuis
quelques années , beaucoup d’activité. On y fabrique des tapis,
quelquos.étoffes, et surtout des armes à feu, des sabres courts, nommés.¡
yatagavsi des brides , des,étriers, des selles et autres objets,
On tire, de.Smyrne ,1e fer et l’acier qu’on ,y emploie. Le territoire
fournit , beaucoup de laine, un peu de cire et une très-grande quantité
d’opium, ;
¡ ’¡On sait que l ’opium est le suc qui découle par incision des têtes
du pavot blanc ou pavot somnifère, qui est originaire des contrées
un peu chaudes de l ’Orient. La culture de cette plante, introduite
¡depuis lang-tems en Europe ¡à cause des semences, qui dpnnent
une ,huile, douceet fbrt.bonne à manger, se fait en grand à Carar
•Hissar, dans la seule vue d’en obtenir l’opium. Les chaleurs de
l’été, bien pins fortes, bien plus prolongées et bien plus égales dans
ce
ce pays que dans les contrées de l’Europe où l’on cultive la même
plante, permettent au suc propre de s’élaborer davantage, et de
se convertir en une substance qu’on n’a pu jusqu’à présent obtenir
dans nos climats tempérés. Les essais qu’on a faits au midi de la
France n on t pas réussi, ou n’ont donné qu’un opium bien inférieur
à celui de l’Orient. Voici comme on procède à Cara-Hissar.
On sème en octobre, dans les jardins qui sont autour de là ville,
les semences de pavot sur la même terre qui vient de produire des
aubergines, des ketmies, des melons, des courges , des concombres,
des pastèques, du mais et la plupart de nos plantes potagères. Après
avoir arraché ces plantes, on se contente de donner un labour à
■la bêche, et, d’unir bien la terre : on sème après cela, et on passe
légèrement le ratissoir afin de ne pas trop enfôncer la semence.
Cette opération a ordinairement lieu après les premières pluies d’automne,
qui tombent assez régulièrement à la fin de septembre ou
au commencement d’octobre. Si les pluies tardent un peu ou ne
sont pas suffisantes, on arrose le terrain avant de le bêcher.
La plante lève et prend de l’accroissement avant les froids, qui
ne sont un peu vifs qu’à la fin de décembre, en janvier et en février,
Tous les plants sont enlevés avec précaution dans le mois de mars,
et transportés sur un autre champ plus étendu, qu’on a préparé
par trois labours à la charrue : le premier, après la récolte de l’orge
ou du froment} le second, durant l ’hiver, mais plus ordinairement
quinze jours après les premières pluies d’automne, et le troisième
à la fin de l’hiver. A la suite de celui-ci on brise les mottes, et on
forme des rigoles afin de pouvoir introduire l’eau au moins une
■fois par semaine. Les plants sont mis dans la rigole à vingt pouces
de distance l’un de l ’autre, dans un sens, et à deux pieds dans l’autre
: on repique avec soin ceux qui périssent} on sarcle une fois,
et plus ordinairement deux fois, afin de détruire les herbes qui ont
¡pu. venir naturellement. En juillet on commence à faire deux ou
trois petites incisions transversales, peu profondes, aux têtes de
pavot les plus avancées, et on continué jusqu’à la fin de l ’été ou
jusqu’à ce que. toutes les têtes soient parvenues à maturité : il en
sort un suc laiteux, qui brunit et prend bientôt de là consistance :
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