
dans la vérité elle eût été introduite par l’empereur
Conftantin ; mais Juftinien y fit plufieurs change-
mens, c’eft pourquoi il regardoit cette forme comme
étant de fon invention.
Cette forme dq légitimation celle qu’il appelle
per dotalia inflrumenta, parce que dans ce cas le feul
confentement n’étoit pas fuffifant pour la validité du
mariage; il falloit qu’il y eût un contrat rédigé par
écrit Sc des pa&es dotaux.
II ordonna donc que quand un homme épouferoit
une femme libre ou affranchie qu’il pouvoit avoir
-pour concubine, foit qu’il eût déjà des enfans légitimes,
ou qu’il eût feulement des enfans naturels de
cette femme, que ces enfans naturelsdeviendroient
légitimes par lë mariage fubféquent.
La même chofe a lieu .parmi nous, & comme
pour opérer cette légitimation, il faut que le pere
naturel puiffe contrarier mariage avec la perfonne
dont il a eu des enfans ; les bâtards adultérins Sc in-
ceftueux ne peuvent être légitimés par ce moyen,
mais feulement par lettres du prince.
Néanmoins fi un homme marié époufoit encore
une femme, Sc que celle-ci fût dans la bonne fo i, les
enfans ftroient légitimes, cap, ex tcnort extra qui filii
Jintlegitimi.
Il y avoit chez les Romains une cinquième forme
de légitimation ; c’étoit celle qui fe fait per oblationtm
■ curia ; c’eft-àdire lorfque le bâtard étoit aggrégé à
l ’ordre des décurions ou confeillers des villes, dont
1 état devint fi pénible, que pour les encourager on
leur accorda divers privilèges, du nombre defquels
etoir celui-ci: ce privilège s’étendoit aufïï aux filles
naturelles qui époufoient des décurions. Cette maniéré
de légitimer fut introduite par Théodofe le
Grand, ainfi que le remarque Juftinien dans fa no-
velle 89 ; elle n’eft point en ufage parmi nous.
La légitimation par mariage fubféquent, a été ad-
rnife par le Droit canon ; elle n’efi pas de droit djk
v in , n’ayant été admife que par le droit pofitif des
décrétales, fuivant un refcrit d’Alexandre III. de
l’an 1 18 1 , au titre des décrétales, qui filii fine légitimé
Cet ufage n’a même pas été reçu dans toute l’E-
glife ; Dumolin , Fleta, Selden Sc autres auteurs ,
affurent que la légitimation par mariage fubféquent,
n’a point d’effet en Angleterre par rapport aux fuc-
ceflîons, mais feulementpourla capacité d’être promu
aux ordres facrés.
Quelque difpenfe que la cour de Rome accorde
pour les mariages entre ceux qui ont commis ineef-
tes ou adultérés, & quelque claufe qui fe trouve
dans ces difpenfes pour la légitimation des enfans nés
de telles conjonctions, ces claufes de légitimation
font toujours regardées comme abufives ; elles font
contraires à la difpofition du concile de Trente, Sc
ne peuvent opérer qu’une fimple difpenfe quoadfpi-
ritualia, à l’effet feulement de rendre ces enfans capables
des minifteres de l’Eglife. Voye{ les Mém. du
clergé, tome V. pag. 858. Sc fuiv.
Les empereurs voulant gratifier certaines familles,
leur ont accordé la faculté de légitimer tous bâtards,
Sc de les rendre capables de fucceffions, en dérogeant
aux lois de l ’empire & à toutes les çonftitu-
tions de l’empire comprifes dans le corps des authentiques.
11 y en a un exemple fous Louis de Bavière
quatrième du nom, lequel par des lettres données
à Trente le 20 Janvier 1330, donna pouvoir à
nobles hommes Tentalde, fils de Gauthier,Suard &
à Maffée,fils d’Odaxes de Forêts de Bergame, Sc à
leurs héritiers Sc fucceffeurs en ligne mafculine, de
légitimer dans toute l’Italie toutes fortes de bâtards
même ceux defcendus d’inceftes ; en forte qu’ils
puffent être appellés aux fucceffions , être inftitués
héritiers & rendus capables de donation ,nonobftant
les lois contraires contenues aux authentiques.
II. y a dans l’empire un titre de comte palatin ,
qui n’a rien de commun avec celui des princes palatins
du Rhin ; c ’eft une dignité dont l’empereur décore
quelquefois des gens de Lettres. L’empereur
leur donne ordinairement le pouvoir de faire des:
do&eurs, de créer des notaires , de légitimer des bâtards
; Sc un auteur qui a écrit fur les affaires d’Allemagne
dit, que comme on ne refpe&e pas beaucoup
ces comtes, on fait encore moins de cas de
leurs produ&ibns, qui font fouvent vénales auffi-r
bien que la dignité même.
On voit dans les arrêts de Papon, qu’un de ces
comtes nommé Jean Navar, chevalier Sc comte pa-:
latin, fut condamné par arrêt du parlement de Tou-:
loufe, prononcé le 25 Mai 1462, à faire amende
honorable, à demander pardon au roi pour les abus
par lui commis en octroyant en France légitimation,
notariats Sc autres chofes , dont il avoit puiffanee
du pape contre l’autorité du roi; Sc que le tout fut
déclaré nul Sc abufif.
En France on ne connoit que deux maniérés de
légitimer les bâtards ; l’une de droit , qui eft par
mariage fubféquent ; l’autre de grâce, qui eft par
lettres du prince.
Le mariage fubféquent efface le vice de la naif-
fance, Sc met les bâtards au rang des enfans légitimes.
Ceux qui font ainfi légitimés jouiffent des
mêmes droits que s’ ils étoient nés légitimes; confé-
quemment ils fuccedent à tous leurs parens indiftin-
élement, Sc confidérés en toute occafion comme les.
autres enfans légitimes.
Le bâtard légitimé par mariage , jouit même du
droit d’aîneffe à l’exclufion des autres enfans qui
font nés confiante}, matrimonio, depuis fa légitimation -y
mais non pas à l’exclufion de ceux qui font nés auparavant,
parce qu’oii ne peut enlever à ces der->
niersle droit qui leur eft acquis. .
La légitimation par mariage fubféquent requiert
deux conditions.
La première, que le pere Sc la mere fuffent libres
de fe marier au tems de la conception de l’enfant,
au tems de fa naiflance, Sc dans le tems intermédiaire.
La fécondé, que le mariage ait été célébré en
face d’Eglife avec les formalités ordinaires.
La légitimation qui fe fait par lettres du prince eft
un droit de fouveraineté, ainfi qu’il eft dit dans une
inftrudion faite par Charles V. le 8 Mai 1372.
Nos rois ont cependant quelquefois permis à
certaines perfonnes de légitimer les bâtards. Le roi
Jean, par exemple , par des lettres du 26 Février
1061, permet à trois réformateurs généraux, qu’il
envoyoitdans le bailliage de Mâcon, dedans lesfé-
néchauffées de Touloufe , de Beaucaire & de Car-
caffonne, de donner des lettres de légitimation, foit
avec finance , ou fans finance, comme ils jugeroient
à propos.
De même Charles VI. en établiffant le duc de
Berrifon frere pour fon lieutenant dans le Languedoc
par des lettres du 19 Novembre 1380, lui donna
le pouvoir entre autres chofes, d’accorder des
lettres de Légitimation, & de faire payer finance aux
légitimés.
Les lettres de légitimation portent qu’en tous aétes
en jugement Sc dehors, l’impétrant fera tenu cenfé
Sc réputé légitime ; qu’il jouira des mêmes franchifes,
honneurs, privilèges Sc libertés, que les autres fu-
jets du roi ; qu’il pourra tenir Sc poffédertous biens ,
meubles Sc immeubles qui lui appartiendront par
dons ou acquêts, Sc qu’il pourra acquérir dans la
fuite ; recueillir toutes fucceffions Sc acceptions ,
dons entre-vifs, à caufe de mort ou autrement, pourvu
toutefois quant aux fucceffions, que ce foit du
confentement
confentement de fes parens ; de maniéré que ces lettres
n’habilitent à fuccéder qu’aux parens qui ont
confenti à leur cnregiftrement, & que la légitimar
don par lettres du prince, a bien moins d’effet que
celle qui a lieu par mariage fubféquent.
Les bâtards légitimés par lettres du prince acquièrent
le droit de porter le nom Sc les armes de
leur pere ; ils font feulement obligés de mettre dans
leurs armes une barre, pour les diftinguer des enfans
légitimes.
On a quelquefois accordédes lettres à des bâtards,
adultérins, mais ces exemples font rares.
Pour ce qui eft de la légitimation, ou plutôt de la
difpenfe, à l’effet de pouvoir être promu aux ordres
facrés Sc de pouvoir pefféder des bénéfices, il faut
fe pourvoir en la jurifdiftion eccléfiaftique.
Sur la légitimation, Voye^ ce qui eft dit dans Hen-
ry s , tom. I I I . liv. VI. chap. V, quefi. 27.
L É G I T IM E , légitima, feu portio lege débita,
( Jurifprud. ) eft une portion affurée par la loi fur la
part héréditaire que l’on auroit eu, fans les dilpofi-
tions entrevifs ou teftamentaires qui ont donné atteinte
à cette part.
La loi n’accorde cette portion qu’à l’héritier pré-
fomptif, auquel le défunt étoit naturellement oblige
de laiffer la fubfiftance, Sc qui pourroit intenter la
querelle d’inofficiofité.
Quelques auteurs, tels que le Brun en fon traité
des fucceffions , attribuent l’origine de la légitime à
la loi glicia ; nous ne favons pas précifément en quel
tems cette loi fut fa ite , comme il fera dit ci-après
au mot L o i , à l’article loi glicia. On voit feulement
que le jurifconfulte C a ïus , qui vivoit fous l’empire
de Marc-Aurele , fit un commentaire fur cette loi ;
mais il paroît que l’on a confondu la querelle d’inofficiofité
avec la légitime ; que la loi glicia n’intro-
duifit que la querelle d’inofficiofité, & que le droit
de légitime étoit déjà établi.
Papinien dit que la légitime eft quarta légitima
partis, ce qui nous indique l’origine de la légitimé.
Cujas avoue cependant en plufieurs endroits de fes
obfervations, qu’il n’a pu la découvrir ; mais Janus
Acofta, ad princ. inflitut. de inoff. tefiam. Sc d’après
lui Antoine Schultingius, in Jurifprud. antejyfii-
nianceayp. 3 81. prétendent avec affez de fondement
que la légitime tire fon origine de la loi falcidïa, faite
fous le triumvirat d’Augufte, laquelle permet à l'héritier
de retenir le quart de l’hérédité , quelque difpofition
que le:teftateur ait pu faire au contraire.
Et en effet le jurifconfulte Paulus , liv. IV. recept.
finten9tit. 5 . St Vulpien dans la loi 8. § £ & 14. ff.
de inoff. tefiam. difent pofitivement que la quarte fal-
cidieeft due aux héritiers qui pourroient intenter la
plainte Id’inofficiofité ; d’où il paroît qu’ancienne-
ment la légitime Sc la falcidie étoient la même chofe.
IÇ o y ei Q u a r t e f a l c i d i e .
Mais on ceffa de les confondre enfemble depuis
que Juftinien eut ordpnné par fes novelles 18 & 92,
que dorénavant la légitime:feroit du tiers s’il y avoit
quatre enfansou moins, & de la moitié s’il y avoit
cinq enfans ou davantage.
C’eft de ces novelles qu’a été tirée l’authentique
de triente Sc defèmiffe, qui dit que cette portion eft un
bienfait.de la loi &non pas du pere.
La légitime a lieu quand il y a des donations entrevifs
ou teftamentaires fi exceffives, que l’héritier
eft oblige d’en demander la réduction /pour avoir la
portion quela.loi luiafliire.
En pays coutumier , où l’inftitution n’a pas lieu ,
Sc où les teftamensne font proprement que des codi-
ciles, la querelle d’inofficiofité n’eft ordinairement
qu’une fimple demandeen légitime.
Celui qui eft donataire ou légataire, Sc qui ne fe
Tome IX*
trouve pas rempli de fa légitime, a l’aûion en fupplé«
men.
Le donataire contre lequel le légitimaife demande
la réduftion de la donation pour avoir fa légitime , a
une exception pour retenir fur fa donation, autant
qu’il lui lèroit dû à lui-même pour fa légitimek
La légitime eft un droit qui n’eft ouvert qu’à la
mort de celui fur les biens duquel elle eft dûe ; un
enfant ne peut, fous quelque prétexte que ce loit> en
demander une à fon pere de fon v ivant, même fous
prétexte que le pere auroit marié Sc doté, ou établi
autrement quelques autres enfans.
Pour être légitimaire il faut être héritier, & n’avoir
pas renoncé à la fucceffion ; Sc en effet les lois
romaines veulent que la Légitime foit laiflee non pas
quocumque titulo, mais à titre d’inftitution. En pays
coutumier, le légitimaire eft faifi de plein droit St
peut demander partage, Sc l’on traite avec lui de
même qu’avec un héritier, 1 comme il paroît par
l’imputation qui fe fait fur la légitime ; imputation
qui eft un véritable rapport par l’obligation de fournir
des corps héréditaires pour l î légitime , le jet dès
lots qui fe pratique avec le légitimaire, Sc la garantie
aâive & paffive qui a lieu entre lui Sc les autres
héritiers.
Cependant lorfque tous les biens de la fucceffion
ne fuffifent pas pour payer les dettes , l’enfant qui
veut avoir fa légitime , peut, fans fe porter héritier ,
la demander au dernier donataire.
Le fils aîné prend non-feulement fa légitime naturelle
, mais il la prend avec le préciput que la loi ac+
corde aux aînés.
La légitime eft quelquefois qualifiée de créance, cô
qui s’entend félon le Droit naturel ; car félon le
Droit c iv il, elle ne paffe qu’après toutes les dettes »
foit chirographaires ou hypothécaires ; elle a néanmoins
cet avantage qu’elle fe prend fur les immeubles
qui ont été donnés , avant que les dettes fuffent
çonftatées, Sc fur les meubles que le défunt a donné
de fon v ivant, au lieu que les créanciers n’ont aucun
droit fur ces biens.
Toute rénonciation à une fucceffion foit échue
Ou future , lorfqu’elle eft faite aliquo dqto, exclud
les enfans du renonçant de demander aucune part en
la fucceffion, même à titre de légitime.
Une rénonciation gratuite exclud pareillement
les enfans du renonçant, de pouvoir demander une
légitime, à moins que le renonçant ne fût fils unique *
parce qu’en ce cas fes enfans viennent de leur chef,
Sc non par repréfentation.
Une fille qui auroit renoncé par contrat de mariage
, pourroit néanmoins revenir pour fa légitime ,
fuppofé qu’elle fût mineure lors de fa rénonciation
, qu’elle fouffrît une léfton énorme , S>c qu’elle
prît des lettres de refeifion dans les dix ans de la majorité.
Un fils majeur qui auroit accepté,purement & fim-
plement le legs à lui fait pour lui tenir lieu de légi^
time, ne feroit pas recevable à revenir pour fa légitime
: on le juge pourtant autrement dans les parle«
mens de Droit écrit.
Nous n_e voyons point de coutumes qui privent
abfolument les enfans de toute légitime ; l_es plus
dures font celles qui excluent de là fucceffion les
fi.lies mariées, quand même elles n’auroient eu qu’un
chapeau de rofes en mariage, ou mariage avenant^'
lequel tient lieu de légitime.
Suivant le Droit romain, les.enfans naturels n’onC
point droit de légitime dans la fucceffion de leur pere,
quoiqu’ils foiënt-appelles pour deux onces à fa fuc-
eeffion, lorsqu’il ne laiffe point de femme ni d’en-
fans légitimes.
A l’égard de la fucceffion de la mere, le Droit
romain y donne une légitime aux bâtards, quand
A a a