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et décisive, et leur avoir ordonné de tenir les troupes prêtés, il parcourut
tous les rangs, en donnant à chaque coçps et àchaque tribu
les eloges qu’ils méritaient, en leur exprimant toute la satisfaction
qu’il éprouvait de leur bonne conduite ; il leur recommanda, pour
le lendemain, de faire aussi bien qu’ils avaient fait jusqu’alors ; il
leur dit que l’ennemi, plusieurs fois repoussé et battu, était décou-
r a g é , et par conséquent facile à vaincre ; il leur étala les richesses
qui se trouvaient dans le camp des Kagiars, et leur permit de s’en
emparer s’ils parvenaient à remporter une victoire complète. Tous
;les chefs et tous les soldats promirent de faire leur devoir, et de ne
• pas poser les armes qu’ils n’eussent mis en fuite l ’ennemi.
- ’ Le lendemain, à la pointe du jou r , ils l’attaquèrent avec tant de
courage, ils fondirent sur lu i, à plusieurs reprises, avec tant d’impétuosité
; ils continuèrent à combattre avec tant d’acharnement;
qu’ils furent, vers le milieu de la journée , maîtres du champ de
bataille.
L u tf-Ali donna ordre de poursuivre l’ennemi ; mais ses troupes,
an lieu de lui obéir , se livrèrent au pillage avec encore plus d’ar-
,-deur qu elles n’avaient combattu. Il sentit la faute qu’il avait faite,
et il voulut en vain la réparer : ni lui ni les chefs de l’armée ne
purent venir à bout d’arrêter ce désordre. Méhémet en profité ; il
rallia a là hâte une partie de ses troupes, et tomba sur ces hommes
quj se trouvaient alors hors d’état de se défendre. Il lui fut aisé de
•les tuer :;déjâ ils succombaient soùs le poids des effets qu’ils voulaient
emporter ; déjà la plupart d’entr’eux: avaient quitté leurs
armes pour piller plus à leur aise : en un moment, cette armée, qui
avait remporté auparavant une victoire complète, fut dissipée.ou
détruite à son tou r, sans qu’il fût possible à LutfiAli de l’empê-
ejmr. Lui-même se vit forcié à prendre la fuite avec quelques centaines
île cavaliers qu’il eut bien de la peine k réunir et à sauver,
■ B pBt. la route de Yesd, et il s’avança jusqu’à Tabas, ville considérable
et très-forte, entre le Couhestan et le Ségestan, dont il
s’empara, et ou il s’établit en attendant qu’il pût trouver le moyen
de réparer ses pertes. 1
Méhémet prit possession de Chiras, et s’y conduisit de manière
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à faire regretter aux habitans d’avoir abandonné leur chef : il se fit
amener tous ceux qui restaient de la famille de son ennemi, et les
envoya en prison; il fit impitoyablement massacrer tous les grands
de sa tribu, et tous ceux qui lui étaient attachés par des bienfaits ;
il livra leurs femmes aux soldats, fit esclaves leurs filles, aveugla
leurs fils, s’empara de tous leurs biens, et mit ensuite une forte
contribution sur la ville. Hadgi-Ibrahim, pour prix de sa trahison,
fut confirmé dans son gouvernement. Méhémet lui donna cinq ou
six mille Kagiars, pour défendre la ville contre toute entreprise du
dedans et du dehors; et afin d’avoir une garantie dë la fidélité de
cet agent, il prit-avec lui ses fils , et les emmena à Téhéran.
L u tf-A li, de son côté, se fit des amis àTabas : tous les habitans
s’intéressèrent à son sort ; tous lui offrirent leurs services. Il leva
parmi eux cinq où six mille hommes de bonnes troupes, et il vint,
en mars 1798, à Kerman, qui lui ouvrit ses portés et le reçut avec
transport. Un grand nombre de personnes, tant de la ville que de
la province, passèrent sous ses drapeaux, et il fit un appel à tous
les gens de guerre du midi; il comptait Se procurer, par ce moyen,
une armée assez forte pour lui permettre de marcher sur Chiras,
et de s’en emparer avant les plus fortes chaleurs de l'été.
Méhémet ne lui donna pas le tems d’exécuter ses projets; il partit
de Téhéran eh avril; et se trouva en mai sous les murs de Kerman
avec trente mille hommes. L utf-Ali , surpris de son arrivée , ne
jugea pas à propos de soutenir un siège; il n’avait pour cela ni les
-vivres ni les munitions qui lui étaient nécessaires. D’ailleurs, en
's’enfermant,‘ il perdait l’espoir d’augmenter ses forcés, et de battre
son ennemi. Il sentait bien qu’il me pourrait tenir lorig-tems ni
dans la ville ni dans' la citadelle , et qu’il faudrait finir par un
combat s’il voulait se dégager ; ainsi ;doiic, quoiqu’il n’eût pas dix
mille hommes, il résolut de sortir sur-le-champ ,ret de hasarder
une bataille. ‘ •. 1
® Il parvint facilement à s’ouvrir un passage à travers l’armée de
Méhémet; il se battit même plusieurs jours avec un courage qui
souvent alarma son ennemi ; mais à la fin il fallut se résoudre à
céder une victoire qu’il ne pouvait disputer; plus long-ttems sans
Tome II I, _ ' E e e