en faisant mention du commerce de Bagdad et de Bassora ; nous
allons en présenter ici quelques-unes dont nous n’avons pas parlé,
ou dont nous avons quelques nouveaux détails à fournir.
Soie.
La quantité de soie que la Perse obtenait il y a un siècle, était
si considérable, que, malgré tout ce qui était employé dans le pays
pour la fabrication des schals, des ceintures, des galons, des rubans
et des étoffes en tous genres , il en sortait chaque année , suivant
Chardin, vingt-deux mille ballots, pesant chacun deux cent soixante-
seize livres (1). Le Guilan en fournissait dix mille, le Mazanderan
deux mille, l ’Irak-Adjem et le Khorassan chacun trois mille ; la
partie du Kerman qu’on désigne sous le nom de Karabac, deux
mille; le Chyrvan et la Géorgie deux mille.
Avant l’établissement des Anglais dans le Guilan en iy 3ç) , il passait
à Constantinople et à Smyrne, par des caravanes de chameaux,
up grand nombre de ces ballots qui étaient achetés par les Juifs, les
Arméniens et les.Européens. La soie en était de diverses qualités ;
la première, connue sous le nom de cherbaffi ou broume, venait
du Guilan. Chaque ballot pesait douze batmans (2), et se vendait à
peu près cinquante piastres turques le batman.
Cette soie était jaune et rarement blanche : le brin en était très-
fin , très-flexible, plus aisé à tirer que celui des autres soies ; elle
était en masses grosses et longues; les ligatures étaient fort petites
et d’une soie assez bonne.
Celle qui venait de Candja, Chamaki et Tiflis se nommait ardas-
sine. La majeure partie était presqu’aussi Belle, aussi fine que la
précédente ; mais il y avait toujours dans l ’intérieur des ballots une
soie de qualité inférieure ; les masses étaient courtes ët minces ; la
ligature était grosse et assez mauvaise. Le ballot pesait à peu près
autant que l ’autre :. le batman se payait de trente-cinq à quarante
piastres.
(1) Je crois que Chardin a voulu dire deux cent seize livres.
(2) Le batman de soie étant évalué à six ocques , et l’ocque à environ trois livres,
nous trouvons que le ballot ne .pesait que deux cent seize livres.
L 'ardasse, qui venait de la même contrée, était la moins recherchée
: outre qu’elle était d’une qualité bien inférieure, elle était
souvent mêlée avec de i’étoupe de soie, placée de manière à n’être
pas apperçue de ceux qui ne s’y connaissaient pas ou qui ne se doutaient
pas de la fraude. On la vendait, lorsqu’elle était de recette,
de vingt à vingt-cinq piastres le batman.
Ces soies se payaient comptant ou se livraient en troc. Les Européens
donnaient en échange, des draps, de la cochenille, de l ’in-
digo, des bois de teinture, quelques quincailleries. Ce commerce,
qui avait déjà beaucoup diminué lors de l’établissement des Anglais
dans le Guilan, et qui aurait probablement repris vigueur, attendez
que cette concurrence fit élever tout à coup de quinze piastres par
batman le prix des soies de première qualité, n’a plus lieu aujourd’hui,
soit que la quantité de ces soies ait diminué dans les mêmes
proportions que la population, soit que la Russie qui est venue
remplacer en partie les Anglais et les autres Européens, se charge
seule de tontes celles que les habitans des contrées voisines de la
Caspienne veulent vendre.
On cultive le mûrier blanc ordinaire et le mûrier n o ir , l’un pour
ses feuilles, et l ’autre pour ses fruits : on fait avec ces derniers, et
quelquefois aussi avec ceux du mûrier blanc, des sirops et des sorbets
fort agréables. On fait sécher les mûres de ces deux arbres ,
et on les conserve dans cet état pour l'hiver.
Laines.
Après la soie, la laine est l’article le plus important de la Perse.
Il n’y a pas de pays sur la terre où elle soit plus abondante, et où la
consommation en soit plus grande. Le bonnet que portent tous les
Persans, de quelqu’âge et de quelque condition qu’ils soient, est en
drap , et est garni, tant au dedans qu’an dehors, de peau d’agneau,
et de jeune mouton. Les tapis pluchés et les tapis feutrés répandus
avec profusion dans les palais et les maisons des riches, comme dans
la chaumière du pauvre ; les tentes des Turcomans, des Curdes, des
Arabes et de toutes les tribus qui errent avec leurs troupeaux, toutes
faites de laine ; les étoffes et feutres de toutes sortes, fabriqués dans