84 I Ü R
du, piftil eft d’une forme turbinéc ; les Ailes font ail
nombre dp deux , chevelus 6c réfléchis. La fleur
environne étroitement la graine ; elle s’ouvre dans
le tems convenable , & la laifle tomber* La graine
efl une, oblonguc, convexe d’un côté , applatie &
lillonnée de l’autre.
Les Botanjfles comptent quatre ou cinq cfpeces
(V ivroie ; mais nous ne décrirons que la plus commu-
n o , nommée Amplement folium ou folium album, 6c
par Tournefort, grumen foliaceum, fpied fongiori.
Sa racine çft fibreufe avec des filamens très-fins;
fa tige eft haute de deux ou trois coudées, aufli
épaiffe que celle du froment, un peu plus petite,
ayant quatre ou cinq noeuds qui pouiîcnt chacun
une feuille, comme dans le chien-dent, & dans les
autres plantes dont la tige fe change en chaume.
Cette feuille eft plus verte 6c plus étroite que celle
du froment, luilante, lifte, graflp, cannelée, em-
braft'ant ou enveloppant la tige par l’endroit où elle
fort. Sa tige porte un ép i, droit, menu , plat, long
d’un demi-pié 6c plus, d’une figure particulière ; car
il eft formé par l’union de fix, fept, huit grains, &
quelquefois davantage, qui fortent alternativement
des deux côtés du fommet de la tige en forme de
de petits épis fans pédicule. Chacun de ces petits
épis eft enveloppé d’une petite feuille. Ses graines
font plus menues que celles du b lc , peu farineufes ,
de couleur rougeâtre & enfermées dans des codes
noirâtres, terminées par une barbe pointue qui manque
quelquefois.
Cette plante ne croît que trop fréquemment dans
les terres labourées parmi l’orge 6c le blé. Ç ’eft
pourquoi la plupart des anciens 6c un grand nombre
de modernes, ont cru que Vivroie étoit une dégénération
du blé ; l’on a meme tâché dans ce fiecle d’appuyer
cette opinion, par des exemples de mélanges
monftrueux de blé 6c d’ivroû trouvés enfemble fur
une même plante.
On a v u , dit-on, une plante de froment d’un feul
tuyau, de l’un des noeuds duquel fortoit un fécond
tuyau , qui portoit à fon extrémité un épi d’ivroie ;
le tuyau commun fe prolongeoit & fe terminoit par
un épi de froment; ce tuyau commun ouvert dans
fa longueur , n’avoit qu’une feule cavité : voilà un
fait bien fort en faveur de ceux qui admettent la dégénération
du blé en ivroie.Mais plus ©n réfléchit fur
laloi des générations , plus on étudie les caraderes
qui différentient les efpeçes, 6c moins on eft difpo-
fé à croire qu’une plante puiffe devenir une autre
plante. Or lesBotaniftes nous indiquent bien des caraderes
qui diftinguent le blé de l'ivroie ; la couleur
des feuilles & celle de la tig e, leur tiffu, l’arrangement
refpedif des grains, leur ftrudure, la qualité
de la farine qui y eft renfermée, forment autant de
différences. Les proportions relatives des parties
fourniffent encore des caraderes différens, très-marqués
dans ces deux plantes. Par exemple, l’ivroie
pouffe fes fécondés racines beaucoup plutôt que le
blé ; 6c le noeud d’où ces racines fortent, fe diftin-
gue aufli plutôt dans celles - là que dans celui-ci ; il
eft donc fur que le blé ne dégénéré point en ivroie.
On a tenté de rendre raifon du phénomène de cette
plante, mi-partie blé & ivroie ; en fuppofant que
deux plantes, l’une de blé 6c l’autre tfiyroie, ayent
crû fort près l’une de l’autre,& fe font greffées, en approche.
Seroit ce donc ici une efpece de greffe, une
greffe par approche ? Seroit-ce un effet de la confusion
des pouflieres des étamines ? Toutes ces explications
font arbitraires ; ce qui eft certain, c’eft qu’on
ne peut expliquer le fait rapporté ci-deffus, par la
prétendue dégénération du blé en ivroie; elle eft contraire
6c aux vrais principes de la Phyftque , 6c à
toutes les expériences, ( D . J. )
Ivr o ie , ( Matière médecin. ) les ançiens emÎ
U R
ployoient Vivroie en cataplafme , avec du foufre &
du vinaigre contre la lepre ; avec du lel &c des r;tf
ves , pour conlumerles bords des ulcérés putrides;
avec de la fiente de pigeon & de la graine de lin ,
pour meurir les tumeurs; mais en même tems ils ont
été fort éclairésfur fa nature pernicieufe pour l’intérieur.
Tous les Naturaliftes, A riftote, Théophraftc,
Pline, Diofcoride, la plupart des hiftoriens, des
poètes, nous parlent des maladies qu’elle a caulés en
différentes occafions ; ils ont même cru qu’elle ren-
doit aveugle ; car c’ctoit chez eux un proverbe folio
yiclitart, pour dire devenir aveugle : Virgile appelle
Vivroie finiftre , infelix folium. Les Modernes
lavent par expérience qu’elle caufe des éblouiflèr
mens, des vertiges , des maux de tête & des affou-
pifl'emens ; que mêlée dans la dreche elle enivre,
6c qu’elle produit le même effet quand elle fe trouve
en trop grande quantité dans le pain ; de—là. vient
vraifl'emblablement fon nom (Vivraye ou d’ivroiei
(-»•■ M M JURTES ou JURTI, ( Hifi. mod.) c’eft airifi que
les Ruffes nomment les habitations des nations
tartares qui font en Sibérie. Chaque famille occupe
une cabane formée par des êchalats fichés en
terre, & recouverts d’écorce de bouleau ou de peaux
d’animaux, pour fe garantir des injures de l’air. On
laifle au milieu du toit qui a la forme d’un cône,
une ouverture pour la fortie de la fumée. Quand un
tartarc ne trouve plus que l’endroit où il avoit pla*
céfa jurte lui convienne, il l’abandonne,& va avec
fa famille conftruire une autre jurte dans un lieu
plus commode. Koyc{ Gmelin, voyage de Sibérie*
JURUCUA , ( Zoolog. exot. ) elpecc de tortue
fingulicre du Bréfil, grande ordinairement de quatre
piés, 6c large de trois ; fes piés font faits en forme
d’aîles, & ceux de devant font beaucoup plus longs
que ceux de derrière. Sa queue eft courte & de figure
conique ; fes yeux font gros 6c noirs ; fa bouche
refl'emble au bec d’un oifèau , & n’a point de
dents. Ses côtes font attachées à l’écaille ; on en
compte huit de chaque côté, & celles du milieu font
les plus longues. Cette efpece de tortue jette fes
oeufs fur le rivage , les couvre de fable, & les laifle
éclore à la chaleur du foleil.Ilsfont fillonnés comme
par des lignes géométriques, diverfement dirigées
fur l’écaille qui eft d’un noir luifant, marbrée dera-
chetures jaunes, avec une variété confidérabledans
les différentes efpeçes. ( D . J. )
JURUNCAPEBA, ( Ichtyol. exot. ) nom d’un
beau petit poiffon d’excellent goût, qu’on prend fur
les côtes du Bréfil entre les rochers , & qui eft de
la claffe des tourds ; on l’appelle_autrementptaiarat
Voyer en la defeription dans Margrave ou dans Ray. i PE JURURA, ( Zoolog. exot. j genre de tortue de
forme elliptique, & de la plus petite efpece du Bréfil;
fa coquille de deflous longue de huit à neuf pouces
, large de moitié, eft jaunâtre & applatie ; la fu-
périeure eft brune. L’animal peut à là volonté cacher
tout fon corps dans fa coque ; fa tête eft groffe
& allongée, fon nez élevé & pointu, fa bouche
grande , 6c fes yeux noirs, fes piés font armés de:
quatre ongles forts; fa queue eft courte, fa peau
épaifl'e & écailleufe ; fes oeufs font blancs , ronds
6c d’excellent goût. Ray,5y/2. anim.p. %S8. (Z?. /.)
1V R Y , ( Geog. ) bourg de France en Normandie ,
entre Anet 6c P a c y , avec une abbaye de bénédi-
dins fondée en 1077 ; c’eft dans la plaine de ce.
lieu , près des bords de l’Iton & des rives de l’Eure
, que fe donna la bataille d'Ivry gagnée par
Henri IV. contre les Ligueurs , le 14 Mars 1590;
& c’eft dans cette journée, mémorable que ce prince
dit à fes troupes : « ralliez-vous à mon panache
» blanc, vous le verrez toujours au chemin de l’honj
U S
>> neur & dé là gloire a. Ivry eft dans le dioeèfe d’E-
vreux ; fes noms latins font Ibràum > Ibrta, Ibreia,
Ivereiurn, , Iberieumy Ibtrium , 6t par bien des gens
Ibriacum. Il eft fur l’Eure , à 4 lieues de Dreux , 15
de Paris; Long, /.jpi 10. lut. 48. 4$. (Z?, ƒ. j)
JUS, ( Art. eulin. ) jus , fuccus càrnium, pifeium ,
vel vegetantium ; terme générique, qui défigne une
liqueur, un fuc liquide, naturel on artificiel; Les
chefs d’office & de cuifiné, définiffent le ju s une fubf-
fcance liquide qu’on tire par artifice de la viande de
boucherie, de la volaille ; du poiffon où des végétaux
; fbit par éxpreflion , foit par codiôn ; foit par
infufion ; ainfi l’on voit que le jus a différentes propriétés
, fuivant la nature des chofes différentes
d’où il eft tiréi On fe fert beaucoup de jus dans les
cuifines, pour nourrir les ragoûts &les potages. Les
maîtres Claris l’art de la gloutonerie vous apprén-
dront la maniéré de tirer les ju s de boeuf, de veau ,
de perdrix > de bécaffe, de volaille", de poiffon, de
champignons & autres végétaux; ils vous apprendront
encore le moyen d’en former des coulis * c ’eft-
à-dire de les paffer à l’étamine, les épaiflir 6c leur
donner une faveur agréable pour les ragoûts. (ZJjZ.)
JUSJURANDUM in a c t a , ( Litter. ) ferment
particulier ait fénat de Rome, par lequel il promet-
toit d’obferver les ordonnances, de l’empereur régnant
& de fes prédéceffeurs, excepté de ceux que
lui fénat avoit déclaré tyrans, tels que Néron, Do-
mitien, Maximin ;^ou de ceux encore dont la mémoire
, fans avoir été flétrie par une condamnation juridique
, n’en étoit pas moins odieufe, telle que T ibère
& Caligula; Il faut bien diftinguer ce ferment;
du ferment de fidélité que faifoient à l’empereur les
militaires, & même ceux qui nè portoient pas les armes.
Ce dernier ferment fe nommoit jusjurandum in
verba, & quelquefois m nornen. La plûpart des fça-
vans, entr’autres Jufte Lipfe, GronoviuS & M. de
Tillemont, confondent le ferment d’obferver les fta-
tuts , nomme jusjurandum in acla, avec le ferment
de fidélité, appellé jusjurandum in verba. ( D . J. )
JUSQUIAME ou HANNEBANE , f. f. hyofeyeu
inus y {^Botan. ) genre déplanté à fleur monopétale,
faite en forme d’entonnoir & découpée; il fort du
calice un piftil attaché comme un clou à la partie
inférieure de fa fleur ; il devient dans la fuite un fruit
renfermé dans le calice qui reffcmble en quelque
façon à une marmite avec fon couvercle, & qui eft
divifé en deux loges par une cloifon chargée de plu-
fieurs l'emenccs. Tournefort, infl. rei herb. Voye%_
P l a n t e *
Entre les huit efpeçes de jufquiame que comptent
Tournefort & Boerhaave, nous ne nous arrêterons
qu’à deux,Ja noire 6c la blanche.
La jufquiame >noire ou hannebane noire ; hyofeyd-
inus.niger, vulgarisées Botaniftes,afa racine épaiffe,
•ridée, longue, branchue, brune en-dehors , blanche
en-dedans. Ses feuilles font amples, molks, co-
lonneufes, d’un verd-gai, découpées profondément
•à leurs bords, femblabies en quelques maniérés à
-celles.de 1’acanthe, mais plus petites, & d’une odeur
•forte. Elles.font nombreufes, placées fans ordre fur
•des tiges hautes d’une coudée, branchues, épaiffes,
•cylindriques, couvertes d’un dtivet cotonneux. Ses
tfleurs rangées fur les tiges en »longs épis , font d’une
feule piece, de la figure d?un entonnoir, divifées
en cinq fegmens, obtus, jaunâtres à leur, bord,
.marquées d ’un pourpre noirâtre au milieu, garnies
-de cinq étamines courtes , qui portent chacune un
•fommet affez gros, & oblong; le piftil plus long
• que les étamines,, eft furmonté d’une tête ronde &
blanche. Il (fort d’un calice velu, oblong , partagé
fhr les bords en cinq dentelures, roides, & pointues.
Ce piftil fe change en un fruit caché dans le
■ calice, de.la figure d’une marmite , à deux loges^
J U S 85
fur lequel eft placé un couvercle qui fe ferme également,
rempli en-dedans de pluiteurs petites graines,
oendrees, fidccs , arrondies, & applaties.
Va jufquiame blanche* hyofeyamus albus off. différé
de la precedente par fes feuilles, qui font plus molles,
plus petites, moins finuées , garnies d’un duvet
plus épais 6c plus blanc : fes tiges font plui courtes
& moins branchues ; fes fleurs font blanches; lô
calice eft plus ouvert, 6c la graine plu» blanche.
Cette efpece de jufquiame croît naturellement dans
les pays chauds, comme en Languedoc, en Provence
, & en Italie.
Ces deux fortes de jufquiame, & fur-tout la noire,
donnent une odeur forte, rebutante, appefantiffan-
t e , & fomnifere. Leurs feuilles ont un goût fade ,
6c quand on les froiffe dans les mains , elles répandent
une odeur puante. Leur fuc rougit le papier
bleu; leurs racines fbrit douceâtres, 6c de la laveur
des artichaux.
L’une & l’autre jüfquiàme paroiffent contenir un
fel effentiel, ammoniacal, uni à beaucoup d’huile
épaiffe 6c fétide, qui les rend ftupéfiantes ; car le fel
neutre lixiviei qu’on tire de leurs cendres, n’a point
de rapport à cet effet.
Leurs graines ont une faveur un peu vifqlteüfe ‘à
& une odeur narcotique, defaeréable. Elles con-i
tiennent une huile foit fubtile, loit grofliere, puant
e , narcotique, füfeeptiblp dé beaucoup de raréfaction
, 6c joihte avec un fel ammoniacal.
Les qualités vénéneufes , ftupéfiantes , & turbulentes
de la jufquiame, fi connues des modernes ,
avoient ete jadis obfervées par Galien, parScribo»
nius Largüs, & par Diofcoride ; mais les obferva-
tions des Médecins de notre fiecle, font encore plus
détaillées & plus décifives pour nous. On en trour
vera des exemples intéreffans dans l’excellent traité
de "Wepfer, de cicutâ aquatied, dans les Ephéméri-
des des curieux de la nature, anno 46c S. Deçur. 1.
obfervi 124. Decur. 3. ann. y. 6c 8. pag. 106; &i
annoq . 6c 10. p. j8 . in Appendic. Enfin, dans l ’hift.
de l’acad. des Sciences , année 1709, page 50, an-
néée 173 7 , page 7 z , 6c ailleurs. Vàye^ aüjfi Jus*
q u iam e . mat: medic. ^D . J. j
JdsQuiame n o ire , ou Hannebane , & Jus^
QUIAME bl an ch e, ( mat. med.) chez plüfieurs médecins
de réputation , tels que Craton , Heurnius i
ces deux platites font cenlees les mêmes quant à
leurs effets médicinaux. Platerus, 6c quelques au»-
tres, ont Vanté la graine de jufquiame , prilè intérieurement
comme un remede très-efficace contré
le crachement de fang; mais il eft prouvé par trop
d’obfervations, que la jufquiame eft un poifon dangereux
& a û i f , 6c qu’on ne peut fans témérité 1?
donner intérieurement ; fon ùfage extérieur n’eft pas
même exempt de danger*
Toutes les parties de cette plante font dangereu-
fes, foit qu’on -les prenne en fubftance, foit qu’on
en avale la décoétion, ou qu’on la reçoive en lavement
, foit qu’on en refpire la fumée, ou même l ’odeur.
Le poifon de la jufquiame porte particulièrement
à la tê te , altéré les fondions de l’a me d’uné
façon fort finguliere ;• il jette dans une efpece d ’i-'
vreffe ou de manie furieufe.
Wepfer rapporte dans fon traité de cicutâ aquati-
; câ y Une obfervation fort remarquable fur les effets
j de racines de jufquiame, qu’on (etvit par mégardé
en falade à une communauté nombreufe de béné-
didins. Ces religieux furent pour la plufpart attaqués
pendant la nuit qui fuivit ce repas , de divers
genres de délire, de vertige, & de manie. Ceux qui
furent le moins malheureux en furent quittes pour
des fanraifies & .des adions ridicules. On trouvé
dans divers obfef vateurs uit grand nombre de faits
•qui concourent à établir.la qualité vénéneufe abl©-;