la Mer-Noire et s’y établir d’une manière stable, il aurait pu communiquer
directement avec les puissances européennes, recevoir
les.denrées qu’ils leur auraient apportées, et leur donner en échange,
les soies du Guilan, les drogues du Khorassan, les laines du Kerman,
le cuivre si abondant dans ses États.
Le ministre a répondu : Nous reprendrons Ta Géorgie quand nous
voudrons. Mais les Russes, avons-nous observé, d’après le traité
qui existe, viendront au secours d’Héraclius leur vassal. Les Russes ,
a dit le ministre, ne pourront s’y opposer lorsque nous nous présenterons
avec toutes nos forces. Il nous a pa ru , tant par cette
réponse du ministre, que par tout ce que nous avons entendu dans
les divers lieux où nous avons passé, que ni le gouvernement ni
le peuple ne redoutent les Russes, peut-être à cause de quelques
faibles succès qu’ils ont obtenus sur eux sous Nadir-Cliah, et sur
lesquels ils comptent encore, quoique les deux nations aient bien
changé depuis ce. teins. -
Comme il eût été inconvenant de contrarier cette opinion , et
qu’au contraire i l nons était avantageux de la laisser telle que nous
la trouvions établie, puisque la confiance dans ses propres forces
les accroît, nous dîmes que nous ne doutions pas que Méhémet
n’obtînt des succès contre cette nation, surtout s’il marchait avec
toute son armée. Nous insistâmes beaucoup sur la nécessité de
réunir des forces considérables, attendu que les Russes, qui savaient
à quels ennemis, ils auraient à fa ire, ne manqueraient pas d’envoyer
de nouvelles troupes dans.le Ghyrvan pendant l’hiver.
JL’arrivée d’un grand seigneur ayant interrompu la conversation
, nous nous sommes retirés après une heure et demie d’entretien.
Avant de quitter le ministre, nous le priâmes d’agréer qu’il lui
fût remis, une note à laquelle nous désirions, qu’il: fît une réponse
par éc r it, afin:que nous pussions la transmettre à notre gouvernement.
Le ministre nous engagea à la lui remettre le plus tôt possible.
Elle lu i fut présentée deux jours après par notre drogman.
Hadgi-Ibrahim la lu t , en parut satisfait, et promit d’y répondre
sous peu de jours.
Nous avions dit au ministre dans le premier et dans un.second
entretien que nous eûmes peu de jours après, tout ce qui nous avait
été ordonné de lui dire : il nous avait répondu d’une manière satisfaisante
il ne nous restait plus qu’à solliciter auprès du secrétaire-
général l ’expédition de la réponse que l ’on nous avait fait espérer
, et lui demander ensuite nos passe-ports pour nous rendre à
Bagdad. La première fois que nous le vîmes, il nous combla d’honnêtetés,
et nous pressa fortement de venir le voir le plus souvent
que nous pourrions ; ce que nous n’hésitâmes pas de faire. Il se
nommait Myrza Issa, et il était qualifié de myrza bouzourch Ou de
grand myrza. Il occupait, comme on v o it , une place éminente :
le ministre lui accordait une pleine confiance j toutes les affaires
d ’État un peu importantes lui passaient par les mains ; il avait beaucoup
d’esprit*, la plus grande facilité dans.le travail, et les connaissances
les pins étendues de tout ce qui avait rapport à l’administration
intérieure, aux finances, au matériel de la guerre ; il
possédait très-bien l ’histoire de son pays; ii savait, dans le plus
grand détail, tout ce qui setait passé dans les différentes provinces,
depuis l’arrivée des Afghans et le détrônement des Sophis. Né à
Chyras, il avait fréquenté, dans sa jeunesse, quelques Européens ,,
de sorte qu’il n’était pas étranger à nos moeurs et à nos usages.'
Comme il était grand parleur et un peu satyrique , il ne laissait
jamais passer l ’occasion de nous raconter les anecdotes scandaleuses
qui étaient parvenues à sa connaissance. Nous apprîmes de
lui beaucoup de particularités sur les grands de la cour ; noms pûmes,
et e’est ce qui nous intéressait le plus pour le moment, flous-
pûmes , dis-je, à travers tous les éloges qu’il lui donnait,.démêler
le caractère féroce1, les vues excessivement ambitieuses et la poli tique
astucieuse de Méhémet.
Quant au ministre; à qui il devait son avancement et sa fortune,,
il ne nous en parla jamais qu’aveé un respect religieux. S’il était!
question du ror, nous voyions u» serviteur zé léq u f prend, autanÉ-
qu’il peut, les intérêts de Son maître pqùi sfidéntifieMui/qaiiexausë.
ses fautes’, efcagèré sës bonnes qualités' Quand il s’dgissait dix xifi-
nistre, <fétait un fils tendre et reconnaissant qui ne fkit pas l ’ëlbgy