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Règne d’Adel-Chah. Ibrahim son frère lui f a i t la guerre
e t s’ empare du trône : i l est tué. Règne de Charokh.
Mirza-Seyd-Moh a ni med le prive de la -vue. Interrègne.
L a Perse est de nouveau agitée.
A i.i-Koulî-K han n’eut pas plutôt appris la mort du ro i, qu’il
détacha de son armée un corps nombreux de cavalerie , avec ordre
d’aller s’emparer du château de Kélat, et de lui amener les princes
que Nadir "y avait envoyés peu de tems avant sa mort. Il laissa dans
le Ségestan Zohrah-Khan son affranchi, et il partit pour se rendre
auprès des chefs qui l’attendaient.
Le détachement envoyé à Kélat entra par surprise dans ce château
, que sa position et sa force rendaient en quelque sorte imprenable.
Nasralla-Mirza et Iman-Kouli-Mirza, fils de N adir, ainsi que
Charokh leur neveu, montèrent précipitamment à cheval et s’enfuirent
du côté de Mérou; mais Cazem-Beg, frère d’Â li, qui se trouvait
avec e u x , envoya à leur poursuite un corps de cavalerie qui
les atteignit à neuf lieues de l à , et ramena les deux derniers. NaS-
r.alla ne fut pris qu’aux environs de Mérou par quelques soldats de
la garnison ; il fut reconduit à Kélat sous bonne escorte.
Arrivé au camp, Ali récompensa les meurtriers de son oncle,
qui avaient, disâit-il, délivré la Perse du plus exécrable des tyrans }
il répandit quelqu’argent dans l ’armée, la passa en revue, et prit
avec elle la route de Mesched.
On ne connaissait point encore dans le public les projets d’A li :
ceux-là même qui avaient applaudi à l ’assassinat de Nadir , espéraient
que la couronne passerait sur la tête de Nasralla-Mirza,
auquel elle appartenait de droit depuis que son frère aîné, Riza-
Kouli-Mirza, avait perdu la vue.
Nasralla était estimé dans l’armée, et regardé par toute la nation
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comme un prince doué de très-grandes qualités ; il avait toujours
montré du courage, soit qu’il combattît sous les yeux de son père,
soit qu il eût à réprimer quelque tribu rebelle. Sa campagne contre
les Turcs 1 avait fait regarder’coinme un des plus habiles généraux :
sa douceur, sa bonté, son désintéressement, lui avaient mérité l’affection
de tous ses compagnons d’armes : sa conduite privée donnait
une très-bonne idée de sa moralité : tous les Persans ne pouvaient
donc que se féliciter de le voir succéder à son père.
Mais ce n était pas pour lui qu’Ali s’était rendu coupable d’un
crime ; ce n était pas pour lui qu’il avait trempé ses mains dans le
sang de son roi. En se déterminant à être le chef d’une conjuration,
Ali avait porté ses vues jusqu’au trône. Il fallait, il est vrai,
exterminer toute la'famille royale 5 il fallait du même coup trancher
la tete à tous ceux qui avaient plus de droits que lui. Il ne l ’ignorait
pas : aussi avait-il pris toutes les mesures qui pouvaient assurer
le succès de sa criminelle entreprise
Riza-Kouli-Mirza, qui etàit toujours resté à Téhéran depuis qu’il
était aveugle, fut massacré par son ordre, ainsi que seize autres
princes du sang royal. Nasralla-Mirza et Iman-K.ouli-Mirza furent
conduits à Mesched, et égorgés sous les yeux mêmes de cet ambitieux.
On poussa la barbarie jusqu’à ouvrir le yentre à toutes-les
femmes de Nadir et des princes, qu’on soupçonna d’être enceintes.
Charokh-Mirza, fils de Riza-Kouli-Mirza, âgé alors de quatorze
ans, fut le seul qu’A li fit épargner ; il se contenta de l’enfermer dans
le chateau de Mesched , faisant publier sa mort çomme celle des
autres'princes. Le dessein d’A li était de le faire périr p’il voyait qu’il
pût succéder lui-même à Nadir ; mais dans le cas que les Persans
s’obstinassent à vouloir pour roi un descendant de Chah-Hussein,
il se proposait de leur présenter Charokh, se flattant de le leur faire
agréer, et de regner lui-même au nom de cet enfant.
^ En même tems qu’A li ordonnait le massacre des princes, il faisait
ouvrir le trésor de Kélat 5 il en tira d’abord pour une valeur de
7,5o q , o o o tout ans , ou à peu près 45o ,o o o , o q o de francs. Muni de
cette somme, il se fit proclamer roi à Mesched, sous le n oui d'A d eL
Chah ou de roi ju s te ; et pour justifier ee titre et faire oublier son
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