Tigre et de l’Euphrate élèyent-ils d’un pouce les eaux du golfe
Persique ?
; > Si on veut un peu réfléchir à la profondeur excessive des eaux
dans l’Hellespont, dans la Propontide et dans le Bosphore, si ensuite
on jette seulement un regard sur le Pont-Euxin et sur ses côtés, si
on observe qu’une élévation de douze à quinze toises de plus eut
suffi pour que ses eaux se fussent répandues dans la Propontide
par divers endroits , on sera bien porté à croire que jamais cette
.mer n’a été plus élevée : on ne doutera pas que sa formation ne soit
aussi ancienne que celle de la Méditerranée et de la Propontide*5 on
sera convaincu, dis-je, que ces mers datent de la même epoque; et
qu’elles ont toujours communiqué entr’elles.
Je ne prétends pas dire pourtant qu’il soit hors de toute vraisemblance
que la Mer-Noire ait jadis été séparée de la mer Égée ; mais
•on ne pourra jamais admettre que la Propontide fût séparée de la
Méditerranée, ni que le Bosphore ne fû t , jusqu a Bny tik-Dhére, un
golfe semblable à ceux de Nieée et de:Nicomedie, et alors-comment
•supposer qn’i trois ou quatre milles de la Propontide, il se soit
trouvé une mer qui ait pu avoir une très-grande élévation au dessus
d ’elle? - ta ' u n B ■ fi f ’
Mais: comment la Caspienne s’est-elle séparée dé la mer d’Azof?
et pourquoi son niveau a-t-il baissé , tandis que celui de la Mer-
¿Nôire s’est maintenu dans le même état?-:
I l me semble que les alluvions du D on , du Koubàn, .du'Volga
et de cette infinité de rivières e td e torrens qui descendent d u Cauc
a s e , ont dû suffire pour opérer peu !à peu cette: séparation.» Ces
mers ne communiquaient que par un canal ; et; ce canal recevait à
ses deux extrémités les alluvions d e trois grands fleuves -; il recevait
aussi, dans toute sa longueur ; foutes les terres que l'es pluies
détachaient continuellement des hautes montagnes du Caucase. Si
le Don versait ses eaux à i Constantinople O u à Lampsaque, peiise-
t-on qu’il fallût un grand nombre de siècles pour que la Propontide
ou la mer! Égée cessât de communiquer avec le- Pont-Euxin. ?-Le
D on , quiïést un des plus grands fleuves d’Europe, n’a pu amener
les sables et le limon qu’il charrie ; il n ’a pu les verser dans le détroit
qui joignait les deux mers , sans élever peu à peu le fond de ce
détroit, sans finir par l ’obstruer. Le Volga en faisait de même vers
l ’autre extrémité; ce qui accélérait d’autant plus vite le comblement
de ce canal.
Par cette séparation, la-Mer-Noire n’a dû éprouver aucun changement
bien sensible dans son niveau ; car il est à présumer qu’ayant
toujours eu plus d’eau qu’il n’en fallait à son évaporation, elle en
versait une partie dans la Propontide, comme elle y verse aujourd’hui
tout ce qu’elle a de superflu ; elle versait l’autre partie dans
la Caspienne ; ce qui la maintenait alors à peu près au même niveau
qu’elle. Mais la Caspienne, qui n’a plus reçu les eaux de la Mer-
Noire ou celles du Don -et du Kou b an, et qui se trouvait alors
perdre plus par l ’évaporation, qu’elle ne recevait par les pluies et
par les fleuves qui s’y rendent, a dû nécessairement diminuer en
étendue et en hauteur, jusqu’à ce que l ’équilibre ait été établi comme
il l’est aujourd’hui.
M. Pallas donne comme une preuve du grand abaissement de
cette mer, le cours du V o lg a , qu’on sait être très-long et assez
rapide, et qui prend sa source dans une contrée qui est très-peu
élevée au dessus des autres mers (1).
Mais la preuve la plus certaine que la Caspienne est plus basse
que le Pont-Euxin, c ’est que, à l'endroit où le Volga et le Don
sont le plus rapprochés, et où ils n’ont pas plus de sept ou huit
lieues de distance, le premier, ainsi que nous l ’avons dit dans le
chapitre précédent, a son lit plus bas de soixante et quelques pieds
que le second; ce qui doit faire supposer que la Mer-Noire est de
soixante et quelques pieds plus haute que la Caspienne.
Tel est aussi 1 abaissement 'que cette dernière a éprouvé peu à
peu; telle est à- peu près l’élévation du sol, qui s’est formé à mesure
que ses eaux se retiraient. Les vastes déserts qui s’étendent du
Volga jusqu’au J a ïk , et depuis le Jaïk jusqu’au lac.d’A ra l, ainsi
que celui situé derrière ce même la c , vers les monts Ouralks, ne
sont, suivant Pallas, qu’à quinze toises au dessus de cette mer.
(1) Pallas. Voyage, tom. V , pag, 156,
Tome III, S