Comme le bois est très-rare et très-cher, on chauffe ce four avec
des gâteaux faits avec de la paille hachée, et la fiente des animaux
domestiques, tels que boeufs > : chevaux, ânes, chameaux. On, y
brûle aussi plus communément les pailles de r iz , de maïs, de mille
t , de d ou ra, et tous ces petits arbustes que les terres incultes
produisent. On appliquera pâ te, qui n’a pas six lignes d’épaisseur,
contre les parois de ce fo u r , et on le ferme bien i dès qu’elle se
détache on la juge assez cuite, et on la retire.
On a aussi à Ispahan des fours en maçonnerie, dont le sol est
couvert de petits cailloux roulés. On les chauffe comme les jarres;
mais au lieu d’appliquer la pâte contre les parois, on la met sur
les cailloux. Le pain n’y cuit pas aussi bien et aussi également que
dans les jarres; ce qui fait préférer celles-ci.
: Les boulangers ne cuisent pas autrement le pain que les particuliers
, et leur four n’est pas plus grand ; aussi sont-ils sans cesse
occupés à pétrir leur pâte, à chaufîèr leur four et à cuire leur pain ;
ce qui va très-vite, attendu qu’il ne faut pas cinq minutes pour
mettre le fou r , déjà chaud, en état de recevoir une nouvelle pâte,
et qu’un quart d’heure suffit pour la cuire. ;
- A Mossul èt dans quelques villes-de Perse, nous avons mangé du
pain aussi mince que-du pain à cacheter : on l ’avait fait cuire sur
de grandes plaques de cuivre, chauffées de même avec quelques
broussailles.
Après le pa in , le riz est la nourriture la plus commune, la plus
généralement adoptée. Les Persans le mangent, comme les T u r c s ,
en p ilau , c’est-à-dire, peu cuit et un peu sec ; mais ils 1 apprêtent
mieux ; ils le diversifient davantage; ils le servent avec plus d’élé-.
gance.
La manière la plus ordinaire de l’apprêter parmi les riches, c’est
de le faire cuire légèrement à l ’eau , de le laisser égoutter, de le
mettre dans une passoire ou dans un linge propre, d’y verser de
l’eau froide par-dessus pour le laver ou emporter une partie de son
mucilage, et de le remettre dans la marmite où l’on a fait fr ir e ,
r;aT1Q beurre frais, des oignons coupés menus. On l’assaisonne
avec du sel, du poivre , du girofle ; on y met, si l ’on veut, de la
canelje,
canelle, du petit cardamome,' du fenouil ; on y ajouté très-souvent
des amandes pelées , du raisin sàhs pépins, des pois-chiches rôtis
ou bouillis, une très-petite espèce d’haricot verdâtre, nommé mach-
pilové, qu’on a fait fcuirè auparavant à part dans:de l ’eau.
Après avoir laissé un peu étuver le riz ainsi assaisonné, dans la
marmite qu’on a bien fermée au moyen d’un couvercle et d’un
linge mbuillé , et qu’on a placée sur un très-petit feu ou sur des
cendres bien chaudes, on fait fondre du beurre, et on l ’y verse
dessus tout bouillant. On laisse encore quelques minutes la marmite
sur le feu , afin de donner le tems au beurre de bien humecter
tout le r i z . . i
On mange quelquefois le pilau avec le yougourt (1) ou avec les
sucs de divers fruits, tels que cerises, mûresf grenades ;¡on le colore
assez souvent, en tou t ou'en partie; avec le safran'; l’épine-vinette,
la garartce; on y forme divers dessins au moyen de1 ces-couleurs ; on
y place des pois-chiclies et de< petits haricots , qu’on! arrange avec
symmétrie.
Si on fait cuire le riz au bouillon d’agneau, de mouton ou de
poule, on procède de même, si ce n’est qu’on ne le lave pas lorsqu’il
est cuit. On assaisonne ainsi,que. nous l ’avons d it , et on met
un peu moins de beurre.
Les autres alimens, quoique beaucoup moins nombreux, qu’en
Europe, sont cependant assez variés, assez bien préparés : on connaît
divers hachis et divers ragoûts de viande ; on a diverses manières
de rôtir l ’agneau, le chevreau, le mouton et les poules ; on
apprête diversement les plantes potagères et les farineux ; on sait
parfaitement bien conserver , toute l ’année, un grand nombre de
fruits; mais ce à quoi le Persan excelle, c’est dans les confitures,
les bonbons, les gâteaux. Je n’en ai vu nulle part autant; je n ’en ai
goûte nulle part de meilleurs. Ils confisent aü sucre un grand nombre
de productions du pays ; ils en tirent beaucoup de l ’Inde ; ils
font des bonbons et des gâteaux, de toutes les formes et de toutes
les couleurs f avec la farine de riz et celle de froment, avec les
(0 Lait caillé, an peu aigri.
Tome III, X