chaque pàftëè qu’il fait. On appelle pafce , I’àïlée &
le venir de la flûte entre les fils de la chaîne.
Il eft bon d’obferver que chaque ouvrier ne fait
qu’une lame féparée en deux demi-lames, l’une devant
l’autre, l’autre derrière. Chaque demi-lame
qui a ordinairement fcpt feiziemes d’aune , mefure
de Paris, eft compofée de plus ou moins de lijfes,
fuivant la finefl'e de l’ouvrage.
Ce qu’il y a d’admirable dans le travail de la baffe-
liffe, & qui lui eft commun avec la haute liffe, c’eft
qu’il fe fait du côté de l’envers ; en forte que l’ouvrier
ne peut voir fa tapiflerie du côté de l’endroit,
qu’après que la piece eft finie & levée de deffusle métier.
Foye^ Hà UTELISSE. Dicî. de Trévoux.
L i s s e - h a u t e , efpece de tapiflerie de foie & de
laine, rehauffée d’or & d’argent, qui repréfente de
grands & petits perfonnages, ou des payfages avec
toutes fortes d’animaux. La haute-lijfe eft ainfi app
e lle de la difpofition des lijfes, ou plutôt de la
chaîne qui fert à la travailler, & qui eft tendue perpendiculairement
de haut en bas ; ce qui la diftingue
de la baJfe-Uffe, dont la chaîne eft mife fur un métier
placé horifontalement. Voyt{ B a s s e - l i s s e .
L’invention de la haute & battc-liffe femble venir
du Levant; & le nom de farrajmois qu’on leur
donnoit autrefois en France, aufli-bien qu’aux Ta-
pifliers qui fe mêloient de la fabriquer, ou plutôt de
la rentraire & raccommoder, ne laiffe guere lieu d’en
douter. Les Anglois & les Flamands y ont-ils peut-
être les premiers excellé , & en ont-ils apporté l’art
au retour des croifades & des guerres contre les
Sarrafins.
Quoi qu’il en foit, il eft certain que ce font ces
deux nations, & particulièrement les Anglois, qui
ont donné la perfection à ces riches ouvrages ; ce
qui doit les faire regarder, finon comme les premiers
inventeurs, du moins comme les reftaurateurs
d’un art fi admirable , & qui fait donner une efpece
de vie aux laines & aux foies dans des tableaux, qui
certainement ne cedent guere à ceux des plus grands
peintres, fur lefquels on travaille la haute & bajfe-
lijfe.
Les François ont commencé plus tard que les autres
à établir chez eux des manufactures de ces fortes
de tapifleries ; & ce n’eft guere que fur la fin du
régné de Henri I V , qu’on a vu fortir des mains des
ouvriers de France des ouvrages de haute & bajfe-
lijfe, qui aient quelque beauté.
L’établiffement qui fe fit d’abord à Paris dans le
fauxbourg S. Marcel, en 1607, par édit de ce prince
du mois de Janvier de la même année, perdit trop
tôt fon protefteur pour fe perfectionner ; & s’il ne
tomba pas tout-à-fait dans fa naiflance par la mort
de ce monarque, il eut du moins bien de la peine à
fe foutenir ; quoique les fieurs Comaus & de la Planche
, qui en étoient les directeurs, fuffent très-habiles
dans ces fortes de manufactures, & qu’il leur eût été
accordé & à leurs ouvriers de grands p rivilèges, tant
par l’édit de leur établiffement, que par plufieurs
déclarations données en conféquence.
Le régne de Louis XIV. vit renaître ces premiers
projets ious l’intendance de M. Colbert. Dès l’an
1664, ce miniftre fit expédier des lettres-patentes
au fieur Hinard , pour l’établiffement d’une manufacture
royale de tapifleries de haute & baffe-lijfe en
la ville de Beauvais en Picardie; & en 1667, fut
établie par lettres-patentes la. manufacture royale
des Gobelins, oh ont été fabriquées depuis ces excellentes
tapifleries de hautc-lijfe, qui ne cedent à
aucune des' plus belles d’Angleterre & de Flandres
pour les defleins, & qui les égalent prefque pour la
beauté de l’ouvrage, & pour la force & la sûreté
des teintures des foies &c des laines avec lefquelles
elles font travaillées. Foye^ G o b e l in s ,
Outre la manufacture des Gobelins & cellè de
Beauvais, qui fubfiftent toujours, il y a deux autres
manufactures françoifes de haute & baffe lijfe, l’une
à Aubuflbn en Auvergne, & l’autre à Felletin dans
la haute Marche. Ce font les tapifleries qui fe fabriquent
dans ces deux lieux, qu’on nomme ordinairement
tapijferies d'Auvergne. Felletin fait mieux les
verdures, & Aubuflbn les perfonnages. Beauvais
fait l’un & l’autre beaucoup mieux qu’en Auvergne :
ces manufactures emploient aufli l’or & l’argent dans
leurs tapifleries.
Ces quatre manufactures françoifes avoient été
établies également pour la haute &c bajfe-lijfe ; mais
il y a déjà long-tems qu’on ne fabrique plus ni en
Auvergne, ni en Picardie , que de la baffe-liffe ; ÔC
ce n’eu qu’à l’hôtel royal des Gobelins où le travail
de la haute & baße-liffe s’eft confervé.
On ne fait aufli que des baßes-lißes en Flandres ;
mais il faut avouer qu’elles font pour la plûpart
d’une grande beauté , & plus grandes que celles de
France, f i l ’on en excepte celles des Gobelins.
Les hauteurs les plus ordinaires des hautes & baffes-•
liffes font deux aune?, deux aunes un quart, deux
aunes & demie, deux aunes deux t.iers , deux aunes
trois quarts , trois aunes , trois aunes un quart, 8c
trois aunes ÔC demie, le tout mefure de Paris. II
s’en fait cependant quelques-unes de plus hautes ,
mais elles font pour les maifons royales ou de commande.
En Auvergne, fur-tout à Aubuflbn, il s’en fait
au-deflous de deux aunes ; & il y en a d’une aune
trois quarts, & d’une aune & demie.
Toutes ces tapifleries, quand elles ne font pas
des plus hauts prix , fe vendent à l’aune courante :
les belles s’eftiment par tentures.
Fabrique de la haute-lijfe. Le métier fur lequel on
travaille la haute-lijfe eft drefîe perpendiculairement :
quatre principales pièces le compofent, deux longs
madriers ou pièces de bois, & deux gros rouleaux
ou enfubles.
Les madriers qui fe nomment cotterets ou cotterel-
les , font mis tous droits : les rouleaux font placés
tranfverfalement, l’un au haut des cotterets, &
l’autre au bas ; ce dernier à un pié & demi de di-
ftance du plancher ou environ. Tous les deux ont
des tourillons qui entrent dans des trous convena-?
blés à leur groffeur qui font aux extrémités des cotterets.
Les barres avec lefquelles on les tourne fe nomment
des tentoys; celle d’en-haut le grand tentoy ,
& celle d’en-bas le petit tentoy.
Dans chacun des rouleaux eft ménagée une rainure
d’un bout à l’autre, capable de contenir un
long morceau de bois rond, qu’on y peut arrêter
& affermir avec des fiches de bois ou de fer. Ce
morceau de bois, qui a prefque toute, la longueur
des rouleaux, s’appelle un verdillon , & fert à attacher
les bouts de la chaîne. Sur le rouleau d’en-haut
eft roulée cette chaîne, qui eft faite d’une efpece de
laine torfe ; & fur le rouleau d’en-bas fe roule l’ouvrage
à mefure qu’il s’avance.
Tout du long des cotterets qui font des planches
ou madriers de 14 ou 15 pouces de large, de 3 ou
4 d’épaifîeur, & de 7 ou 8 piés de hauteur, font
des trous percés de diftance en diftance du côté que
l’ouvrage fe travaille, dans lefquels fe mettent des
morceaux ou groffes chevilles de fer qui ont un crochet
aufli de fer à un des bouts. Ces morceaux de
fer qu’on nomme des hardilliers, & qui fervent à
foutenir la perche de lijfe, font percés aufli de plufieurs
trous, dans lefquels en paffant une cheville
qui approche ou éloigne la perche, on peut bander
ou lâcher les lijfes, fuivant le befoin qu’on en a.
La perche de lijfe, qui eft d’environ trois pouces
de diamètre, & de toute la longueur du métier, eft
nommée ainfi , parce qu’elle enfile les lijfes qui font
croil'er les fils de la chaîne. Elle fait à-peu-près dans
le métier de haute-lijfe, ce que font les marches dans
celui des Tifferands.
: Les lijfes font de petites cordelettes attachées à
chaque fil de la chaîne avec une efpece de noeud
coulant aufli de ficelle , qui forme une efpece de
maille ou d’anneau : elles fervent à tenir la chaîne
Ouverte pour y pouvoir pafler les broches qui font
chargées des foies, des laines, ou autres matières
qui entrent- dans la fabrique de là haute lijfe.
Enfin , il y a quantité de petits bâtons, ordinai-
tement de bois de fauîe, de diverfeslongueurs, mais
tous, d’un pouce de diamètre, que le hauteliflier
tient auprès de lui dans des corbeilles pour s’en fer-
vir à croifer les fils de la chaîne, en les paffant à-
travers , d’où ils font nommés bâtons de croifure ; &
afin que les fils ainfi croifés fe maintiennent toujours
dans un arrangement convenable, on entrelace aufli
entre les fils, mais au-deffus du bâton de croifure,
une ficelle à laquelle les ouvriers donnent le nom
àejleç he.
Lorfque le métier eft dreffé & la chaîne tendue ,
la première chofe que doit faire le hauteliflier, c’eft
de tracer fur les fils de cette chaîne les principaux
traits du deffein qu’il veut qui foit repréfenté dans
fa piece de tapiflerie; ce qui fe fait en appliquant du
côté qui doit fervir d’envers , des cartons conformes
au tableau qu’il copié, & puis en fuivant leurs
contours avec dé la pierre noire fur les fils du côté
de l’endroit, en forte que les traits paroiffent également
& devant & derrière ; & afin qu’on puiffe
defliner plus sûrement & plus correctement, on
foutient les cartons avec une longue & large table
de bois,
A l’égard du tableau ou deffein original fur lequel
l ’ouvrage doit s?achever, il eft fufpendu au doS du
hauteliflier, & roulé fur une longue perche de laquelle
on en déroule autant qu’il eft néceffaire, & à
mefure que la piece s’avancé.
Outre toutes les pièces du métier dont on vient
de parler, qui le compofent, ou qui y font pour la
plûpart attachées, il faut trois principaux outils ou
inftrumens pour placer les laines ou foies, les arranger
& les ferrer dans les fils de la chaîne. Les outils
font un & broche, un peigne, & une aiguille de fer.
La broche eft faite de bois dur, comme de buis
ou autre femblable efpece : elle eft de fept à huit
pouces de longueur, de huit lignes environ de grof-
feur & de figure ronde, finiffant en pointe avec un
petit manche. Ç ’eft fur cet infiniment qui fert comme
de navette, que font dévidées les foies, les laines
, ou l’or & l’argent que Fouvrier doit employer.
Le peigne eft aufli de bois, de huit à neuf pouces
de longueur & d’un pouce d’épaiffeur du côté du
d o s , allant ordinairement en diminuant jufqu’à l’extrémité
des dents qui ont plus ou moins de diftançe
les unes des autres, fuivant le plus ou le moins de
fineffe de l’ouvrage.
Enfin l’aiguille de fer , qu?on appelle aiguille à
preffer., a la forme des aiguilles ordinaires , mais plus
groffe .& plus longue. Elle fert à preffer les laines
& les foiès, lorfqü’il y a quelque contour qui ne va
pas bien : le fil dé-laine, de foie , d’or ou d’argent,
'dontfe couvre la chaîne'des tapifleries, & que dans
les manufactures d’étoffes on appelle treme, fe nomme
ajfure parmi les hautelifliers françois.
Toutes chofes étant préparées pour l’ouvrage,
' & l’ouvrier le voulant commencer, il fe place à l’envers
de la piece, le dos tourné à fon-deffein ; de
forte qu’il travaille, pour ainfi dire, à l’aveugle,ne
voyant rien de ce qu’il fait, & étant obligé d'e jfe
déplacer, & de venir au-devant du métier, quand
il veut en voir l’endroit & en examiner les défauts
pour les corriger avec l’aiguille à preffer.
Avant de placer fes foies ou fes laines, le hauteliflier
fe tourne & regarde fon deffein ; enfuite de-
quôi ayant pris une broche chargée de la couleur
convenable, il la place entre les fils de la chaîne
qu’il fait croifer avec les doigts par le moyen des
lijfes attachées à la perche; ce qu’il recommence
chaque fois qu’il change de co.uleur. Là foie ou la
laine étant placée , il la bat avec le peigne ; & lorf-
qu’il en a mis plufieurs rangées les unes fur les autre
s, il va voir l’effet qu’elles font pour en réformer
les contours avec l’aiguille à preffer, s’il en eft be-
foin.
- Quand les pièces font larges, plufieurs ^ouvriers
y peuvent travailler à la fois : à mefure qu’elles s’avancent,
on roule fur l’enfuble d ’en-bas ce qui eft;
fa it , & on déroule de deffus celle d’en-haut autant
qu’il faut de la chaîne pour continuer de travailler;
c’ eft à quoi fervent le grand & petit tentoy. On en
fait à proportion autant du deffein que les ouvriers
ont derrière eux. Voye{ nos Pl.deTapiJf. & leurexpU
L’ouvrage de la haute-lijfe eft bien plus long à
faire que celui de la baße - liffe, qui fe fait prefque
deux fois aufli vîte. La différence qu’il y a entrô
ces deux tapifleries, confifte en ce qu’à la bajfe-lijjh
il y a un filet rouge, large d’environ une ligne qui
èft mis de chaque côté du hauf en-bas, & que ce filet
n’eft point à la haute-liße. Dicl. du Com. 6* Chambers.
Lisse , (TapiJJîer. ) les Tapifliers de hautç-liffe &
de baffe-lifje, les Sergiers, les Rubaniers, ceux qui
fabriquent des brocards, & quelques autres ouvriers,
nomment lijfe, ce qu’on appelle chaîne dans les métiers
de Tilferans & des autres fabriquans de draps
& d’étoffes, c’eft-à-dire les fils étendus de long fur
le métier, & roulés fur les enfubles, à-travers del-
quels paflent ceux de la treme. Voye{ C haîne.
Hatite-Aj^e, c’eft celle dont la lijfe ou chaîne eft
dreffée debout & perpendiculairement devant l’ouvrier
qui travaille ; la batte-lijfe étant montée fur
un métier pofé parallèlement à l’horifon, c’eft-à-
dire , comme le métier d’un tifférand. Voyeç Haute
lisse & Basse-lisse.
Lisses. Les Haute-lijfers appellent ainfi de petites
ficelles ou cordelettes attachées à chaque fil de la
chaîne de la haute lijfe avec une efpece de noeud
coulant en forme de maille ou d’anneau aufli de ficelle.
Elles fervent à tenir la chaîne ouverte, & on
les baiffe ou on les leve par le moyen de ce qu’on
appelle la perche de lijfe, où elles font toutes enfilées.
Foyt{ Haute-lisse.
Lisse haute ,(TapiJ/îeri) ce font des.étoffes dont
la chaîne eft purement- de foie & la treme de laine
ou qui font toutes de foie,comme les ferges de Rome,'
les dauphines, les étamines, les férandines & burats,
les droguets de foie. Ou leur donne le nom d'haute*
lijfe dans la fayetterie d’Amiens.
LISSE , adj. ( Jardinage. ) il fe dit d’un fruit qui
a l’écorce toute unie , tel que le marron, la châtaigne
dépouillés de leur première coffe.
Lissé , grand liffé, e’eft, parmi les Confifeurs, du
fucre cuit affez pour former un filet affez fort pour
ne point fe rompre en ouvrant les deux doigts qu’on
y a trempés, & pour prendre ainfi une affez grande
étendue.
L ffé , petit, c’eft quand le fucre fait entre les deux
doigts ün filet imperceptible & très aifé à être rompu
pour peu qu’pn écarté les doigts.
LISSER, v . a£l. c’eft pafler ou polir à la liffe. F 3ye%
l'article Lisse.
Lisser , perche à , terme de Cartier, c ’eft une perche
de bois fufpendue au plancher par un anneau de fer,
& qui parTautre bout defeend fur l’établi du lifféur.
Cette perche a à fon extrémité une entaille dans la