les Arabes se plaisent à raconter. C’est le mont Télèsin on Enchanté.
Bruyn en a donné une figure dans ses voyages (1). Chardin (2) et
Beauchamp (3) croient que c’est de ce mot que s’est forme celui de
talisman..'.
Le territoire de Kom est un des plus arrosés et des plus fertiles de
la Perse : il abonde en fruits excellens; il produit du tabac, du
coton ; du r iz , du sésame ; et toutes les plantes céréales d Europe.
: Cette ville paraît avoir succédé à l’ancienne Choarta ou Chaona ,
dont Ptolomée et Diodore de Sicile font mention, et qu ils placent
à la partie orientale de la Médie. L’ancienne ville s etendait un peu
au sud-ouest de la nouvelle ; car on y voit quelques restes de vieux
murs, et une pyramide ronde d’environ vingt-six pas de diametre
à sa base, dont Bruyn a donné une description détaillée. Suivant
les Arabes, Kom est au 34e. degré 45 minutes de latitude.
Cette v ille , qui avait sous les Sophis plus de quinze mille maisons
et plus de cent mille habitans (4), vient de disparaîtré, et ne
présente plus aujourd’hui que des ruines. A peine avons-nous vu
une cinquantaine de maisons debout autour de la mosquee principale;
et c’est à la vénération que les Persans ont pour ce lieu qui
renferme les dépouilles d’une fille de Moussa-el-Kadem (5) , et celle
des derniers rois (6) , qu’elles ont pu échapper à la destruction qui a
frappé plusieurs fois eètte ville. Elle avait beaucoup souffert sous le
règne des Afghans ; beaucoup de maisons avaient été détruites, et
beaucoup d’habitans avaient été passés au fil de l’épée sous Ibrahim
Chah : elle s’était un peu remise de ses pertes sous Kérim-
K han; mais, après sa m o r t, elle a été si souvent prise et reprise
par Méhémet, par Alî-Murad et par Djaffàr ; elle à été si souvent
(1) Voyage en Perse et aux Indes orientales, tom. IV , pag. 53 , édition in-4°V
Paris, 1725..
(2) Voyage en Perse et autres lieux de V Orient, tom. I r pag* 201 , édition in-4®-
Amsterdam, 17*1-
(3) journal, des Savans, novembre 1790.
(4) Oh doit compter en Perse au moins sept ou buit personnes par maison»
(5) Fathime : le père est enterré dans tin village près de Bagdad*
(6) Les rois de Perse , depuis Chab-Sefi.
livrée au pillage, que tous les habitans ont disparu, et que les
maisons , toutes bâties en terre , comme celles des autres villes, se
sont bientôtiécroulées.
Lorsque nous y avons passé, il n’y avait pas trois cents habitans,.
Nous en interrogeâmes quelques-uns ; ils nous répondirent par des
soupirs et par des larmes. Qu’avaient-ils à nous dire ? Ne voyions-
nous pas autour de nous les décombres de leurs maisons ? Ne
marchions-nous pas sur les cadavres de leurs frères, de leurs pères,
de leurs enfans? Tout ne portait-il pas l ’empreinte de la barbare
tyrannie des chefs, de l’atroce férocité des subalternes ?
Nous avions vu déjà des campagnes abandonnées , des villages
détruits, des peuples que les troubles civils avaient réduits à la plus
affreuse misère ; nous en avions gémi, nous avions déploré les
mâlhe'urs de la guerre ; mais à l’aspect d’une ville très-considérable
qui venait récemment de disparaître, à l’aspect de ses ruines encore
fumantes, à l ’aspect de quelques infortunés qui semblaient sortir
de leurs tombeaux, notre coeur se trouva tout à coup déchiré; nos
regards ne purent se fixer sur un tableau si hideux,
i Que le feu consUme la moitié d’une ville ; que dans un débordement
les eaux submergent tout ce qui s’oppose à leur passage ; que
dans un tremblement de terre une contrée entière soit engloutie,
ou qu’elle disparaisse à la suite d’une éruption volcanique, ce sont
là de ces ëvénemens qui dérivent des lois auxquelles notre globe est
soumis ; 1 homme, dans ce cas, n a point a, se plaindre de l ’homme •
mais que dans ces contrées où le despotisme le plus absolu caractérise
la souveraineté , l ’homme, soit le plus mortel ennemi de son
semblable et toujours prêt à lui arracher la vie ; que ceux qui devraient
être les protecteurs et les pères des peuples soient les premiers
à les armer les uns contre les autres, et que ceux-ci, entraînés
par ce fatal ascendant, courent ainsi aveuglément à leur ruine, que
penser de cela ? Que l ’espece humaine est bien loin d’avoir cette
faible portion d’entendement dont elle se glorifie.
Le 18, à la pointe du jou r , nous partîmes de K om , et nous marchâmes
quatre heures dans une belle plaine presque toute arr.osée,
mais inculte. Nous étions à peu près à une lieue de cette chaîne