autrefois de la Numidie en Afrique, raifon pour laquelle
les anciens l'appelloient Lapis Numidicus ; il
s’en trouve de rouge, de verd 6c de gris. Le porphyre
rouge eft fort dur ; fa couleur ell d’un rouge
fonce, couleur de lie de v in , femé de petites taches
blanches, 6c reçoit très-bien le poli. Les plus grands
morceaux que l’on en voye à préfent, font le tombeau
de Bacchus dans l’églile de fainte Confiance,
près celle de fainte Agnès hors les murs de Rome ;
celui de Patricius & de 1a femme dans l’églife de
fainte Marie majeure; celui qui ell fous le porche
de la Rotonde, 6c dans l’intérieur une partie du pav
é ; une frife corinthienne , plufieurs tables dans
les compartimens du lambris ; huit colonnes aux petits
autels, ainfi que plufieurs autres colonnes, tombeaux
6c vafes que l’on conferve à Rome. Les plus
grands morceaux que l’on voye en France, font la
cuve du roi Dagobert, dans l’églife de faint Denis
en France, & quelques bulles, tables ou vafes dans
les magafins du roi. Le plus beau ell celui dont le
rouge ell le plus v if, 6c les taches les plus blanches
6c les plus petites. Le porphyre verd, qui ell beaucoup
plus rare, a la même dureté que le précédent,
& cil entremêlé de petites taches vertes 6c de petits
points gris. On en voit encore quelques tables, 6c
quelques vafes. Le porphyre gris ell tacheté de noir
6c ell beaucoup plus tendre.
Le ferpentin, appellé par les anciens ophitts, du
grec oçiç, ferpent, à caufe de fa couleur qui imite
celle de la peau d’un ferpent, fe tiroit anciennement
des carrières d’Egypte. Ce marbre tient beaucoup
de la dureté du porphyre ; fa couleur ell d’un verd
brun, mêlée de quelques taches quarrées & rondes,
ainfi que de quelques veines jaunes, 6c d’un verd
pâle couleur de ciboule. Sa rareté fait qu’on ne l’emploie
que par incrullation. Les plus grands morceaux
que Fon en voit, font deux colonnes dans l’églife
de S. Laurent, in Lucina, à Rome, 6c quelques
tables dans les compartimens de pavés, ou de lem-
bris de plufieurs édifices antiques, tel que dans l’intérieur
du panthéon, quelques petites colonnes corinthiennes
au tabernacle de l’églife des Carmélites
de la ville de Lyon, 6c quelques tables dans les ap-
partemens 6c dans les magafins du roi.
L’albâtre, du grec a\a@ci<rrpuv, ell un marbre blanc
& tranfparent, ou varié de plufieurs couleurs, qui
fe tire des Alpes 6c des Pyrénées ; il ell fort tendre
au fortir de la carrière, 6c fe durcit beaucoup à l’air.
11 y en a de plufieurs efpeces, le blanc , le varié, le
moutahuto, le violet & le roquebrue.L’albâtre blanc
lert à faire des vafes, figures & autres ornemens de
moyenne grandeur. Le varié fe divife en trois efpeces
; la première fe nomme oriental; la fécondé le
fleuri, 6c la troifieme lagatato. L’oriental fe divife
encore en deux, dont l’une, en forme d’agate , ell
mêlée de veines rofes, jaunes, bleues, 6c de blanc
pâle,- on voit dans la galerie de Verfailles plufieurs
vafes de ce marbre, de moyenne grandeur. L'autre
ell ondé & mêlé de veines grifes 6c rouffes par longues
bandes. Il fe trouve dans le bofquet de l’étoile
à Verfailles, une colonne ionique de cette efpece
de marbre, qui porte un bulle d’Alexandre. L’albâtre
fleuri ell de deux efpeces ; l’une ell tachetée de
toutes fortes de couleurs, comme des fleurs d’oii il
tire fon nom ; l’autre, veiné en forme d’agate, ell
glacé & tranfparent; il fe trouve encore dans ce
genre d’albâtre qu’on appelle en Italie à pecores,
parce que ces taches relfemblent en quelque forte à
des moutons que l’on peint dans les payfages. L’albâtre
agatato ell de même que l’albâtre oriental ;
mais dont les couleurs font plus pâles. L’albâtre de
moutahuto ell fort tendre ; mais cependant plus dur
que les agates d’Allemagne, auxquelles il reffem-
bie. Sa couleur ell d’un fond brun, mêlée de veine
grife qui femble imiter des figures de cartes géographiques;
il s’en trouve une table de cette efpece
dans lcfallon qui précédé la galerie deTrianon. L ’albâtre
violet ell ondé 6c tranfparent. L’albâtre de
Roquebrue, qui fe tire du pays de ce nom en Languedoc
, ell beaucoup plus dur que les précédens ;
la couleur ell d’un gris foncé 6c d’un rouge brun par
grandes taches ; ily a de toutes ces efpeces de marbres
dans les appartemens du roi, foit en tables, figures,
vafes, &c.
Le granit, ainfi appellé, parce qu’il ell marqué
de petites taches formées de plufieurs grains de fables
condenfés, ell très-dur 6c reçoit mal le poli ; il
ell évident qu’il n’y a point de marbre dont les anciens
n’ayent tiré de fi grands morceaux, & en fi
grande quantité ; puifque la plupart des édifices de
Rome,jufqu’auxmaifons des particuliers, en étoient
décorés. Ce marbre étoit fans doute très-commun,
par la quantité des troncs de colonnes qui fervent
encore aujourd’hui de bornes dans tous les quartiers
de la ville. Il en ell de plufieurs efpeces ; celui d’Eg
ypte, d’Italie & de Dauphiné ; le verd 6c le violet.
Le granit d’Egypte, connu fous le nom de Thebaï-
cum marrnor, 6c qui fe tiroit de la Thébaïde, ell d’un
fond blanc fale , mêlé de petites taches grifes &
verdâtres, 6c prefque auffi dur que le porphyre. De
ce marbre font les colonnes de fainte Sophie à Con-
llantinople,qui paient 40 piés de hauteur. Le granit
d’Italie qui, i'elon M. Félibien, fe tiroit des carrières
de l’île d’Elbe, a des petites taches un peu verdâtres
, & ell moins dur que celui d’Egypte. De ce
marbre font les feize colonnes corinthiennes du porche
du Panthéon ; ainfi que plufieurs cuves de bains
fervant aujourd’hui à Rome de balfins de fontaines.
Le granit de Dauphiné qui fe tire des côtes du Rhône,
près de l’embouchure de Lifere, ell très-ancien, comme
il paroît par plufieurs colonnes qui font en Provence.
Le granit verd ell une efpece de ferpentin ou
verd antique, mêlé de petites taches blanches &
vertes ; on voit à Rome plufieurs colonnes de cette
efpece de marbre.* Le granit violet qui fe tire des
carrières d’Egypte, ell mêlé de blanc, 6c de violet
par petites taches. De ce marbre font la plupart des
obélifques antiques de Rome, tel que ceux de faint
Pierre du Vatican, de faint Jean de Latran, de la
porte du Peuple, 6c autres.
Ld marbre de jafpe, du grec voç, verd, ell de couleur
verdâtre, mêlé de petites taches rouges. Il y
a encore un jafpe antique noir 6c blanc par petites
taches, mais qui cil très-rare.
Le marbre de Paros fe tiroit autrefois d’une île de
l’Archipel, nommée ainfi , 6c qu’on appelle aujourd’hui
Péris ou Pari (Ja. Varron lui avoit donné le
nom de marbre lychnites, du grec hv%tuç, une lampe,
parce qu’on le tailloir dans les carrières à la lumière
des lampes. Sa couleur ell d’un blanc un peu jaune
& tranfparent, plus tendre que celui dont nous nous
fervons maintenant, approchant de l’albâtre, mais
pas fi blanc; la plupart des llatues antiques font de
ce marbre.
Le marbre verd antique, dont les carrières font
perdues, ell très-rare. Sa couleur ell mêlée d’un verd
de gazon, 6c d’un verd noir par taches d’inégales
formes 6c grandeur ; il n’en relie que quelques chambranles
dans le vieux château de Meudon.
Le marbre blanc 6>c noir , dont les carrières font
perdues, /ell mêlé par plaques de blanc très-pur, de
de noir très-noir. De ce marbre font deux petites
colonnes corinthiennes dans la chapelle de S. Roch
aux Mathurins, deux autres compofites dans celle
de Rollaing aux Feuillans rue S. Honoré, une belle
table au tombeau de Louis de la Trémouille aux
Célellins , ainfi que les piéd’eftaux 6c le parement
d’autel de la chapelle de S, Benoît dans l ’églife de
S. Denys en France, qui en font incrullés.
Le marbre de petit antique ell de cette derniere
efpece, c’elt-à-dire blanc & noir ; mais plus brouillé,
& par petites veines, relfemblant au marbre de Bar-
bançon. On en voit deux petites colonnes ioniques
dans le petit appartement des bains à Verfailles.
Le marbre de brocatelle fe tiroit autrefois près
d’Andrinople en Grece : fa couleur ell mêlée de petites
nuances grifes, rouges, pâles , jaunes , & ifa-
belles : les dix petites colonnes corinthiennes du tabernacle
des Mathurins, ainfi que les huit compofites
de celui de fainte Génevieve , font de ce marbre.
On en voit encore quelques chambranles de
cheminées dans les appartemens de Trianon, &
quelques tables de moyenne gràndeur dans les ma-
gazins du roi.
Le marbre africain ell tacheté de rouge brun,
mêlé de quelques veines de blanc fale, 6c de couleur
de chair, avec quelques filets d’un verd foncé.
Il fe trouve quatre confolles de ce marbre en maniéré
de cartouche , au tombeau du marquis de Gef-
vres dans l’égîife des peres Célellins à Paris. Sca-
mozzi parle d’un autre marbre africain t rè s -d u r ,
recevant un très-beau p o li, d’un fond blanc, mêlé
de couleur de chair, & quelquefois couleur de fang,
avec des veines brunes 6c noires fort déliées, 6c
ondées.
Le marbre noir antique étoit de deux efpeces ;
J’un qui fe nommoit marlnor luculleum, 6c qui fe tiroit
de Grece, étoit fort tendre. C ’ell de ce marbre
que Marcus Scaurus fit tailler des colonnes*de trente-
huit piés de hauteur, dont il orna fon palais ; l’autre
appellé par les Grecs fiaXtrcmt, pierre de touche , &
par les Italiens, pietra di paragone , pierre de com-
paraifon, que Vitruve nomme index ; parce qu’il
fert à éprouver les m étaux, fe tiroit de l’Ethiopie ,
& étoit plus eftimé que le premier : ce marbre etoit
.d’un noir gris tirant fur le fer. Vefpafien en fit faire
la figure du N il, accompagnée de celle des petits
enfans, qui fignifioient les crues &c recrues de ce
fleuve , & qui de fon tems fut pofée dans le temple
de la paix. De ce marbre font encore à Rome deux
fphynx au bas du Capitole ; dans le vellibule de l’o rangerie
de Verfailles une figure de reine d’Egypte ;
dans l’églife des peres Jacobins rue S. Jacques à
Paris, quelques anciens tombeaux, ainfi que quelques
vafes dans les jardins de Meudon.
Le marbre de cipolin, de l’italien cipolino, que
Scamozzi croit être celui que les anciens appelaient
auguftum ou tiberium marmor, parce qu’il fut découvert
en Egypte du tems d’Augulle 6c Tibere , ell
formé de grandes ondes ou de nuances de blanc, 6c
de vert pale couleur d’eau de mer ou de ciboule,
d’où il tire fon nom. On ne I’employoit anciennement
que pour des colonnes ou piiaflres.. Celles que
le roi fit apporter de Lebeda autrefois Leptis, près
de Tripoli, fur les côtes de Barbarie , ainfi que lés
dix corinthiennes du temple d’Antonin 6c de Fau-
ftine, femblent être de ce marbre. On en voit encore
plufieurs pilallres dans la chapelle de l’hôtel
de Conti, près le collège Mazarin , du deflein de
François Manfard.
Le marbre jaune eft de deux efpeces ; l’une ap-
pellée jaune de fienne, eft d’un jaune ifabelle, fans
vein e, & eft très-rare : auffi ne l’emploie-t-on que
par incrullation dans les compartimens. On voit de
ce marbre dans le fallon des bains de la reine au
Louvre, des fcabellons de bulles, qui fans doute
font très-précieux. L ’autre appellée dorée, plus jaune
que le précédent, ell celui à qui Paufanias a donné
le nom de marmor croceum, à caufe de fa couleur de
fafran : il fe tiroit près de la Macédoine ; les bains
publics de cette ville en étoient conftruits. Il fe
trouve encore à Rome dans la chadelle du mont de
Tome IX ,
piete, qilatre niches incrullées de ce ittarbre.
Le marbre de bigioncro, dont les carrières font
perdues , ell très-rare. Il y en a quelques morceaux
dans les magazins du roi.
Le marbre de lumachello, appellé ainfi , parce
que fa couleur eft mêlée de taches blanches , noires
& grifes, formées en coquilles de limaçon, d’où
il tire Ion nom, eft très-rare, les carrières en étant
perdues: on en voit cependant quelques tables dans
les appartemens du roi.
Le marbre de piccinifeo , dont les carrières font
auffi perdues, eft veiné de blanc , 6c d’une couleur
approchante de l’ifabelle : les quatorze colonnes corinthiennes
des chapelles de l’églife de la Rotonde
à Rome , font de ce marbre.
Le marbre de breche antique, dont les carrières
font perdues, eft mêlé par tache ronde de différente
grandeur, de blanc ,. de noir, de rouge, de bleu &
de gris. Les deux corps d’architeélure qui portent
1 entablement où font nichées les deux colonnes de
la fépulture de Jacques de Rouvré, grand-prieur de
France, dans l’églile de S. Jean de Latran à Paris,
font de ce marbre.
Le marbre de breche antique d’Italie, dont les
carrières font encore perdues, eft blanc, noir, 6c
gris : le parement d’autel de la chapelle de S. Denys
à Montmartre, eft de ce marbre.
Des marbres modernes. Le marbre blanc qui fe tire
maintenant de Carrare, vers les côtes de Gènes, eft
dur 6c fort blanc, & très-propre aux ouvrages de
fculpture. On en tire des blocs de telle grandeur que
l’on veut ; il s’y rencontre quelquefois des cryftal-
lins durs. La plupart des figures modernes du petit
parc de Verfailles font de ce marbre.
Le marbre de Carrare, que l’on nomme marbre
vierge, eft blanc, & fe tire des Pyrénées du côté de
Bayonne. Il a le grain moins fin que le dernier, reluit
comme une efpece de fe l, 6c reffemble au marbre
blanc antique, dont toutes les ftatues de la Grece
ont été faites ; mais il eft plus tendre, pas fi beau
fujet à jaunir & à fe tacher : on s’en fert pour des
ouvrages de fculpture.
Le marbre noir moderne eft pur & fans tache,
comme l’antique ; mais beaucoup plus dur.
Le marbre de Dinant, quife tire près de la ville
de ce nom dans le pays de Liège, eft fort commun
6c d’un noirfrès-pur & très-beau: on s’en fert pour
les tombeaux & fépultures. Il y a quatre colonnes
corinthiennes au maître autel de l’églife de S. Martin-
des-Champs, du deffein de François Manfard; fix
colonnes de même ordre au grand autel de S. Louis
des peres Jéfuites, rue S. Antoine, quatre autres
de même ordre dans l’églife des peres Carmes déchauffés
; & quatre autres compofites à l’autel de
fainte Thérefe de la même églilë, font de ce marbre.
Les plus belles colonnes qui en font faites, font
les fix corinthiennes du maître autel des Minimes
de la Place royale à Paris.
Le marbre de Namur eft auffi fort commun , &
auffi noir que celui de Dinant, mais pas fi parfait,
tirant Un peu fur le bleuâtre, 6c étant traverfé de
quelques filets gris : on en fait un grand commerce de
carreau en Hollande.
Le marbre de Thée qui fe tire du pays de Liege
du côté de Namur , eft d’un noir pur, tendre, & facile
à tailler ; recevant un plus beau poli que celui
de Namur & de Dinant. Il eft par conféquent très-
propre aux ouvrages de fculpture. On ‘en voit quelques
chapiteaux corinthiens dans les églifes de Flandres
, 6c plufieurs têtes & bulles à Paris.
Le marbre blanc veiné qui vient de Carrare, eft
d’un bleu foncé fur un fond blanc, mêlé de taches
grifes & de grandes veines. Ce marbre eft fujet à
jaunir & à fe tacher. On en fait des piédeftaux, en-
L L 111 ij