peuple, persuadé que les promesses du régent étalent sincères , se
flattait de jouir enfin , sous un gouvernement stable , du repos et
du bonheur après lesquels il soupirait depuis long-tems. Ali-Mer-
d an , quoique dur et sévère , passait pour juste, et Kérim , qu’on
regardait comme son lieutenant , comme le principal exécuteur de
ses ordres', se faisait également chérir et des grands et du peuple ,
parsa douceur, son affabilité, sa générosité, son désintéressement :
gouverneur de Juif a , il avait pris plus particulièrement sous sa protection
l e í Arméniens qui l’habitaient, non à cause de leur religion,
mais parce que plus opprimés ils lui avaient inspiré plus de pitié.
Il plaida fortement en leur fa veu r , comme il le faisait également à
l’égard des Persans , toutes les fois que le régent voulut exiger de
leur faubourg des contributions' extraordinaires. Il s’intéressa de
même pour les cultivateurs des environs, de la capitale , et chercha ,
autant qu’il le put , à alléger le fardeau qui pesait sur eux d’une
manière effrayante.
Ali-Merdan ne ‘prit d’abord aucunv ombrage de la conduite de
Kérim : il le laissa gouverner à son gré le faubourg de Julfa ; il le
laissa plaider, comme il voulu t, la cause des. opprimés ; il n’en
suivit pas. moins ses plans. Tout occupé de faire la guerre a tous
les prétendans, de soumettre toutes les pro vinces à “ses lois et de
conserver l'Empire dans son intégrité, il ne lui vint jamais dans
Pidée que les sources de la prospérité publique sont toutes dans
les mains de celui qui gouverne que le meilleur moyen pour lui
de se procurer de l’a rg ent, c’est d’augmenter tons les produits du
sol et de l’industrie, de leur donner un débouché certain. Dans son
ignorance, il crut n’avoir rien de mieux à faire , pour venir a bout
de ses desseins , que de frapper les propriétés, l’industrie et le commerce
par des taxes exorbitantes : il voulait promptement une
année ; il fallait avant tout se procurer l ’argent nécessaire à son
entretien.
A • peine se vit-il à la tête de quarante ou cinquante mïlhüiomines ,
qu’il résolut d’en laisser ime partie dans,fa capitale, et,d aller avec,
l’autre à Tauris afin d’en chasser les Afghans.
Azad venait de faire sa paix avec le: roi de Géorgie. Lasses de se
battre sans pouvoir se détruire, ils ayaient fixé leurs limites à
l ’Araxe à la fin de l’année 175 1, et s’étalent engagés à ne jamais
passer le fleuve pour piller ou ravager les possessions l ’rui de
l ’autre.
Maître, par ce traité, d’Urinia, de Tan ris, d’Ardebil et de tout
l ’Aderbidjan, Azad vint aussitôt s’eujparer de Sultanie et de Cas-,
bin : il se préparait à entrer dans le Guilan afin d’arracher cette
riche province au gouverneur du Mazanderan , avec lequel il voulait
se mesurer avant de porter ses pas vers la capitale.
Mohammed-Hassan venait de s’en emparer (1) , et en ayait confié
le gouvernement à Hidéat, fils de Hadschi-Schamal, l’un des plus
riches habitans du Guilan. Cet Hadschi-Schamal, après la mort
d ’Ibrahim, avait entrepris de se former un parti à Reicht,- et de se
rendre maître de toute la province ; mais il avait été assassiné quelques
mois avant l’arrivée de Mohammed-Hassan, par un ambitieux
qui avait voulu l’imiter , et que Mohammed-Hassan fit mourir à
son tour.
Après la prise de Mesched en juin 1 7 5 1 , Achmed resta encore
quelque tems dans le Khorassan, tant pour s’assurer là possession
de cette vaste province, que pour observer ce qui se passait à, Ispa-
han et dans tout le reste de l’Empire. Son intention, en quittant
le Kandahar, ne pouvait être douteuse : la conquête de la Perse,
après la mort d’Adel e t d’Ibrahim, l’avait tenté, e t lui avait paru
d’une facile exécution. Mais l’état de trouble et d’agitation dans
lequel il voyait tout le royaume , l ’espfit de révolte qui s’était
introduit partout, le firent hésiter quelque tems sur le parti qu’il
prendrait. Son armée était fort affaiblie par les diflërens combats
qu’elle avait soutenus : il voyait toute la répugnance que les Persans
devaient naturellement avoir pour un joug étranger. Une
région .plus riche, plus populeuse s’offrait à ses regards : il se décida
à y porter ses forces , et à ne garder de ses conquêtes sur la Perse,
que Hérat et le Ségestan ; mais avant de partir il exigea de tons les
seigneurs et chefs de tribus du Khorassan, que Charokh, quoique
(1) Il y était entré au commencement de l’année 1752,
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