V O Y A G E E N P E R S E ,
placée vers le b o rd , et fixée au moyen de fortes chevilles, empêche
qne le vent ne soulève les planches et ne les emporte. Ce qui a sans
doute donné lieu à cette manière de se lo g e r , c’est que le bois est
excessivement commun dans ces contrées , et cju’ii ne faut pas un
mois de travail à un homme pour mettre à couvert sa famille et
ses bestiaux.
Le i 3 , nous traversâmes les montagnes que nous avions devant
nous ; elles sont schisteuses , quartzeuses, micacées , et couvertes
de superbes pins. Nous y en remarquâmes un très-droit, très-
elancé, à conês très-petits : c était le quatrième qne nous voyions
depuis notre départ de Celindro ; il était plus rare que les autres.
Le ciste à feuilles de laurier était très-abondant en quelques endroits.
La derniere montagne qne nous descendîmes, était calcaire;
elle nous conduisit à un village assez grand , nommé Dountani-
Tchougourgea.
Nous fîmes ce jour-là cinq lieues en nous dirigeant presqu’au
nord. Taoch.an.li, qu’on voit marqué sur la carte de Danvillé, était
à huit lieues de nous vers l’est, et la montagne nommée T o u rn a n t
D a a g f à une lieue au nord.
Les maisons du village où nous couchâmes, ressemblaient à celles
de Cazaliaonb : on en voyait pourtant quelques-unes en terre.
Le 14, nous escaladâmes la montagne durant la nuit; elle nous
parut très-boisée. Parvenus au sommet à la pointe du jo u r , nous
nous trouvâmes dans une épaisse forêt de hêtres; ils étaient très-'
gros, très-serrés, très-élancés. Pendant plus de deux heures nous
ne vîmes que cet arbre ; il nous étonna par la longueur et par la
grosseur de sa tige : il nous parut avoir plus de cent pieds de haut»
et environ trois pieds de diamètre. A mesure que nous descendîmes,
le hêtre disparut, et fit place à des sapins, à des pins, des châtaigniers,
des charmes, des chênes, des noisetiers, des bouleaux,.des
tilleuls : vinrent ensuite le prunier, diverses espèces d’azeroliers, de
néfliers, d’aube-épines. Plus bas nous remarquâmes le troène , le
cornouiller commun, le cornouiller sanguin, l’érable de Montpellier
/ le lierre , l’azaléè pontique, le fragon piquant et le fragon à
grappes ou laurier alexandrin, les deux belles espèces de millepertuis
( androsaemum et olympicum) , plusieurs cistes, la lauréole du Levant
( daphne pontica). Au bas de la montagne croissaient le platane
oriental, l’orme, le frêne, et dans les haies la vigne, la clématite,
la salsepareille, la douce-amère, le houblon, la ronce, etc.
Toute la montagne est schisteuse , quartzeuse et granitique, et
partout elle est couverte de verdure. Sa hauteur est beaucoup
moins considérable que l’Olympe, dont elle est une suite. Le s o l,
à sa partie méridionale , nous a paru beaucoup plus élevé qu’à
celle du nord. Nous n’avons mis que quatre heures du village où
nous avions couché, au sommet, et il nous en a fallu cinq pour la
descendre. En la quittant, nous entrâmes dans un fort joli vallon,
qui s’élargit peu à peu, et nous conduisit dans une plaine bien,
cultivée et fort peuplée ; elle est arrosée par une petite rivière qui
prend son cours au nord , et va se jeter dans le Sangaris. Nous
logeâmes au milieu de cette plaine, après dix heures de marche,
dans le village d’Alibekeur. La petite ville d’Yarissar était à une
lieue de nous.vers l’orient, et celle d’Ainéh-Ghul à cinq ou six vers
■l’occident. Brousse n’était alors qu’à neuf lieues de nous.
Le i 5, nous marchâmes encore une demi-heure dans la plaine,
jusqu’à un petit village dépendant d’A inéh-Ghul. Nous traversâmes
des coteaux et des collines calcaires, sur lesquels nous remarquâmes
le térébinthe, le micocoulier , l’orme, le frêne fleuri ou
frêne à manne, plusieurs chênes, le cornouiller, l’arbousier, l ’an-
draebné , le genêt d’Espagne , quelques pieds de storax, le laurier
commun. Nous arrivâmes à Yenishéer après six heures de marche.
Yenishéer est une petite ville peuplée de Turcs et de Grecs ; elle
est dans une plaine arrosée par une petite rivière qui vient d’un
lac qué nous avions apperçu à notre ganclje : sa principale culture
consisté en mûriers et en coton. Les coteaux d’alentour sont couverts
dé vignobles.
Nous ne nous arrêtâmes qu’un quart-d’heure à Yenishéer; nous
marehâmes encore deux heures et demie sur des côllines schisteuses
assez élevées, et nous vînmes passer là nuit à Bambougeuk,
petit-village peuplé dé Grecs èt de Turcs.
Le 16 , nous nous rendîmes dans deux heures à N icé e .: