86 J U S
lue de 1 & jufquiamc, & fon afrion particulière fur les
fondions de l’ame. Simon Scultzius j ephem. nat.
cur. arm. 4 . b.S .d tca d .j. obferv. 124. raconte que
quatre jeunes écoliers & leurs cuifiniers, ayant
mangé par mégarde des racines da jufquiamc &. de
panais bouillies avec du boeuf, avoient eu l’efpnt
fort troublé ; qu’ils étoient.devenus comme furieux ;
que d’abord ils s’étoient querellés, & enfuite battus
avec tant d’ acharnement, que fi on ne les eut fepa-
rés , ilsfe feroient peut-être tués ; qu’ils faifoient des
geftës. ridicules, & étoient remplis d’imaginations
iingulieres. Geoffroy, de qui nous venons de copier
cet extrait, a ramaffe -"dans fa matière medicale,
am'c/eHYOSCYAMUSjune fuffifante quantité de
faits qui confirment ce que nous avons déjà avance ;
favoir, que la décofrion.dtjufquiame donnée en lavement,
que fa fumée & fes exhalaifons, fur-tout
lorfqu’elles étoient refferrées dans un lieu fermé,
pouvoient produire les funeftes effets, que nous v enons
de rapporter.
On prévient l’afrion vénéneufe de la jufquiamc,
comme celle des autres poifons irritansy en procurant
fon évacuation par le vomiffement, fi l’on eft
appellé à tems, faifant avaler après à grandes dofes,
des bouillons gras, du la it ,. du beurre fondu , &ç.
infiftant fur les purgatifs doux &. lubréfians, & foi-
licitant enfin l’évacuation de la peau par des diaphoniques
légers. Voye^ Po ison ..
La jufquiamc entre malgré fes mauvaifes qualités
dans plûfieurs compofitions pharmaceutiques, la
plûpart deftinées à l’ufage extérieur ; mais heureu-
fement en trop petite quantité, pour qu’elle puiffe
les rendre dangereufes*
L’huile exprimée des femences de jufquiamc ne
participe point des qualités vénéneufes de cette
plante.
En général, la Medecine ne perdroit pas beaucoup
, quand onbanniroit abfolument de l ’ordre des
remedes l’une & l’autre jufquiamc. ( b )
JUSSION, f. f. ( Jurifprud. ) fignifie ordre , commandement.
Ce terme n’eft guere ufite qu’en parlant
de certaines lettres du prince, qu’on appelle Lettres
de jufjion j par lefquelles il enjoint très-étroitement
à une cour de procéder à l’enregiftrement de quelque
ordonnance, édit, déclaration, ou autres lettres
patentes. Quand les premières lettres dçjuffion
n’ont pas eu leur effet, le prince en donne de fécondés
, qu’on appelle itérative jufjion , ou fécondes
lettres de jufjion. { A )
JUSTE-AU-CORPS , f. m. ( Gram. Taill. ) v êtement
de deffus ; c’eft ce que nous appelions plus
communément un habit. Il y a des manches & des
poches ; il fe boutonne par-devant jufqu’ à la ceinture
, & defeend jufqu’aux genoux.
JUSTE, INJUSTE, {Morale.) ces termes fe
prennent communément dans un fens fort vague,
pour ce qui fe rapporte.aux notions naturelles que
nous avons de nos devoirs envers le prochain. On
les détermine davantage , en difant que le jufle eft
ce qui eft conforme aux lois civiles , par oppofition
à l’équitable, qui confifte dans la feule convenance
avec les lois naturelles. Enfin, le dernier degré de
précifion va à n’appeller jufle , que ce qui fe Fait en
vertu du droit parfait d’autrui, refervant le nom
à.'équitable pour ce qui fe fait eu égard au droit imparfait.
.Or on appelle droit parfait, celui qui eft
accompagné du pouvoir de contraindre. Le contrat
de louage donne au propriétaire le droit parfait d’exiger
du locataire le payement du loyer ; & fi ce
dernier élude le payement, on dit qu’il commet une
injuftice. Au contraire, le pauvre n’a qu’un droit
imparfait à l’aumône qu’il demande : le riche qui
la lui refufe peche donc contre la feule équité, &
ne fauroit dans le fens propre être qualifié d'injufle.
J US
Les noms de jüfles & d'injufles , d*équitables & d'iniques
, donnés aux afrions, portent par conféquent
fur leur rapport aux droits d’autrui; au lieu qu’en
les: confidérant relativement à l’obligation, ou à la
lo i, dont l ’obligation eft Pâme, les avions font dites
dues ou illicites ; car une même afrion peut être ap-
pelléebonne, dûe, licite, honnête, fuivantlesdif-
férensi points de vue fous lefquels on l’envifage.
Ces diftinfrions pofées, il me paroît affez aifé de
réfoudre la fameufe queftion, s’il y a quelque chofe
de jufle ou d'injufle avant la loi.
Faute de fixer le fens des termes, les plus fameux
moraliftes ont échoué ici. Si l’on entend par le jufle
& Yinjufle, les qualités .morales des afrions qui lui
fervent de fondement, la convenance des chofes,
les lois naturelles : fans contredit, toutes ces idées
font fort antérieures à la lo i, puifque la loi bâtit
fur elles, & ne fauroit leur contredire : mais fi vous
prenez le jufle & Yinjufle pour l’obligation parfaite
& pofitive de regler votre conduite , & de déterminer
vos afrions fuivant ces principes , cette obligation
eft poftérieüre à la promulgation de.la lo i,
& ne fauroit exifter qu’après la loi. G rotius, d’après
les, Scholaftiques, & la plûpart des anciens philosophes
, avoit affirmé qu’en faifant abftrafrion de
toutes fortes de lois, il fe trouve des principes sûrs,
des vérités qui fervent à démêler le jufle d’avec Yinjufle.
Cela eft vrai, mais cela n’eft pas exafrement
exprimé : s’il n’y avoit point de lo is , ii n’y auroit
ni jufle ni injufle, ces dénominations furVenant aux
afrions par l’effet de la loi : mais il y auroit toûjours
dans la nature des principes d’équité & de convenance,
fur lefquels il faudroit regler les lois, & qui
munis une fois de l’autorité des lois , deviendroient
le jufle & Yinjufle. Les maximes gravées, pour ainfi
dire, fur les tables de l’humanité, font aufii anciennes
que l’homme, & ont précédé les lois auxquelles
elles doivent fervir de principes ; mais çe font les
lois qui, en ratifiant ces maximes, & en leur imprimant
la force de l ’autorité & desfanfrions, ont produit
les droits parfaits, dont l’obfervaticn eft ap-
pellée juflice, la violation injuflice. Puffendorf en
voulant, critiquer Grotius, qui n’a erré que dans
l’expreffion, tombe dans un fentiment réellement
infoutenable, & prétend qu’il faut abfolument des
lois pour fonder les qualités morales des afrions.
( Droit naturel, Uv. I. c. xj. n. 6. ). Il eft pourtant
confiant que la première chofe à quoi l ’on fait attention
dans une lo i, c’eft fi ce qu’elle porte eft
fondé en raifon. On dit vulgairement qu’une loi eft
jufle ; mais c’eft une fuite de l’impropriété que j’ai
déjà combattue. La loi fait le jufle ; ainfi il faut demander
fi elle eft raifonnable, équitable ; & fi elle
eft telle, fes arrêts ajouteront aux carafreres de raifon
& d’équité, celui de juflice. Car fi elle eft en
oppofition avec ces notions primitives, elle ne fauroit
rendre jufle ce qu’elle ordonne. Le fonds fourni
par la nature eft une bafe fans laquelle il n’y a point
d’édifice, une toile fans laquelle les couleurs ne fau-
roient être appliquées. Ne réfulte-t-il donc pas évidemment
de ce premier requifitum de la lo i, qu’aucune
loi n’eft par elle-même lafource des qualités
morales des afrions, du bon, du droit, de l’honnête
; mais que ces qualités morales font fondées
fur quelqu’autre chofe que le bon plaifir du légifla-
teur, & qu’on peut les découvrir fans lui ? En effet,
le bon ou le mauvais en Morale, comme par-tout
ailleurs , fe fonde fur le îapport effentiel, ou la dif-
convenance effentielle d’une chofe avec une autre.
Car fi l’on fuppofe dès êtres créés, de façon qu’ils
ne puiffent fubfifter qu’en fe foutenant les uns les
autres , il eft clair que leurs afrions font convenables
ou ne le font pas, à proportion qu’elles s’approchent
ou qu’elles s’éloignent de ce but ; & que
J U S
ce rapport avec notre confervation, fonde les qualités
de bon & de droit, de mauvais & de pervers,
qui ne dépendent par conféquent d’aucune difpofi-
tion arbitraire, & exiftent non-feulement avant la
lo i, mais même quand la loi n’exifteroit point. « La
»nature univerlelle, dit l’empereur philofophe,
» ( liv. X .a r t.j.) ayant créé les hommes les uns pour
» les autres, afin qu’ils fe donnent des fecours miù
» tuels , celui qui viole cette loi commet une im-
» piété envers la Divinité la plus ancienne : car la
» nature univerfelle eft la mere de tous les êtres, &
» parconféquent tous les êtres ont une liaifon natu-
» relie entre eux. On l’appelle aufii la vérité, parce
» qu’elle eft la première caufe de toutes les véri-
» tés », S’il arrivoit donc qu’un légiflateur s’avisât
de déclarer injufles les afrions qui fervent naturellement
à nous conferver, il ne feroit que d’impuiffans
efforts : s’il vÔuloit au moyen de ces lois faire paffer
pour jufles, celles qui tendent à nous détruire , on
le regarderoit lui-même avec raifon comme un tyran
, & ces afrions étant condamnées par la nature,
ne pourroient être juftifiées par les lois ; f i quee fini
iyrannorum leges, f l triginta illi Athenis leges impo-
nere voliùjfent, aut f i omnes Athenienfés delectareniur
tyrannUis legibus, num idcirco ha leges juftæ haberen-
tur ? Qtiodfi principum decretis, f i fententiis judicum
jura conflituerentur , ju s effet latrocinart , ju s ipfum
adulterare. ( Cicero, lib. X . de Legibus. ) Grotius
a donc été très-fondé à foutenir que la loi ne fert &
ne tend en effet, qu’à faire connoître, qu’à marquer
les aftions qui conviennent ou qui ne conviennent
pas à la nature humaine ; & rien n’eft plus aifé
qu,e de faire fentir le foible des raifons dont Puffendorf,
& quelques autres jurifconfultes,,fe font fer-
■ vis pour combattre ce fentiment.
On obje&e, par exemple, que ceux qui admettent
pour fondement de la moralité de nos a frions,
je ne fais quelle réglé éternelle indépendante del’in-
ftitution divine, affocient manifeftement à Dieu un
principe extérieur & co-éternel,qu’il a dû fuivre né-
ceffairement dans la détermination des qualités ef-
fentielles & diftinfrives de chaque chofe. Ce rai-
fonnement étant fondé fur un faux principe, croule
avec luk j le principe dont je veux parler, c ’eft celui
de la liberté d’indifférence de D ieu , & du prétendu
pouvoir qu’on lui attribue de difpofer à fon gré des
effences. Cette fuppofition eft contradiftoire : la liberté
du grand auteur de toutes chofcs confifte à
pouvoir créer ou ne pas créer; mais dès-là qu’il fe
propofe de créer certains êtres, il implique qu’il les
crée autres que leur effence, & fes propres idées
les lui repréfentent. S’il eût donc donné aux créatures
qui portent le nom d'hommes, une autre nature
, un autre être, que celui qu’ils ont reçu, elles
n’euffent pas été ce qu’elles font actuellement ; &
les afrions qui leur conviennent entant qu’hommes,
ne s’accorderoient plus avec leur nature.
C ’eft donc proprement de cette nature, que reful-
tent les propriétés de nos afrions, lefquelles en ce
fens ne fouffrent point de variation ; & c’eft cette
immutabilité des effences qui forme la raifon & la
vérité éternelle , dont Dieu , en qualité d’être fou-
verainement parfait, ne fauroit fe départir. Mais la
vérité, pour être invariable , pour être conforme à
la nature & à l’effence des chofes, ne forme pas
un principe extérieur par' rapport à Dieu. Elle eft
fondée fur fes propres idées, dont on peut dire en
un fens, que découle l ’effence & la nature des chofes,
puifqu’elles font éternelles, & que hors d’elles
rien n’eft vrai ni poflible. Concluons donc qu’une
afrion qui convient ou qui ne convient pas à la nature
de l ’être qui la produit, eft moralement bonne
ou mauvaife, non parc.e qu’elle eft conforme ou
.contraire à la lo i, mais parce qu’elle s’accorde avec
J U S 87
l’ effence de l’être qui la produit, ou qu’elle y ré-*
pugne t enfuite de quoi, la loi furvenant, & bêtifiant
fur les fondemens pofés par la nature, rend
jufle ce qu’elle ordonne ou permet, & injufle ce
qu’elle défend.
Juste , en Mufîque, eft oppofé à faux ; & cette
épithete fe donne à tout intervalle dont les fonâ
font exactement dans le rapport qu’ils doivent avoir.
Mais ce mot s’applique fpécialementaux confonnan-
ces parfaites. Les imparfaites peuvent être majeures
ou mineures , mais celles-ci font néceffairement
jufles ; dès qu’on les altéré d’un femi-ton, elles deviennent
fauffes,& parconféquent diffonhantes.(vS')
Ju s t e , ( Peinture.) un deffein jufle, conformeà
l’original ; deffmer avec juflejfc, c’eft-à-dire avec précifion
, exafritude.
Juste , ( Commerce. ) en fait de poids, ce qui eft
en équilibre , ce qui ne panche pas plus d’un côté
que de l’autre ; on le dit des balances.
Peferjufle, c’eft ne point donner de tra it; Ort
pefe ainfi l’o r , l’argent, les diamans, dont le bon
poids apporteroit trop de préjudice au vendeur. La
plûpart des marchandifes fe pefent en donnant du
trait, c’eft-à-dire en chargeant affez le baftin où on
les met pour emporter celui où eft le poids.
Aunerjufle , c’ eft auner bois à bois, & fans pouce
évent. Foye{ A uner & ÉVENT , Dictionnaire
de Commerce.
Juste , f. m. {Gram. T ail. ) c’eft un vêtement
de femmes; il a des manches. Il s’applique exactement
fur le corps. Si l’on en porte un, il s’agfaffe
ou fe lace par-devant ou p^r-derriere. Il eft échan-
cré, & laiffe voir la poitrine & la gorge ; il prend
bien , & fait valoir la taille; il a de petites bafqueâ
par-derriere & par-devant. La mode en eft paffée
à la ville ; nos payfanes font en jufle, & quand elles
font jolies, fqus ce vêtement elles en paroiffent en»
core plus élégantes & plus jolies.
JUSTESSE, f. f. ( Grarnm. ) ce mot qu ’on emploie
également au propre & au figuré, défigne en général
l’exafritude , la régularité, la préçifion. Il fe
dit au figuré en matière de langage, de penfées,
d’efprit, de g o û t, 6c de fentiment.
La jufleffe du langage confifte à s’expliquer en ter»
mes propres, choifis & liés enfemble , qui ne difent
ni trop ni trop peu. Cette jufleffe extrême dans lè
choix , l’union & l ’arrangement des paroles, eft effentielle
aux fciences exaftes ; mais dans Celles de
l ’imagination, cettojufleffe trop rigoureufe affoiblit
les penfées, amortit le feu de l’efprit, & deffechô
le difeours. Il faut ofer à propos, fur-tout en Poé*
fie , bannir cet efclaVage fcrupuleux, qui par attachement
à la:jufleffe Yervïle ne laiffe rien d.e libre, de
naturel & de brillant, a Je l'aimois inconflant, qu'euf
» fai-je fâitfldele ! eft une inexafritude de langage à
laquelle Racinedevoit fe livrer, dès que la jufleffe de
la penfée s’y trouvoit énergiquement peinte.
La jufleffe de la penfée confifte dans la vérité SC
la parfaire convenance au fujet ; & c’eft ce qui fait
la folide beauté du difeours. Les penfées font plus
ou moins belles, félon qu’elles font plus ou moins
conformes à leur objet. La conformité enriere fait la
jufleffe delà penfée ;de forte qu’une penfée jufteeft,
à proprement parler, une penfée vraie de tous les
côtés, & dans tous les jours qu’on la peut regarder.
Le P. Bouhours n’a pas eutortde donner pour exemple
de cette jufleffe, Tépigrarame d’Aufone fur Di-
don , & qui a été très-heureufement rendue dans
notre langue.
Pauvre Didon où Y a réduite
De tes maris letrifle fort ;
L'un en mourant caufe ta fuite ,
Vautre en fuyant caufe ta morta