Le i 5 , nous continuâmes notre route, et marchâmes deux heures
et demie sur un terrain un peu inégal, tout formé de cailloutage.
Nous campâmes près d’un puits dont l’eau était presqu’aussi mauvaise
que celle du premier.
Le 16 , nous nous dirigeâmes à l’ouest, comme le jour précédent.
Après avoir fait environ neuf milles, nous àpperçûmes l’Eu-
phrate dans le lointain , et nous campâmes à peu de distance d’un
ancien canal. Le terrain au-delà du fleuve paraissait coupé et un
peu plus élevé que celui sur lequel nous étions ; nous l’évaluâmes
à sept ou huit milles de distance.
Des Arabes campés aux environs vinrent offrir à la caravane, du
lait, du beurre et du fromage. '
Nous passâmes deux jours dans cet endroit, pour attendre quelques
balles de marchandises qui étaient restées à Bagdad, et qu’on
n ’avait pu transporter jusqu’alors faute de chameaux ; elles arrivèrent
le 18 au so ir ,.e t le 19 nous continuâmes notre route, et
fîmes environ neuf milles.
s Le 20, nous en fîmes h u it, et campâmes à demi-lieue d’un ancien
canal.
Là où finissent les terres d’alluvion, et où commence cette partie
de la Mésopotamie que nous avons dit former la troisième zon e ,
l ’Euphrate coule dans une vallée qu’il paraît avoir creusée pour y
asseoir son lit. Elle est d’abord assez large, mais elle se rétrécit à
mesure qu’on remonte le fleuve ; elle n’a plus guère que quatre ou
cinq milles de largeur en approchant de Mit.
Cette vallée est couverte partout d’une terre grasse, très-fertile,
provenant du limon que Te fleuve y a déposé. Au-delà, les terres
sont, comme nous l’avons dit ailleurs , stériles ou point du tout
propres à la culture ; elles sont peu compactes, peu profondes,
blanchâtres , fortement chargées de sélénite, et elles posent, presque
partout , sur du gypse. Le sol est en générai assez uni; il ne
présente ni montagnes ni collines, à moins qu’on ne se trouve dans
la vallée du fleuve ; car alors on croit être entre deux coteaux ou
deux collines parallèles. Au reste, ces déserts ne sont pas assez
stériles pour qu’on n’y trouve beaucoup de plantes. Il y croît des
graminées, des chardons , et surtout beaucoup de plantes grassés,
.telles que des soudes, des salicornes.
Le 2 1 , nous marchâmes cinq heures sur la lisière du désert, et
vînmes camper à une deml-lieue de TEuphrate, près d’un bois de
tamaris : c’est le même que nous avions vu en Egypte ; il s’élève
en arbre, et fait un assez joli effet. A peu de distance de nous était
une prairie naturelle, éniaillée de mille fleurs : nous n’y trouvâmes
pourtant pas beaucoup de plantes qùi pussent nous intéresser
: le désert était pour nous bien plus riche que la vallée
arrosée par le fleuve.
Nous séjournâmes en cet endroit le 22 et le 2 3 , parce que le
scheik de la caravane s’était absenté depuis le 21, pour aller acheter
quelques chameaux dont on .avait besoin pour le transport de l’eau.
Nous profitâmes de cette circonstance pour aller voir une horde
d’Arabes soumis au pacha de Bagdad, qui se trouvait campée aux
environs.
Elle n’était guère qu’à demi-lieue. En nous avançant, nous distinguâmes
, à sa grandeur, la tente dù scheik, et nous y fumes droit.
Des serviteurs se présentèrent'à l ’entrée, pour prendre nos chevaux
et en avoir soin. La tente était fort spacieuse, et faite d’une grosse
toile dé laine noire ; elle était ouverte au nord, et relevée de trois
ou quatre pieds à l’orient et à l’occident. Les femmes'se trouvaient
du côté du midi ; une cloison les séparait du reste de la tente : le
scheik était assis sur un tapis près d’un pilier qui la soutenait ; il
avait derrière lu i, tout près de la cloison , sa jument,*sa lance et
quelques harnois..
Nous le saluâmes en entrant; il nous rendit, sans se déranger,
le sa lu t, et nous invita à nous asseoir sur les tapis qu’on avait
étendus pour nous vers l’entrée de la tente. Assis , nous nous
saluâmes une seconde fois. Après un instant de silence, un Arabe
qui nous accompagnait, ayant annoncé qui nous étions, le scheik
nous salua d'e nouveau, et se disposa à nous recevoir avec tous
les honneurs qu’il croyait nous devoir. Un mot qu’il fit passer
dans le harem, mit toutes les femmes sur pied. Elles nous envoyèrent
d’abord un grand pot de lait de brebis qu’on venait de traire,