vapeur un peu sensible dans l’atmosphère, aucun brouillard sur
les monts les plus élevés, aucun nuage dans les airs. Le ciel est si
p u r , que les étoiles donnent, la nuit, assez de clarté pour lire une
écriture un peu grosse, et reconnaître à dix pas un homme qu’on
Voit habituellement.
On ne sera pas surpris de cette sécheresse de l ’air si on considère -
que la Perse, sous une latitude très-chaude, est en général privée
d’eau. On n ’y v o it, comme on sait, ni fleuves ni rivières un peu
considérables j les ruisseaux y sont peu nombreux : il n’y pleut
jamais depuis la lin de mai jusqu’à la fin de novembre ; les montagnes
sont totalement dégarnies d’arbres ; les collines sont sèches,
arides, ordinairement abandonnées, et les plaines ne sont cultivées
que là où l’on peut arroser. Il n’y a pas aujourd’h u i, par le manque
d’eau, un vingtième de cet Empire qui soit mis en culture : le reste
est nu ou ne produit, l ’é té, que des végétaux peu abondans en sucs,
peu transpirables, tels que des arbustes épineux, des plantes coto-
neuses. Avant la fin de juin toutes les plantes annuelles ont disp
a ru , et ne doivent germer et reparaître qu’après les premières
pluies d’automne. On sent que la terre, exposée toute la journée à
un soleil ardent, doit s’échauffer considérablement et se dessécher
bien vite. Dans cet é ta t, quelle portion d’eau peut-elle fournir à
l ’atmosphère ?
C’est peut-être à cette longue sécheresse de l ’a ir, qu’il faut attribuer
un fait d ’histoire naturelle qui nous a paru très-surprenant.
Nous n’avons v u , dans tout l ’espace que nous avons parcouru,
aucune sorte de coquillage terrestre, malgré toutes les recherches
que nous avons faites à ce sujet.
Les vents humides et frais qui soufflent régulièrement de la Caspienne
et de la mer des. Indes , n’arrivent pas jusqu’au plateau de
la Perse, ou y arrivent enflammés. Les premiers , beaucoup plus
frais, beaucoup plus humides que les seconds, sur la côte du Guilan
et du Mazanderan, et sur toute la partie des montagnes qui fait
face à la m e r , semblent avoir déposé toute leur humidité sur ces
provinces : à peine leur douce influence se fait-elle sentir dans les
contrées de la Médie, les plus voisines d e là Caspienne,
Les seconds soufflent du matin au soir dans tout le Kerinesir ; ils
soutiennent la végétation} ils modèrent un peu l’ardeur du soleil}
mais ils ne peuvent empêcher que cet astre n’agisse puissamment
sur un sol bas, sabloneux, dénué d’arbres, peu arrosé, peu cultivé,
et situé du 25°. au 29e. degré ue latitude, Ces vents d’ailleurs
ne pénètrent pas bien avant dans les terres ; ils cessent ordinairement
de souffler aux premières montagnes du Far sis tan et du
Kerman.
Il est sans doute bien extraordinaire que, dans une étendue de
plus de trois cents lieues de l’est à l ’ouest, et de cent cinquante du
nord au su d , la Perse n’ait aucun fleuve, aucune rivière un peu
considérable. Ce pays est parsemé de hautes montagnes : il y pleut
assez souvent depuis décembre jusqu’en avril ; il tombe quelquefois
de la neige dans les plaines : la plupart des montagnes en conservent
foute l’année à leur sommet, et depuis l’Elvind jusqu’au-delà du
Kandahar, depuis l ’Albours jusqu’au golfe Persique , à peine voit-
on quelques ruisseaux, quelques faibles rivières qui se perdent dans
lès sables, ou sont employés à l’arrosement des terres.
Il faut bien croire que la masse d’eau qui tombe, durant l ’hiver,
sur ce pays, n’est pas aussi considérable qu’on le supposerait d’abord
} mais ce qui est probablement une des causes principales du
peu de rivières qu’on y vo it, c’est qu’il n’y a pas sur les montagnes
ces nuages permanens, cette humidité habituelle qu’on observe à
toutes celles qui donnent naissance à de grands fleuves.
Il paraît que le défaut de pente, qui se fait remarquer sur tout le
plateau de la Perse, s’oppose aussi à ce que les eaux qui sont tombées
en neige sur les hauteurs, ou se sont amassées dans les plaines
par l’effet des pluies, puissent se réunir en assez grande quantité
pour se rendre à la mer , ni qu’elles aient un cours un peu long.
L ’évaporation et les arrosemens les font presque toutes disparaître.
Celles qui sont un peu plus abondantes forment des lacs salés qui
diminuent considérablement, ou qui disparaissent totalement avant
la fin de l’été.
Privée d’e a u , la Perse doit être privée de tous ces grands végétaux
qui contribuent si puissamment à fixer les vapeurs de