Ab ouchir, qui est le port de Chiras. Il ne songea pas, pour le
moment, à inquiéter ceux du Kermesir, à qui il avait de très-
grandes obligations ; mais il crut ne devoir pas souffrir que Mir-
Mahenna, scheik de Bender-Rik, qui Pavait abandonné sous les
murs d’Ispahan, et Suleyman, scheik de la tribu Kiab, qui lui avait
refusé des secours dans le tems où il en avait le plus besoin, méconnussent
plus long-tems son autorité, et continuassent à se soustraire
au tribut qu’ils devaient.
Il se décida à attaquer en même tems ces deux scheiks, et à ne
leur accorder aucun repos qu’il ne les eût détruits , ou qu’il ne
lés eût mis à ses pieds. Néanmoins, avant de rien entreprendre
contre eu x , il les fit sommer de nouveau de se soumettre, èt de lui
envoyer toutesdes sommes arriérées qu’ils devaient au trésor royal
sur leur refus, il donna, en iy6B, le commandement d’une partie-
de son armée à Mir-Kunéh-Khan, arabe, avec ordre d’agir de
concert avec le scheik d’A b ouchir, et de se porter sur Bender-
Rik ; il marcha avec le reste de ses troupes, contre Scheik-Suleyman.
Kunéh-Khan et le vékil agirent avec tant de lenteur, que leurs
ennemis eurent le tems dé mettre tous leurs navires en état, et qu’ils
furent prêts à s’y embarquer au premier signal.
Kérim vînt établir son camp à peu de distance dé Goban, petite
ville située sur le bras le plus oriental du fleuve des Arabes, près .de
son embouchure : c’était le port de^Scheik-Suleyman, et le lieu
de sa résidence.
Suleyman était alors fort puissant : il avait profité des trouble»,
survenus en Perse pour faire la guerre à tous les scheiks de sa tribu -
qui Occupaient , comme lui, de vastes domaines dans cette contrée,
et était venu à bout de les chasser ou de les soumettre ; de sorte
qu’il possédait presque toute la province de Shusistan ou de l’an—
cienne Siisiane. Il avait un grand nombre de petits navires avec lesquels
il faisait un assez grand commerce , et dont il s’était servi
pour enlever aux Turcs toutes les îles qui sont à l’embouchure-
du Schat-el-Arab, et même le- district de Davasir, situé à la rive
occidentale.
Lorsque Kérim parut aux environs de Goban, Scheik-Suleyman-
passa avec ses troupes et tout ce qu’il avait de precieux, sur les îles,
où il continua son commerce, et où il vécut aussi tranquille que
s’il eût été en paix avec toufc ses voisins. „
Kérim ne pouvant le poursuivre faute de navires, invita le mut-
selim de Bassora, qui en avait, de se joindre à- lui pour détruire leur
ennemi commun. Mais-le mutselim , soit qu’il ne voulût pas compromettre
ses forcés navales-, soit qu’il fût gagné-par les présens de
Suleyman, ne se pressa pas de lever des troupes-, et de réparer les
navires nécessaires pour combattre le scheik ; de sorte qu’ennuyé
d’attendre inutilement les secours qu’il demandait, Kérim se retira
après avoir touché de son ennemi une forte somme d’argent, sous
condition expresse qu’il ne ravagerait pas le pays, e t qu’il ne détruirait
pas les dattiers, qui forment la principale, ressource des Arabes
kiabis.
Lorsque le pays fut entièrement évacué, Scheik-Suleyman revint
à G oban, et continua, comme par le passé, à inquiéter les T urcs,
et à braver les Persans.
Kunéh-Khan, de son côté, ne trouva non plus aucun obstacle;
il vint à Bender-Rik sans rencontrer un ennemi. Mir-Mahenna
s’était également embarqué avec toute sa tribu et toutes ses troupes
, ét était allé s’établir à uiie île inhabitée, nommée Khouéri ,
voisine de Bender-Rik.
Le scheik d’Abouchir avait bien quelques petits navires, et l’agent
anglais, établi dans cette ville, avait bien aussi fourni un petit bâtiment
de guerre de sa nation; mais ces forces navales réunies ne
purent venir à, bout de battre celles du scheik de Bender-Rik,
attendu que les Anglais se virent abandonnés toutes les fois qu’il
fallut en venir à un combat. Kunéh-Khan, voyant qu’il ne pouvait
atteindre le rebelle, se retira aussi dans le même tems que K é r im ,
sans avoir fait d’autre mal à l’ennemi, que de l ’avoir mis en fuite,,
et avoir Occupé sa. ville et sa forteresse pendant son absence.
Quelque tems après le départ de ce général, Mir-Mahenna retourna
à Bender-Rik , et travailla à réparer les dommages.que sa
ville avait soufferts. Ce qui est asse^ singulier, c’est que, pendant