compares. Cefte méthode a l ’avantâge de dévoilèr
les imperfections de la portion qu’on épluche, & de
préparer la laine à être plus facilement drouffée.
c°. Le D rouffage.a'Dro\\ffcr , ou trouffer la laine,
fc’eft l ’huiler , l’imbiber d’huile d’olive ou de nav
ette, pour la carder. Je ne puis m’étendre autant
que je le voudrois, fur les ihoyens qui font les plus
expédiens pour bien huiler la laine ; je dirai feulement
en paffant, qu’il eft plus à propos d’afperger
la laine, que de l’arrofef ; de l’huiler par petites portions
, que par tas & en monceau.
6 ° . Cardage & peignage. La longue laine fé peigne,
la courte fe carde. Les cardeurs ont deux excès à
éviter ; l’un de trop cardef, l’autre de carder moins
qu’il ne faut.
Ceux qui cardent trop légèrement laiffent dans la
portion de laine qu’ils façonnent, de petits floccons
plus durs que le refte de la cardée. La laine ainfi préparée
, donne un fil inégal & vicieux. Les cardeurs
qui ont la main pefante, brifent la laine ; les filets
ou coupés ou brifés, ne donnent plus une trême de
même confiftance, l’étoffe a moins de force. Cette
façon, qui eft des plus effentielles, eft fort négligée
dans nos manufactures ; la paye modique qu’on donne
aux ouvriers, leur fait préférer la méthode la
plus expéditive à la meilleure.
7°. Mélange. Mêler, affortir, ou rompre la laine,
c’eft faire le mélange des laines de differentes qualités
, que l’on veut employer à la fabrique des draps.
Nos fabriquans françois étant obligés depuis long-
tems d’employer toutes fortes de laines pour fournir
à la confommation, ont acquis une grande habileté
dans l’art de mêler & d’allier les laines du royaume
avec celles de leurs voifins.
8°. Filage. Filer la laine c’eft réduire en fil les portions
que le cardeur ou le peigneur ont difpofées à
s’étendre & à s’unir enfemble, pour ne former qu’un
feul tiffu long, étroit, & délié. Le fiieur doit fe précautionner
contre deux défauts bien communs ; l’un
de trop tordre fon fil, ce qui lui ôte de fa force, &
fait fouler le drap ; l’autre de donner un fil inégal,
en le filant plus gros dans un endroit que dans l’autre.
Il femble qu’on ne peut éviter ces deux défauts
que par l’invention de machines qui tordent le fil au
point qu’on délire en le filant également. Voye{ l'article
fuivant fur la main-d’oeuvre de toutes ces opérations.
(D . J.')
L a i n e , (Mar. méd.) laine de bélier ou de brebis.
La laine fale , graffe , imprégnée de la fueur de l’animal
, ou d’oenpe (voye^ ( E s i p e ) , étoit d’un grand
ufage chez les anciens. Hippocrate la faifoit appliquer
fur les tumeurs après l’avoir fait carder, tremper
dans de l’huile & dans du vin. Celfe & Diof-
coride célèbrent aufii beaucoup de pareilles applications
, & même pour des maladies internes, telles
que l’inflammation de l’eftomac, les douleurs de
tête , &c.
Diofcoride préféré celle du cou & des cuiffes,
comme étant plus chargée d’oefipe.
Diofcoride décrit aufïi fort au long une efpece de
calcination fort mal entendue de la laine, & lur-tout
de la laine teinte en couleur de pourpre, qu’il prétend
être un excellent ophtalmique après avoir ef-
fuyé cette calcination.
Heureufement la laine & fes préparations ne grof-
fiffent plus la lifte des inutilités pharmaceutiques
affez énormes fans ce la ; car on ne compte pour
rien l’attion de la laine dans l’application des flanelles
imbibées de différentes liquçurs, qui eft en ufage
aujourd’hui. Il eft évident qu’elle ne fait proprement
dans ce cas*que la fonction de vaiffeau, c’eft-à-
• dire d’inftrument retenant le remede fur la partie af-
feétée.
Les vêtemens de laine, & même ceux qu’on appliquè
immédiatement fur la peau ( ce qui eft une
pratique fort falutaire dans bien des cas , voye%
T ranspi ration) , ne doivent aufïi leurs effets qu’à
la propriété très-commune de couvrir le corps mollement
& exactement, & par conféquent ces effets
ne dépendent point de la laine comme telle, c’eft-
à-dire dé fes qualités fpécifiques. Voye^ Vêtement.
( i )
Lain e, Manufacture en Laine, ou Dra*
PERIE, {Art médian.') la laine habille tous les hommes
policés. Les hommes fauvages font nuds, ou
couverts de la peau des animaux. Ils regardent en
pitié les peines que nous prenons pour obtenir de
notre induftrie un fecours moins sûr & moins prompt
que celui que la bonté de la nature leur offre contre
l’inclémence des faifons. Ils nous diroient volontiers :
Tu as apporté en naiffant le vêtement qu'il te faut en été9
& tu as Jous ta main celui qui t'ejl néccjjaire en hiver*
Laijfe à la brebis fa toifon. Vois-tu cet animal fourré.
Prends ta fléché, tue-le , fa chair te nourrira t & fa peau
te vêtira fans apprêt. On raconte qu’un fauvage tranf-
porté de fon pays dans le nôtre , & promené dans
nos atteliers , regarda avec affez d’indifférence tous
nos travaux. Nos manufactures de couvertures en
laine parurent feules arrêter un moment fon attention.
Il fourit à la vue de cette forte d’ouvrage. Il
prit une couverture, il la jetta fur fes épaules , fit
quelques tours ; & rendant avec dédain cette enveloppe
artificielle au manufacturier: en vérité, lui dit-
il , cela efl»prefqu auffi bon qu'une peau de bête.
Les manufactures en laine, fi fuperflues à l’homme
de la nature, font les plus importantes’ à l’homme
policé. Aucunes fubftances, pas même l’o r , l’argent
& les pierreries, n’occupent autant de bras que |a
laine. Quelle quantité d’étoffes différentes n’en fabriquons
nous pas I nous lui affocions le duvet du
caftor, le ploc de l’autruche, le poil du chameau a
celui de la chevre, &c.
Quoique la plupart de ces poils foient très-lians a
on n’en forme point une étoffe fans mélange ; ils fou-
leroient mal.
Si lion unit la vigogne & le duvet du caftor dans
une étoffe, elle en aura l’oeil plus brillant. On appelle
vigogne la laine de la brebis du Pérou.
Le ploc de l’autruche, le poil du chameau, celui
de la chevre, font des matières fines, mais dures ;
elles.n’entrent que dans des étoffes qu’on n’envoie
poinf à la fou le, telles que les camelots & autres
dont nous faifons nos vêtemens d’été. Ces matières
ne fourniffent donc qu’une très-petite partie de ce
qu’on appelle étoffe de laine.
La laine de la brebis commune eft feule l’objet du
travail le plus étendu, & du commerce le plus con-
fidérable.
Entre les laines, on place au premier rang celles
d’Efpagne ; après celles-ci, on nomme les laines d’Angleterre
; les laines de France font les dernieres. La
Hollande en produit aufii d’affez belles ; mais on ne
les emploie qu’en étoffes légères, parce qu’elles ne
foulent pas.
On diftingue trois qualités dans les laines d’Efpagne
; Iesléonoifes, ou forices ou fégovies ; les bel-
chites ou campos di Riziedos , & les navarroifes.
On divife les deux premières fortes feulement en
trois qualités , qu’on appelle prime , fécondé & tierce.
Dans les laines d’Angleterre & de Hollande, il y
a le bouchon & la laine commune. Cés bouchons
ne vont qu’au peigne, le refte paffe à la carde»
Les meilleures laines de France font celles du Berry.1
On nomme enfuite les laines du Languedoc. Quelques
autres provinces fourniflent encore des laines
fines. Le refte eft commun, & ne fe travaille qu’en
étoffes groflieres.
Travail préliminaire de la laine, T outes les laines en
•général doivent être lavées & dégraiffées de leur
luin. On appelle fu in , cette craffe onftueufe qu’elles
rapportent de deffus la brebis. Il eft fi néceffaire d’en
purger la laine, qu’ori ne fabriquera jamais un beau
drap fans cette précaution, à laquélle on n’eft pas
affez attentif parmi nous, parce qu’elle caufe un déchet
de trente à quarante pour cent au moins. Cependant
il eft impoffible de dégraiffer un drap comme
il convient, fi la laine dont on l’a manûfaCturé,
n’a pas été bien débarraffée de fon fuin.
D u lavage des laines. La laine ne fe lave pàs bien
dans l’eau froide. C ’eft cependant l’ufage du Berry
& des autres provinces de France, malgré lés ordonnances
qui enjoignent de fé fervir de l’eau chaude.
C ’eft toujours la raifon d’intérêt qui prévaut. Il eft
défendu par arrêt du 4 Septembre 1 7 14 , de vendrô
ni expofer en vente aucunes laines, qu’elles n’aient
été lavées de maniéré à pouvoir être employées en
étoffe fans être relavées, & ce à peine de trente
livres d’amende pour chaque balle , tant contre le
vendeur que contre l’acheteur. On n’excepte que les
laines d’Efpagne qui auront été lavées fur les lieu x,
& qui pourront être vendues d’après le lavage d’Efpagne.
.
Cependant les laines d’Efpagne qu’on emploie
dans les bonnes manufactures font toutes lavees ou
relavées avec de l’eau tiede & de l’urine. Ce dernier
ingrédient eft abfolument néceffaire pour en
écarter les parties qui ont été rapprochées & ferrées
dans l’emballage , de maniéré qu’elles feutreroient,
fi on n’employoit au lavage que l ’eau.
La première opération du lavage à l’eau chaude
fe fait dans des baquets ou cuves difpofées à cet effet.
II faut obferver que l’eau ne foit pas trop chaude,
le trop de chaleur amolliffant les parties les plus déliées
, les rapprocherôit & feroit feutrer. Que l’eau
foit feulement tiede. Lorfque l’ouvrier l’aura bien
ferrée, preffée- entre fes mains, il la mettra dans urte
grande corbeille d’ofier, enfuite on la portera dans
une eau courante pour la faire dégorger. Pour cét
effet, la corbeille étant plongée dans l’eau , qui la
pénétrera par-tout, on la relevera, preffera , remuera.
Cette manoeuvre lui ôtera la mauvaife odeur
qu’elle aura contrariée au premier lavage, & achèvera
de la nettoyer. Voye{ ce travail dans nos Planches
de Draperie, fig. 1. A e f t la cuve pour laver
les laines dans leur fuin. B , le laveur. C , la laine
dans la cuve. D , la riviere où l’on rinfe & dégorge
la laine. E , la manne ou corbeille qui contient la
laine qu’on fait dégorger. F , le laveur. G , un petit
banc portatif qui foutient le laveur fur les bords du
courant.
Une obfervation qui n’eft pas à négliger, c’eft
que plus l’eau des baquets deftiriés au lavage des
laines eft chargée de fuin, plus le lavage s ’exécute
parfaitement. Ainfi le lavage fe fait d’autant mieux,
qu’il a déjà paffé plus de laine dans un baquet avant
celle qu’on y met.
Du pilotage des laines. Outre cette première opération
, il eft encore une façon de relaver les laines,
& de leur donner une blancheur qui convient au
genre d’étoffe que le fabriquant fe propofe de faire.
C ’eft le pilotage.
Le pilotage n’a lieu que fur la laine à employer
en étoffes légères, telles que les flanelles, les molletons
fins, 6*c. dont le dégrais avec la terre glaife
altéreroit la qualité , lorfqu’on les feroit paffer aii
moulin comme les draps & autres étoffes qui ont plus
de réfiftance & de corps.
Pour piloter les laines on fe fert du favon fondu
jdans de l’eau un peu chaude. On en remplit les cuves
ou baquets femblables au premier lavage. On y
ajoute de l’eau de fuin , ou du premier lavage ; ôe
deux hopimes qui ont des efpeces de pilons 2 l’agitent
& la remuent avec la laine qui en prend la blancheur
qu’on defire. On voit cette opération fig. 2.
A , la cuve. B , les liffoires , ou bâtons à remuer
la laine dans de l’eau de favon. C, les ouvriers qui
pilotent.
Après qué la lainè a été pilôtée , on la porte à la
riviere pour la rinfér & la faire dégorger.
Dé Vétendage des laines. Lorfque les laines ont été
lavées, on les fait fécher; l’nfage dans les campa*
gnes eft de les étendre fur les prés, 6c quelquefois
fur la terre ; friais cet ufage eft mauvais. Les laines
fe chargent ainfi de poufliere, ou même ràmaffent dé
la terré qui s’y attache : enforte qu’un manufacturier
entendu, lorfqu’il acheté des laines qui ont été
féchées de cette maniéré, & que la proximité des
lieux le lui permet, a foin de la faire fecouer par les
emballeurs, à mefure qu’ils la mettent dans les facs.
On en féparera ainfi la poufliere & les autres ordures
qui cauferoient un déchet confidérablé.
Dans lés manufactures réglées, on fait fécher les
laines fur des perches pofées dans des greniers. Il en
eft de même des laines teintes deftinées à des draps
& autres étoffes , lorfqu’elles ont befoin de fécher
avant que d’être tranfmifes à d’autres opérations relatives
à la fabrication. Voyeç fig. 3 . la difpofition
des perches fur lefquelies on étend 6c l’on fait fécher
les laines teintes ou en blanc, A , A , A , 6cc. B , B9
B , les perches.
Du triage des laines. Lorfque les laines font feches,'
on en fait un triage ; c’eft-à-dire qu’on divife les laines
d’Efpagne de la première qualité, en prime, fécondé
& tierce. Pour celle de Navarre & de France
& autres plus communes,-on fépare feulement les
inférieures des autres.
Lafineffe du drap eft proportionnée’à la qualité
de la laini\ il faut pour les draps d’Abbeville & de
Sedan des laines plus belles que pour ceux de Lou-
viers & de d’Arnetat. Les laines qu’on emploie aux
draps d’EIbeuf, font inférieures à celles du drap de
Louvier. On exige dans la fabrication des ouvrages
dont nous venons de parler, l’emploi des laines
d’Efpagne feulés.
Après lé premier triage des laines communes de
Navarre & de France, on en fait un fécond qui con-
fifte à féparer les laines les plus longues des plus
courtes. Les premières font deftinées aux chaînes
des étoffes, les fécondés aux trames. Il faut encore
que le trieur foit attentif à en rejetter les ordures
qu’il rencontre fous fes mains. Voye^fig. iv. cette
opération. A eft la claie fur laquelle la laine eft po*'
fée ; B , la laine ; C , le trieur.
Le manufafturier donne le nom de haute laine à
la laine longue, & celui de baffe laine a la laine courte.
On emploie la haute laine aux chaînes, parce que
le fil en aura plus de confiftence, & que le travail
de l’ourdiffeur en fera facilité. On ne diftingue point
de haute & baffe laine dans celles d’Elpagne, & l’ori
n’en fait point de triage.
Le triage & le choix ont lieu pour toutes les autres,
quelle que foit leur deftination; qu’elles doivent
aller à la carde ou au peigne. Nous allons fui-
vre la main-d’oeuvre fur celles qui pafferont à la
carde, & dont on fabrique les draps. Nous reviendrons
enfuite à celles qui vont au peigne, & nous
expoferons leur ufage.
Du battage des laines. Lorfque les laines ont été
triées, & que la féparation en a été faite, on les
porte par petites portions fur une éfpecé de claie *
formée de cordes tendues oh on les frappe à coups
dé baguette, comme on voit s figi v. A eft la claie'
de corde à battre les laines ; les ouvriers B , B font
deux batteurs.
Cette manoeuvre a deux objets. Le premier d’où-
yrir la laine ou d’en écarter les brins les uns des au