portent ordinairement moins longue que les T u r c s , mais personne
aujourd’hui, parmi eu x , ne s’en dispense. Un jeune homme n’attend
pas, comme en Turquie, d’être marié ou d’être parvenu aux
emplois publics pour la laisser croître. - '
En E g yp te , la barbe est une marque apparente de liberté ; les
Mameluks ne peuvent la porter qu’ils ne soient affranchis. En Perse,
les esclaves l’ont Comme leurs maîtres. Ils craindraient d’être pris
pour des eunuques s’ils la coupaient,
Les barbes les plus noires et les plus touffues sont les plus estimées
; aussi ne voit-on, en Perse, que des barbes noires. Ce n’est
pa's qu’il n’y ait des blonds, surtout parmi les Curdes , les Arméniens
et les habitans de l’Aderbidjan ; mais , autant pour plaire aux
femmes, qui n’estiment pas en général les blonds , que pour sè
donner un air de force et de jeunesse, tous se font teindre la barbe ,
et tous voudraient l’avoir bien touffue. Ceux qui en ont fort p eu ,
feraient toutes sortes de sacrifices pour e n , avoir beaucoup , et il
n’y a pas de jeunes gens qui n’emploient, pour la faire pousser,
des onguens, des pomades , et une infinité dé drogues aussi peu
propres les unes que les autres à produire cet effet.
Il n’y a pas certainement de pays au Monde, où la barbe soit
autant soignée qu’en Perse : le matin en sortant du l i t , le soir en
s’y mettant , après ses repas et plusieurs fois dans la journée, le
Persan lave soigneusement sa barbe , la sèche avec un linge ,j la
peigne long-tems, en ajuste bien les poils, et y passe plusieurs fois
la main pour les assujettir. Il porte, à cet e ffe t, dans sa poche, un
miroir et un peigne pour remédier sur-le-champ à ¡tous les déran-
gexnens qui pourraient survenir à cette partie, soit par l ’effet du
vent, soit par quelque frottement inattendu.
Les otages que Méhémet fit venir du Khorassan en 1796, sont
les seuls que nous ayions vus, dans ce pays , sans barbé; ils portaient
seulement des moustaches fort longues. C’étaient des seigneurs
ouzbeqs et turcomans du nord de cette province.
Les Persans Se râsent la tête deux ou trois fois par semaine.
Quelques-uns laissent croître sur le crâne,.comme les T u rcs, une
touffe de cheveux ; quelques autres, dans la classe du peuple
seulement,
seulement, laissent une bordure de cheveux au dessus des oreilles,
qui se joignent sur le devant à l ’origine de la barbe.
Les Curdes que nous avons vus entre Mossul et Bagdad forment,
de la touffe de cheveux qu’ils laissent au milieu de la tête, deux
tresses très-longues qu’ils laissent pendre derrière les oreilles. Nous
avons aussi trouvé la même coiffure parmi quelques Curdes de la
Perse, mais elle y est beaucoup moins commune.
L ’usage du tabac en poudre n’est presque pas connu dans les
parties de la Perse, que nous avons parcourues; celui de la pipe y
est de même très-peu répandu : on y a substitué le narguil, qui est
un instrument ou vase de cristal, de métal ou de cu ir, à moitié
rempli d’eau, et surmonté d’un cylindre creux, terminé par un godet
en métal, sur lequel on met le tabac que l ’on veut fumer ; un long
tuyau de bois ou de cuir est adapté à la partie supérieure du vase :
la fumee du tabac passe par le cylindre et à travers l ’eau, et n’est
reçue par le tuyau, dans la bouche, qu’après avoir été épurée dans
1 eau contenue dans le vase. Cette manière de fumer exige, comme
on v o i t , plus d’appareil que la pipe turque ; et elle est peut-être
plus mal-saine, puisqu’il faut aspirer avec effort, et faire parvenir
la fumée toute entière dans la poitrine, au lieu qu’avec la pipe on
se contente de l ’amener dans la bouche.
Lorsqu’on fume le narguil, les premières inspirations sont presque
toujours suivies d’Une forte toux. La fumée de tabac , même
parmi les personnes qui y sont le plus habituées, ne peut être reçue
dans les poumons, qu’elle ne les irrite et ne produise la toux. Le
Persan est obligé de s’arrêter lorsqu’il en a tiré quelques bouchées ;
il y revient après quelques momens de repos ; mais très-souvent il
s en contente, et fait passer le narguil à une autrepersonne,
Les Persans ne fument pas leur narguil aussi souvent que les
Turcs fument leur pipe : c’est ordinairement le matin et le soir, et
deux ou trois fois dans la journée , qu’ils en tirent quelques bouchées
, tandis que les Turcs fiunent du matin au soir.. Le riche et
l ’homme o is if, parmi ceux-ci, n’ont pas d’autre occupation : la
pip e , le café, et un chapelet à la main dans l ’intervalle, voilà ce
qui remplit la journée d’ un Turc. Nous avons vu plusieurs fbis des
Tome I I I , y