porter de là à Ispahan, à-Tauris', à Mossul, à T oca t, à Diarbékir,
à A lep , venaient presque toutes, remonter le Schat-el-Arab, et se
rendaient à Damas, à Alep où à Mossul sans passer par la Perse.
L ambition dont Nadir avait été tourmenté , les guerres qu’il avait
entreprises, la tyrannie qu’il avait exercée, avaient presque subitement
tari toutes les sources de la prospérité publique. Les Banians
, les Arméniens et les Juifs, par les mains de qui se faisait ce
commerce, s’étaient sauvésy avec les débris de leur fortune, dans
les différentes villes de 1 Inde et de la Turquie. Un grand nombre
•d entr eux étaient venus s établir a Bagdad,et à Bassora, et y avaient
attire directement les marchandises qu’ils recevaient auparavant à
Ispahan, à Chiras,. à Casbin ou à Tamis.
Kérim n’avait rien négligé, cornuie nous l’avons dit, pour faire
revenir ces négocians dans leur patrie ; mais soit qu’ils craignissent
de nouveaux troubles après sa mort, soit qu’ils n’espérassent pas
reprendre leur commerce avec le même avantage, soit qu’ils fussent
satisfaits de leur sort, il n’était guère rentré que ceux qui se
trouvaient sans fortune, sans ressource, et conséquemment hors
d é ta t de faire reprendre aux marchandises leur ancienne route.
Kérim trouva facilement un prétexte de faire la guerre aux Turcs.
Quelques démêlés qu’il avait eus avec Omar, pacha de Bagdad, au
sujet des pèlerins qui sè rendent chaque année à Mesphed-Ali, au
nombre de quatre ou cinq mille, et dont on exige une taxe plus ou
moins forte, suivant les circonstances, avaient porté Kérim à demander
â la Porte othomane la tête d’Omar, et l’abolition d’un
droit que la religion proscrivait, et auquel d’ailleurs le souverain
de la Perse ne pouvait souscrire sans déshonneur.
Sur le refus qui lui fut fa it, ou sur les explications qu’on lui
demanda, le vékil se prépara à la guerre. Il fit armer,, en i 775,
dans les ports de Bender-Abouchir, de Bender-Rik et de Gohan ,
toutes les galvettes et autres petits bâtimens qui s’y trouvaient, et
leur donna l’ordre de se rendre dans le Schat-el-Arab , où il envoya
parterre cinquante mille hommes commandés par son frère Sadek-
K h a n , beyler-bey du Farsistan. La flotte, ainsi que l’armée,' se
trouvèrent devant Bassora au commencement d’a v r i l, et s’en
emparèrent
emparèrent après treize mois de siège, ainsi que nous l’avons dit
ailleurs (1).
Sadek-Khan resta jusqu’en septembre i 777 à Bassora, sans que
lé pacha cherchât à l’inquiéter, ni que la Porte othomane fît aucune
disposition pour le forcer d’évacuer cette place. Rappelé auprès de
son frère avec une partie des troupes, pour reprendre le gouvernement
du Farsistan et maintenir le bon ordre à Chiras, ainsi qu’il
s’en était acquitté auparavant, il fut remplacé à Bassora par Ali-
Méhémet-Khan, homme v a in , présomptueux , facile à tromper ,
adonné au vin et aux femmes, et peu propre, sous tous les rapports,
à l’emploi dont iPétait chargé.
Immédiatement après la prise de Bassora, les Arabes montefiscs,
qui se trouvaient dans la ville et qui avaient fait preuve de courage
pendant le siège, eurent la faculté de se retirer dans leurs déserts ,
ou de demeurer dans la ville s’ils le jugeaient à propos. Ils obtinrent
de Sadek le privilège d’apporter leurs denrées à Bassora, et de les y
vendre ou échanger comme bon leur semblerait sans payer aucun
droit ; privilège dont ils ne manquèrent pas de profiter’, et dont
les habitans se trouvèrent bien, attendu qu’ils manquaient de tout,
et que leur ville d’ailleurs s’approvisionne en grande partie par la
voie des Arabes.
Peu de tems après l’arrivée d’Ali-Méhémet, la tribu toute entière
se divisa en deux partis : ceux qui avaient soutenu le siège et un
grand nombre d’autres , sous les ordres de Scheik-Touéni, restèrent
attachés aux Persans , et continuèrent de fréquenter la ville ;
les autres , beaucoup plus nombreux, sous les ordres de Scheik-
Thamar, se déclarèrent contre, et se disposèrent a arrêter les subsistances
et toutes les denrées qu’on portait à la v ille , et même à
ravager les champs cultivés des environs.
Ali-Méhémet et Touéni, que Thamar menaçait également, s’en-,
gagèrent à agir de concert, et à combattre ensemble leur ennèmi
commun. Touéni faisait espérer à son allié une victoire facile et
un butin considérable : il a va it, disait-il, des parens et des amis-
(i).Tom. I I , pag. Saç.
Tome JII, V v