que lui donnaient le choix du terrain, le nombre de ses troupes et
leur bonne volonté ; il attendit de pied ferme son ennemi, le laissa
avancer jusqu’à la portée du tr a it, et tomba sur lui avec la plus
grande impétuosité. Le combat ne fut ni bien long ni bien sanglant.
A peine lut-il engagé, que les Arabes quittèrent tous à la fois le
champ rie bataille, et qu’ils së retirèrent en bon ordre. Le reste de
l ’armée ne ht'plus dès-lors aucune résistance; chacun songea à se
tirer d’embarras par une retraite précipitée. Kérim se voyant abandonné
de toutes parts, dut songer à son salut; il prit le chemin de
Chiras, en invitant ses Curdes et ses Persans à venir le joindre dans
cette ville. -
Mohammed-Hassan poursuivit quelque tems les fuyards, après
quoi il entra dans Ispahan, et en prit possession au nom du jeune
chah ; et comme s’il n’eût été animé que du désir de conquérir l’Empire
pour le lui remettre, comme s’il n’eût eu que la noble ambition
de terminer glorieusement cette entreprise, il promit solennellement
de déposer les armes dès qu’il aurait soumis tous les
rebelles. A l’imitation de Nad ir, d’Ali-Merdan et de Kérim, il se
dit l ’esclave de son roi; il ne parut jamais devant lui qu’en se prosternant
à ses pieds ; il ne donna plus aucun ordre qu’au nom
d’Ismaël-Chah.
Pour plaire encore mieux aux habitans, il n’exigea d’eux, pour
le moment, rien que des vivres ; il fit observer à ses troupes la
plus exacte discipline ; il punit sévèrement tous les délits qu’elles
■commirent; en un mot, il se conduisit comme un homme qui veut
plaire , ou, s’il faut le dire, comme un ambitieux adroit qui cherche
à endormir ceux qu’il veut charger de chaînes.
Lorsqu’il eut fa it , dans les' administrations, tous les changement
qu’il crut nécessaires, et que tout fut organisé selon ses désirs, il
ne songea plus qu’à porter le dernier coup à Kérim.
Il quitta Ispahan dans le courant de juin , après y avoir laissé
dix mille hommes de garnison, et il prit la route de Chiras, dont
il espérait de s’emparer facilement. Kérim s’y était enfermé avec le
resste de ses- troupes , consistant en une’vingtaine de mille hommes.
Il a v a iten outre intéressé les habitans en sa faveur, et les avait
fait armer ; de sorte qu’il se trouva en état de tenir tête à Mohammed
Hassan lorsqu’il parut.
Celui-ci établit son camp à peu de distance de la v ille , et se mit
bientôt én état de l’assiéger. Il avait une artillerie formidable qu’il
éleva sur divers points ; mais comme personne , dans son armée,
n’était en état de la bien diriger, elle ne fit pas un grand mal aux
assiégés : les dommages qu’ellç occasionnait aux remparts, étaient
réparés sur-le-champ. Les sorties que Kérim ordonna pour détruire
ces batteries et se procurer des vivres, furent bien plus meurtrières :
on se tua beaucoup de inonde de part et d’autre , sans obtenir,
pourtant de résultat. Mais vers la fin de l’été, cinq cents Curdes du,
Loristan étant parvenus à faire entrer dans la ville un convoi très-
considérable qu’ils y amenaient, Mohammed-Hassan ne jugea pas
à propos de continuer le siège ; il se retira avec toutes ses troupes ,
et vint passer l’hiver à Ispahan.
Au retour de la belle saison, l’an 1757 , persuadé que Kérim
n’était pas en état de se mettre.en campagne , ni de rien entreprendre
contre lui pendant son absence, il prit avec son armée la
route deT auris, résolu de ne pas quitter l’Aderbidjan qu’il n’eût
so,umis Cette province, et qu’il n’eût ôté à Azad tout espoir de se
relever s’il ne pouvait avoir sa tête.
Le voisinage d’un ennemi aussi actif, aussi entreprenant lui faisait
toujours craindre qu’il ne profitât de son éloignement pour
tomber sur ses possessions ; il craignait surtout pour le Guilan,
qu’il avait affaibli en retirant l’année d’auparavant une partie des
troupes qui s’y trouvaient.
Ces craintes étaient peu fondées ; Azad était réduit aux dernières
extrémités : ses troupes, mal payées, menaçaient de le quitter. Les
habitans, fatigués de leurs brigandages, appelaient à grands cris
un libérateur. Les Lezguis, qu’il était dans l ’impuissance de solder,
lui refusaient toute assistance. Hors d’état de tenter un coup de
main, encore moins de se mesurer en rase campagne avec un en- -
nemi très-supérieur en nombre , Azad voulut s’enfermer dans
Tauris, mais il n’avait ni les vivres ni toutes les munitions qui lui
étaient nécessaires pour soutenir un siège,
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