l ’ouest et au nord étaient encore entre les mains des Turcs et dea
Russes : il fallait se hâter de combattre ces ennemis 3 il fallait aussi,
châtier et faire rentrer dans le devoir les tribus qui s’étaient montrées
rebelles, et qui pouvaient encore exciter des troubles.
Suivant ces dispositions, auxquelles Tahmas ne pouvait se refuser
de souscrire, Nadir part de Chiras en février 1729 (1), prend
la route de Kazeroun-, vient à Chuster, appaise les troubles de ces
contrées, menace les Arabes, met partout des gouverneurs de son
choix, arrache à leurs montagnes quatre cents familles deBakthiaris
qu’il envoie repeupler Ispahan, marche ensuite contre les T u rc s ,
les bat plusieurs fo is , e t , en moins de deux ans, leur reprend
Néhavend, Amadan et Kermanchah, ainsi que toutes les villes de
l ’Aderbidjan'et de la Géorgie.
Il assiégeait Erivan lorsqu’il fut appelé dans le Khorassan pour
soumettre les Abdalis qui s’étaient révoltés, s’étaient emparés de
Hérat et marchaient vers Mesched.
Pendant queNadir était occupé au siège de Hérat, Chah-Tahmas,
qui crut l’occasion favorable pour s’emparer de tout le pouvoir,
leva une nombreuse armée et vint en personne assiéger Érivan en
1731. I l resta près de trois mois devant cette place, et y consomma
ses vivres et presque toutes ses munitions 3 ce qui l’obligea à lever
le siège et à prendre la route de Tauris, où il espérait de se ravitailler.
Mais ayant appris qu’Achmed, pacha de Bagdad , à la tête
de soixante mille Turcs et Arabes, était entré sur le territoire persan,
il se rendit à Sultanie, et de là , tournant vers Amadan, il vint
à Kerdekan.
Les deux armées s’étant rencontrées, les Persans furent complètement
battus ; ils laissèrent morts sur le champ de bataille cinq ou
six mille hommes, tant d’infanterie que de cavalerie 5 un plus grand
nombre fut chargé de chaînes ; le reste prit la fuite et se dispersa.
Le ro i, en rentrant à Ispahan, n’était accompagné que de quelques
seigneurs et d’une faible partie de sa garde (2),
(1) Le 28 février 1729. Histoire de Nadir-Chah , première partie , pag. 93.
(2) Histoire de Nadir-Chah , pag. 140..
Chah-Tahmas n’ayant pu par des succès balancer la réputation
de son général, ni lui Opposer , comme il l’avait espéré, une armée
disciplinée et aguerrie, conclut'-un traité avec le grand-seigneur,
par lequel il cédait Kermanchah et neuf districts qui en dépendent,
ainsi que tous les pays situés à la gauche de l’A raxe, Par ce traité,
le roi de Perse avait cru pouvoir ôter à Nadir le prétexte de faire
la guerre 3 il avait cru pouvoir l ’éloigner de son armée 3 ou du
moins l’engager, à rester dans le Khorassan, et à pousser ses conquêtes
du côté de Bokhara , de Balkhe ou de Kandahar. II voyait,
bien que tant que Nadir serait à la tête d’une armée qui lui était
entièrement dévouée, jamais il ne pourrait se dégager des liens qui
le tenaient assujetti.
Lorsque Nadir apprit ce traité, il en fut très-courroucé : il se répandit
en invectives contre les ministres de Chah-Tahmas 3 il accusa
celui-ci de faiblesse3 il-se plaignit qu’on.eût;cédé une partie du territoire
persan lorsqu’il était si évident qu’il n’avait qu’à se présenter
pour s’en emparer. Il faisait remarquer à ses troupes , qu’on n ’avait
rien stipulé en faveur des prisonniers persans. Enfin, il ne dissimula
pas sonintention de casser ce traité etde marcher contre les Turcs. 1
Et comme s’il avait été lui-même Iè; souverain de la Perse, et
Chah-Tahmas un simple agent qui eût oûtre-passé ses pouvoirs ,
Nadir, de sa pleine autorité, fit sommer les pachas de Bagdad e t
d’Erivan d’évacuer l’Irak, l’Aderbidjan et toutes les villes que lés
Turcs avaient prises sur les Persans, ou de se préparer, à la guerre.
Il fit en même tems répandre dans foutes les provinces un manifeste
par lequel il rappelait les succès que les Persans, sous, sa conduite,
avaient obtenus sur les Abdalis, les. Afghans et les Turcs.
Il se plaignait qu’on voulût l ’arrêter au milieu de ses victoires ,
qu’on eût démembré l’Empire à la suite d’une bataille dont il lui
était si aisé dé réparer la joerte. Il déclarait que le ciel ayant toujours
favorisé ses entreprises, il ne permettrait pas qu’un traité si
humiliant, si contraire au bien de l’Empire, eût son effet; qu’en,
conséquence il allait se mettre en campagne avec ses légions toujours
victorieuses, pour chasser du sol de là Perse les arrogans ennemis
qui s’y trouvaient encore.