d’être un repaire de voleurs toujours prêts à dépouiller les voyageurs
qui descendent à terre sans armes, ou qui ne sont pas assez
nombreux pour leur résister. Nous avions apperçu un bateau
mouillé derrière des rochers à peu de distance du cap ; nous fûmes
le reconnaître : il était monté de cinq hommes occupés à charger
des pierres qu’ils transportaient au Pyrée. N ’ayant'rien à craindre
de leur p a r t , nous nous fîmes mettre à te rre, et nous grimpâmes,
à travers des rochers, jusqu’au temple : il est sur la partie la plus
élevée du promontoire, et paraît avoir été construit sur le modèle
du temple de Thésée, que l ’on voit encore debout à Athènes.
Nous rentrâmes dans le navire à deux heures et demie, et le so if,
au soleil couchant, nous jetâmes l ’ancre dans le port Pyrée. L ’entrée
est indiquée par dëux balises qu’on a élevées pour guider les
pilotes ; elle est formée par deux anciennes jetées dont on voit encore
les restes sous l’eau : l’une venait à angles droits de la presqu’île
Munichye, et l’autre du cap Éétiuni ; elles étaient une suite
de la grande muraille que les Athéniens avaient élevée pour fermer
les trois ports.et la presqu’île. !
Le Pyrée est en partie comblé aujourd’hui par le sable et la vase
que les pluies y charrient sans cesse; néanmoins il nous a offert
une nouvelle preuve que les eaux de la Méditerranée n’ont pas
baissé ni changé de niveau depuis plus de deux mille ans. Lorsque
les vents d’est ou de sud soufflent au large, elles s’élèvent encore
jusqu’aux anciens quais, et dans les tems ordinaires elles sont à
une hauteur telle qu’on pourrait le desirer dans le port moderne
le plus.fréquenté. On voit évidemment qu’en le creusant et en le
réparant il serait tel qu’il était autrefois, et qn’i l a pu très-facilement
contenir quatre cents galères, ét même un plus grand nombre.
Les ports dé T y r et de Sidon étaient beaucoup moins étendus
que celui-ci.
Dès que nous fûmes mouillés, nous expédiâmes un de nos matelots
avec une lettre pour M. Gaspari, consul français, dans laquelle
nous lui donnions avis de notre arrivée, et nous le priions de nous
fournir les moyens de nous rendre tous à Athènes. Il eut l’honnêteté
de nous envoyer le lendemain, au soleil levant, les chevaux
dont nous avions besoin, de sorte que nous fûmes auprès de lui
dans la matinée.
On compte près de deux lieues ordinaires du port à la ville : les
Grecs comptaient quarante stades ou près de cinq milles. Le chemin
est beau, ét les champs d’alentour sont assez bien cultivés.
L ’empressement que nous avions de voir dans le plus grand
détail ce qui reste de l’ancienne Athènes, ne peut guère s’exprimer.
Durant dix-sept jours que nous y restâmes, nous ne fûmes occupes
qu’à étudier et observer, Pausanias et l ’abbé Barthéleini à la main,
tout ce qu’on a pu recueillir de cette ville célèbre.
Nous ne répéterons pas ce que tant de voyageurs modernes et
tant de savans en ont dit : nous en présentons le plan tel que nous
l ’avons reçu des mains de M. Fauvel, correspondant de l’Institut,
qu’un séjour de plusieurs années a mis à portée de tout voir et de
tout reconnaître. La ville moderne et tout ce qui reste de l’ancienne
, y sont indiqués de manière à donner une idée assez nette
de ce qu’elle fut autrefois, et de ce qu’elle est à présent.
Suivant les observations de M. de Chabert,, la citadelle qu’on sait
être dans l’intérieur de la ville sur une colline escarpée, est à
37 deg. 58 min. î sec. de latitude; et à 21 deg. 20 min. 5g sec. de
longitude au méridien de Paris. La roche de cette colline est calcaire
, quelquefois dure, mais plus souvent friable et cariée ; elle
ressemble en quelques endroits à un poudingue de diverses couleurs
, peu susceptible d’être taillé et poli. La base est moins dure et
présente en plusieurs endroits une terre jaunâtre ou grisâtre, qui
contient du nitre en abondance : nous y vîmes des ouvriers occupés
à la lessiver pour en tirer ce sel.
Les collines qui sont à l’ouest et au sud-ouest de la citadelle j
sont d’une pierre calcaire beaucoup plus duré.
La ville est entourée d’une faible muraille, qui fut élevée en 1777
pour la garantir des incursions des Albanais et de toute entreprise
de la part des corsaires; elle a huit paroisses et quelques mosquées.
Sa population est réduite à sept ou huit mille habitans, parmi lesquels
on compte environ huit cents Turcs. Les villages, répandus
en petit nombre dans l’Attique ou dans cette portion de la Grèce