teur. Il eft bon d’en avertir les curieux, pour qu’ils
n’y jfoient pas trompés.
Les jeux publics marqués ordinairement par des
vafes, d’où il fort des palmes ou des couronnes, ne
fe diftinguent que par la Légende, qui contient ou le
nom de celui qui les a inftitués, ou de celui en l’honneur
duquel on les célébroit. Ainfi l’on apprend que
Néron fut l’auteur des jeux qui fe dévoient donner
à Rome de cinq en cinq ans, par la médaille où l’on
lit , Ctrtamcn Quinquennale Romce Conji'uutum. Par
la légende du revers de la médaille de Caracalla,
WHTf.owoA. Avuvpctç AtKhHTriet. CwTJtp/st iixô. ; on apprend
qu’à Ancyre en Galatie on célébroit en l’honneur
d’Efculape, dit le Sauveur, les mêmes jeux qui
fe célébroient dans l’ifthme de Corinthe en l’honneur
d’Apollon ; qu’on confulte là-deffus les lettres
de Spanheim, publiées par M. Morel dans le projet
qu’il nous a donné du plus beau deffein qu’on ait
jamais formé pour la fatisfaâion des curieux.
On trouvera dans ce projet, Specimen univerfez réi
,nummarioe, les légendes qui expriment les principaux
jeux des anciens , & les lavantes remarques que
M. de Spanheim a faites fur ce fujet ; on nommoit
Kafiufiet , ceux qui fe failoient.à Theffaloniqtie en
l’honneur des Cabires ; ©eo-ra^u* , ceux qui fe célébroient
principalement en Sicile , pour honorer le
mariage de Proferpine & de Pluton ; CsouMpe/», ceux
quiavoient été inftitués par Septime Severe ; Ko/xo-
S'ubl , ceux qu’on faifoit par l’ordre de Commode, &c.
On trouve auffi les jeux marqués fur les médailles
latines avec le temsde leur célébration. Nous avons
fur la médaille de Memmius , Ced. Cerialia primus
fecit. Nous trouvons fur-tout des jeux féculaires qui
fe célébroient à la fin de chaque fiecle , marqués
avec grand foin fur les médailles , Ludos Sæculares
Fecit, dans celles de Domitien ; Sæculares Aug. ou
Augg. dans Philippe, &c. Les types en font diffé-
rens ; tantôt ils expriment des faerifices, tantôt des
combats, tantôt des animaux extraordinaires, dont
on donnoit le fpe&acle au peuple dans ces jeux.
4°. Les voeux publics pour les empereurs, & qui
font marqués fur plufieurs médailles, foit en légende,
foit en infeription , ont fait nommer ces fortes de
médailles, médailles votives. Foye{Médailles V o t
iv e s .
50. L’une des chofes les plus curieufes que les
médailles nous apprennent par les légendes, ce font
les différens titres que les empereurs ont pris , félon
qu’ils ont vu leur puiflance plus ou moins affermie.
Jules-Céfar n’ofa jamais revêtir ni le titre de roi, ni
I fw llffilfiS I I 1 celui de feigneur , il fe contenta de celui d’ Impcrator,
Diclatorperpetuus, Pater Patrice. Ses fucceffeurs
réunirent infenfiblement à leur dignité le pouvoir
de toutes les charges. On les vit fouverains pontifes,
tribuns , confuls , proconfuls , cenfeurs , augures.
Je ne parle que des magiftratureé ; car , pour les
H I I • qualités , .elles devinrent arbitraires , & le peuple
s’accoutumant peu-à-peu à lafervitude, laiffa prendre
au fouverain tel nom que bon lui fembla, même
ceux des divinités qu’il adoroit : témoin Hercules
Romanus, dans Commode; Sol Dominas Imperii Romani
, dans Aurélien ; fi toutefois ce nom eft donné
au prince, & non pas au foleil même , qui fe trouve
fi fouvent fur les médailles, Soit inviclo Corniti. _
Augufte ne fe nomma d’abord que Coefar Divi Films
, & puis lmperator , enfuite Triumvir Reipubliccz
Conjlituendoe, enfuite Auguflus ; enfin il y ajouta la
puiflance de tribun qui le faifoit fouverain. Caligula
garda les trois noms, lmp. Ccef. Aug. Claude y ajouta
le titre de Cenfor. Domitien fe fit Cenfor Perpetuus,
fans que depuis lui on puiffe rencontrer cette qualité
fur les médailles. Aurélien, ou, félon d’autres, OEmi-
lien, s’arrogea le titre de Dominus, que les provinces
accordèrent à Septime Severe & à fes enfans. Après
Carus \ cette qualité devint commune à tous les empereurs
, jufqu’à ce que ceux d’Orient prirent le
nom de rois des Romains, Batr/Atoc Vu/xaiav. Il ell
bon d’apprendre ici que les Grecs donnèrent quelquefois
ce même nom aux Céfars, quoiqu’ils n’ayent
jamais fouffert qu’ils prifl'ent celui de Rex en latin.
Le titre de NobiliJJimùs Ccefar donné au prince defti-
né à l’empire , ne fe vit pas pour la première fois
fur les médailles 'de Philippe le jeune , comme tous
les antiquaires l’ont cru ; M. l’abbé Belley prouve
dans Vkifloire de Vacad. des Infcrip. que ce titre parut
dès le régné de Macrin fur les médailles de Dia-
dumenien.
L’ambition des princes grecs & la flatterie de leurs
fujets nous fourniffent fur leurs médailles une grande
quantité de titres , qui font inconnus aux empereurs
latins , BaavAeüç, BctciMuv, Nicator, Nicephorus, Ever-
getes , Eupator , Soter , Epiphanes, Ce^aunus, Calli-
nie us , Dionyjius .Theopator. Ils ont été auffi bien
moins fcrupuleux que les Latins à fe faire donner le
nom de dieu. Démétrius s’étant appellé, ®toç Nurarop J
Antiochus, ©eof E7i-;ç£tp«< N/K»9opof ; un autre Démétrius
, ®^oç $/Ae7rctTop 2oT«p. Ils ne faifoient pas nofl
plus difficulté d’adopter les fymboles des divinités ,
comme le foudre & les cornes de Jupiter Hammon,
avec la peau de lion d’Hercule. Tous les fucceffeurs
d’Alexandre s’en firent même un point d’honneur.
Les princeffes reçurent la qualité d’Augujla dès le
haut empire, Julia Augujla , Antonia Agrippina, & c .
On la trouve même fur les médailles de celles qui
ne furent jamais femmes d’empereurs, Julia Titiy
Marciana, Matidia , & C . Le titre de Mater Senatus
& Mater Patrice fe voient fur les médailles d’or ÔC
d’argent, de grand & de moyen bronze de Julie,
femme de Septime Severe, dont le revers repréfente
une femme aflife , ou une femme debout, tenant
d’une main un rameau, & de l’autre un bâton ou
une hafte, avec ces mots en abrégé , Mat. Augg.
Mat. Sen. Mat. Pat.
6°. Les alliances fe trouvent aufli marquées dans
les légendes à la fuite des noms , & ilon feulement
les alliances par adoption qui donnoient droit de
porter le nom de fils, mais celles mêmes qui ne pro-
curoient que le titre de neveu & de niece. Nous
n’entrerons point dans ce détail affez connu, ce qui
d’ailleurs feroit long & ennuyeux.
7°. Les légendes nous découvrent encore le peu
de tems que duroit la réconnoiffance de ceux qui
ayant,reçu l’empire de leur pere , de leur mere, ou
de leur prédeceffeur qui les avoit adoptés, quit-
toient bientôt après le nom & la qualité de fils qu’ils
-avoient pris d’abord avec empreffement. Trajan
joignit à fon nom celui de Nerva qui l’avoit adopté,
mais peu de tems après il ne porta plus que celui
de Trajan. D ’abord c’étoit Nerva Trajanus Hadria-
nus y bientôt ce fut Hadrianus tout feul : & le bon
Antonin, qui s’appelloit au commencement de fon
régné Titus Ælius Hadrianus Antoninus , s’appella
peu après Antoninus Augujlus Pius ; cependant la
vanité & l’ambition leur faifoit quelquefois garder
des noms auxquels ils n’a voient aucun droit, ni par
le fang , ni par le mérite. Ainfi celui d’Antonin a
été porté par fix empereurs jufqu’à Eliogabale : celui
de Trajan par D è c é , &c.
Ces noms propres devenus communs à plufieurs,
ont caufé beaucoup d’embarras aux antiquaires ;
parce que ces fortes de médailles ne portent aucune
époque , au lieu que les médailles grecques, beaucoup
plus exades, portent les furnoms, & marquent
les années , & par-là facilitent extrêmement la con-
noiffance de certains rois , dont on n’auroit jamais
bien débrouillé l’hiftoire fans ce fe cours-, comme
les Antiochus , les Ptolomées , & les autres.
8°. N’oublions pas d’ajouter que dans 1 es légendes
li I
xles médailles , on trouve fouvent le nom du ma-
giftrat fous lequel elles ont été frappées. M; Vaillant
s ’eft donné la peine de faire, le recueil des divers
noms de magiftrature grecque énoncés fur les médailles
, & d’expliquer les fondions de ces différentes
charges. Dans les médailles de colonies latines , on
voit les noms des duumvirs à .l’ablatif.
Il eft tems de parler de la pofition de la légende.
L’ordre naturel qui .la diftingue de l’infcription eft
qu’elle foit pofée fur le tour de la médaille, au-
dedans du grenetis , en commençant de la gauche à
la droite , & cela généralement dans toutes depuis
Nerva. Mais, dans les médailles des douze Céfars,
il eft affez ordinaire de les trouver marquées de la
droite à la gauche, ou même partie à gauche, partie
à droite.
Il y en a qui ne font que dans l’exergue, De Germants
, De.Sarmatis, & c . Il y en a qui font en deux
lignes parallèles, l’une au-deffus du typ e , & l’autre
au-deffous , comme dans JuléSÿr II y en a dans le
même empereur pofées en-travers , & comme en
fautoir. Il y en a en pa l,,comme dans une médaille
de Jules, où la tête de Marc-Antoine fert de revers.
Il y en a au milieu du champ, coupées par la figure
comme dans un revers de Marc-Antoine, qui repréfente
un fort beau trophée. On voit un autre revers
du même, où un grand palmier au milieu d’une couronne
de lierre coupe ces mots , Alexand. Ægyp.
Enfin il y en a en baudrier, comme dans Jules ; tout
cela prouve que la chofe a toujours dépendu de la
fantaifie de l’ouvrier.
C ’eft particulièrement fur les grandes médailles
grecques qu’on trouve les pofitions de légendes les
plus bifarres, fur-tout quand il y a plus d’un cercle,
i l n’eft point de maniéré de placer, de trancher, de
partager les mots & de féparer les lettres que l’on
n’y rencontre : ce qui donne bien de la peine à ceux
qui ne font pas affez intelligens pour les bien démêler.
On pourroit être trompé à certaines médailles
où la légende eft écrite à la maniéré des Hébreux,
les lettres pofées de la droite à gauche. Celle du roi
Gelas eft de cette forte xAAai. Quelques-unes de
Palerme d’autres de Céfarée , c’eft ce qui a fait
croire à quelques-uns que l’on avoit autrefois nommé
Céfarée, aa<Pteat au lieu de Flavia, $a a . La médaille
de Lipari eft du même genre ; on a été long-
tems fans l’entendre, parce qu’on y lit n iA pour
Ain.
Il ne paroît donc pas que les anciens ayent fuivi
de réglés fixes dans la maniéré de placer les légendes
fur les médailles, & de plus toutes leurs médailles
n’ont pas des légendes ; car encore qu’il foit vrai
que la légende eft l’ame de la médaille , il fe trouve
cependant quelques corps fans âmes, non feulement
dans les confulaires , mais aufli dans les impériales,
c’eft-à-dire, des médailles fans légende, ni du côté
de la tête, ni du côté du revers ; par exemple, dans
la famille- Julia, la tête de Jules fe trouve fouvent
fans légende. On voit aufli des revers fans légende ,
Sc fur-tout dans cette même famille. Une médaille
qui porte d’un côté la tête de la Piété avec la cigogne
, & de l’autre une couronne qui enferme un
bâton augurai & un vafe de facrificateur, eft fans
aucune légende.
Il s ’en trouve qui ne font que demi-animées,
pour parler ainfi, parce que l’un des côtés eft fans
légende, tantôt celui de la tête & tantôt celui du revers.
Nous avons plufieurs têtes d’Augufte fans infeription
, comme celle qui porte au revers la ftatue
• equeftre que le fénat fit ériger en fon honneur, avec
ce m ot, Coefar Divi filius. Nous avons aufli une infinité
de revers fans légende, quelquefois même des
revers confidérables pour la Angularité du type, ôc
pbur le nombre des figures ; je crois qu’on peut mettre
dans ce nombre ceux qui ne portentque le nom
du monétaire , ou le fimple S. C. puifque ni ce nom,
ni ces lettres ne contribuent en rien à expliquer le
type. Telles que font trois ou quatre belles médailles
de Pompee, avec des revers très-curieux, qui
n ont que le nom de M. Minatius Sabinus proquejlor.
Deux de JulesCéfar, 'dont l’une chargéed’un globe,
de faifceaux, d’une hache., d’un caducée & d e deux
mains jointes, n’a que le nom L. Buca. L’autre qui
porte une aigle militaire, une figure aflife tenant
une branche de laurier ou d’olivier, couronnée par
derrière par une Vittoire en pié, n’a que ex S. C.
Une de Galba, dont le revers eft une allocution de
fix figures, que quelques-uns croyent marquer l’adoption
de Pifon, fe trouve aufli fans aucune légende.
Les favans difent que le coin eft moderne, &
que la véritable médaille porte Allocutio.
Pour celles qui fe trouvent avec les feules légen*
des fans tête , on les met dans la claffe des inconnues
ou des médailles incertaines, & on les abandonne
aux conjeûures des favans. Voye^ Médaille
fans tête.
Il manqueroit quelque chofe d’important à ce
difeours, fi je ne difois rien des deux langues fa vantes
, la latine ôc la greque, dans lefquelles font écrites
les légendes & les inferiptions des médailles antiques.
Mais je dois obferver d’abord que la langue ne
fuit pas toujours le pays, puifque nous voyons quantité
de médailles impériales frappées en Grece ou
dans les Gaules, dont les légendes font en latin ; car
le latin a toujours été la langue dominante dans
tous les pays où les Romains ont été les maîtres ; 5c
depuis même que le latin eft devenu une langue
morte, par la deftruûion de la monarchie romaine,
il ne laiffe pas de fe çonferver pour tous les.monu-
mens publics & pour toutes les monnoies confidérables
dans tous les états de l’Empire chrétien.
Il y a des médailles frappées dans les colonies ,
dont la tête porte l’ infcription en latin, & le revers
l’infcription en grec. Le P. Jobert parle d’unHofti-
cien M. B. qui d’un côté porte TetîorovaMuç oeriXictvoc
kguivtoç , avec la tête du prince rayonnée, & de l’autre
côté Col. P. T. Coef. Metr. La tête du génie de
la ville eft furmonté d’un petit château tout entier ;
c’eft Céfarée de Paleftine. Enfin, les médailles, dont
les légendes font en deux langues différentes, ne font
pas extrêmement rares ; témoin celles d’Antioche,
où l’on trouve des légendes latines du côté des têtes
de Claude, de Néron & de Galba, & des légendes
greques au revers.
Le grec eft, comme je l’ai dit, l’autre langue fa-
vante dont on s’eftfervi le plus univerfellement fur
les médailles. Les Romains ont toujours eu du refi-
pett pour cette langue, & fe font fait une gloire de
l’entendre & de la parler. C’eft pourquoi ils n’ont
pas trouvé mauvais que non feulement les villes de
l’Orient, mais toutes celles où il y avoit eu des
Grecs, la confervaffent fur leurs médailles. Ainfi les
médailles de Sicile & de plufieurs villes d’Italie ;
celles «des Provinces, & de tout le pays qu’on appel-
loit la grande Grece, portent toutes des légendes greques,
& ces fortes de médailles font une partie fi
confidérable de la fcience des Antiquaires , qu’il eft
impoflible d’être un parfait curieux, fi l’on n’entend
le grec comme le latin, & l’ancienne Géographie
auffi-bien que la nouvelle.
Il ne nous refte plus, pour completter cet article,
qu’à faire quelques obfervations fur les lettres initiales
des légendes.
i°. Il paroît qu’à proprement parler, les'lettres
initiales font celles qui étant uniques, lignifient un
mot entier. Dès qu’on en joint plufieurs, ce font
Y y ij