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la nature du gfais -, qui s’âbbreuvè volontiers dëS
efprits de Ja chaux ; .parce que le ciment fe trouvant
alors dépourvû de cet agent , n’auroit pas
feul le pouvoir de -s’accrocher & de s’incorporer
dans le grais^, qui a befoin de tous ces fecours, pour
faire une liaifon folide.
Une des caules principales de la dureté du grais -,
vient de ce qu’il fe trouve prefque toujours à dé-
c o u v e r t , & qu’alors l’air le durcit extrêmement ;
ce qui doit nous inffruire qu’en général, toutes les
-pierres qui fe trouvent dans la terre fans beaucoup
creufèr, font plus propres auxbâtimens que celles
-que l’on tire dit fond des carrières ; c’eft à quoi les
anciens apoortoient beaucoup d’attention : car pour
rendre leurs édifices d’une plus longue durée, ils ne
f e fervôient que du premier banc des carrières >
précautions que nous ne pouvons prendre en France
, la plupart de nos carrières étant .prefque ufées
'dans leur fuperficie.
Il eft bon d’obfèrver que la taille du grais eft fort
dangereufe aux ouvriers novices, parla fubtilité de
la vapeur qui en fort, & qu’un ouvrier inftruitévite,
en travaillant en plein air & à contrevent. Cette
vapeut eft fi fubtile , qu’elle traverfe les pores du
verre ; expérience faite -, à ce qu’on dit , avec une
■ bouteille remplie d’eau , & bien bouchée , placée
près de l ’ouvrage d’un tailleur de gr-ais , dont le
fond s’eft trouvé quelque jours-après, couvert d ’une
pouffiere très fine.
Il faut encore prendre garde lorfque 4’onpofe‘des
'dalles , feuils, canivaux & autres ouvrages en grais
de cette efpece, de les bien caller & garnir par-def-
fous pour les empêcher de fe gauchir ; car on ne
pourroit y remédier qu’en les retaillant.
Il y-a.plufieurs raifons qui empêchent d’employer
le grais à Paris ; la première eft, que la pierre étant
affez abondante , on le relegue pour en faire du pavé.
La fécondé e f t , que fa liaifon avec le mortier
n’eft pas fi bonne, & ne dure pas fi long-tems que
celle de la pierre , beaucoup moins encore avec le
plâtre. La-troifieme eft , que cette efpece de pierre
coutëroit 'trop -, tant pour la matière, que pour la
main-d’oeuvre.
La fécondé efpece de grais qui eft la plus dure ,
-ne fort qu’à faire du pavé ; & pour cet effet fe taille
de trois différentes grandeurs. La première , de
huit à neuf .pouces cubes, fert à paver les rues , places
publiques , grands chemins , &c. 6c fe pôle à
fec fur du fable de riviefe. La fécondé, de fix à fept
pouces cubes ,.fert à paver les cours , baffes-cours ,
perrons, trotoirs, &c. & fe pofe auffi à fec fur du
ïable de riviere , comme le premier, ou avec du
mortier dè chaux & de ciment. La troifieme , de
quatre à cinq pouces cubes, fert à paver les écuries
, cuifines, lavoirs, communs, &c. 6c fe pofe
avec du mortier de chaux & ciment.
La pierre de C a ën , qui fe tire des carrières de
ce nom, en Normandie , 6c qui tient de l’ardoife,
eft fort noire, dure, & reçoit très-bien le poli ; on
en fait des compartimens de pavé dans les veftibu-
le s , falles à manger, fallons, &c.
Toutes ces efpeces de pavés fe payent à la toi-
fe fuperficielle.
II fe trouve dans la province d’Anjou, aux environs
de la ville d’Angers , beaucoup de carrières
très-abondantes en pierre noire & affez dure , dont
on fait maintenant de l’ardoife pour les couvertures
des bâtimens. Les anciens ne connoiffant pas
l’ufage qu’on en pouvoit faire , s’en fervoient dans
la conftruttion des bâtimens, tel qu’il s’en voit encore
dans la plupart de ceux de cette ville, qui font
faits de cette pierre. On s’en fert quelquefois dans
•les compartimens de payé , en place de celle de
?Caën,
MAÇ
D is différentes pierres tendres. Les pierres tendre«
ont l’avantage de fe tailler plus facilement que les
autres, & de fe durcir à l ’air. Lorfqu’elles ne font
pas bien choifies, cette dureté ne fe trouve qu’aux
paremens extérieurs qui fe forment en croûte , 6t
l’intérieur fe mouline : la nature de ces pierres
doit faire éviter de les employer dans des lieux humides
; c’eft pourquoi on s’en fert dans les étages
fupérieurs , autant pour diminuer le poids des pierres
plus dures 6c plus ferrées, que pour les décharger
d’un fardeau confidérable qu’elles font incapables
de foutenir > comme on vient de faire au fécond
ordre du portail de S, Sulpice , 6c au troifieme
de l’intérieur du Louvre.
La -pierre de Saint-Leu qui fe tiré des Carrières j
près Saint-Leu-fur-Oife, 6c qui porte depuis deux,
julqn’à quatre piés de hauteur de banc , fe divifè,
en plufieurs efpeces. La première qu’on appelle ,
pierre de Saint-Leu, & qui fe tire d’une carrière dè
ce nom, eft tendre, douce, 6c d’une blancheur tirant
un peu fur le jaune. La fécondé qu’on appelle
de Maillet -, qui fe tire d’une carrière appëllée ainfi-,
eft plus ferme , plus pleine 6c plus blanche, & ne
fe délite point : elle eft très propre aux ornemens
de fculpture & à la décoration des façades. La troi-
•fieme qu’on appelle de Troty, eft de. même efpece
que cette derniere ; mais de toutes les pierres, celle
dont le lit eft le plus difficile à trouver ; on ne le
découvre que par des petits trous. La quatriemè
s’appelle pierre de Vergelét : il y en a de trois fortes.
La première qui fe tire d’un des bancs des carrières
de Saint-Leu , eft fort dure -, ruftique -, 6c remplie
de petits trous. Elle réfifte très-bien'au fardeau,
& eft fort propre aux bâtimens aquatiques ; on s’en
fert pour faire des voûtes de ponts , de ca ve s, d’écuries
& autres lieux humides. La féconde forte
de vergelée qui eft beaucoup meilleure, fe tire des
carrières de Villiers, près Saint-Leu* La troifieme
qui fe prend à Carrière-fous le-bois , eft plus ten-*
dre, plus grife 6c plus remplie de veine que le Saint-
Leu , & ne fauroit réfifter au fardeau.
La pierre de tuf, du latin tophus, pierre ruftiqué,
tendre & trouée , eft une pierre pleine de trous, à-
peu près femblable à celle de meuliere, mais beaucoup
plus tendre. On s’en fert en quelques endroits
en France & en Italie, pour la conftruûion des bâtimens.
La pierre de craye eftune pierre très-blanche &
fort tendre, qui porte depuis huit pouces jufqu’à
quinze pouces de hauteur de banc, avec laquelle
on bâtit en Champagne, & dans une partie de la
Flandres. On s’en fert encore pour tracer au cor-,
deau, & pour deffiner.
Il fe trouve encore à Belle ville, Montmartre, &
dans plufieurs autres endroits, aux environs de Paris
, des carrières qui fourniffent des pierres q.ue l’on
nomme pierres à plâtre, Sc qui ne font pas bonnes à
autre chofe. On en emploie quelquefois hors de Paris,
pour la conftruftion des murs de clôture, bar-,
raques, cabanes, & autres ouvrages de cette efpece*
Mais il eft défendu fous de féveres peines aux entrepreneurs
, & même aux particuliers, d’en employer
à Paris, cette pierre étant d’une très-mau-
vaife qualité, fe moulinant 6c fe pourriffant à l ’humidité.
De la pierre félon fes qualités. Les qualités de la’
pierre dure ou tendre, font d’être v iv e , fîere, franche,
pleine, trouée, poreufe, choqueufe, geliffe,'
verte ou de couleur.
On appelle pierre vive celle qui fe durcit autant
dans la carrière que dehors, comme les marbres de
liais, &c.
Pierre fiere, celle qui eft difficile à tailler, à caufe
de fa grande fécherefle, 6c qui réfifte au cifeau,
MAÇ
comme, lahelle-haÇhe, te liais ferault, & la plûpatt;,
des piefres dures. \ k -
Pierre. franc f e , celle qui eft la plus parfaite que
l’on puiffe tirer dç la carrière, & qui ne tient ni de
la dureté du cieL de la carrière, ni de la qualité de
c.êllç& qui font dans le fond.
, Pierre pleine, toute pierre dure qui n’a ni cailloux,
ni coquillages, ni tro,us, ni moye , ni moheres,,
comme font les ,plus beaux liais , la pierre de t °n_
qere, &c. # j
Pierre entière., cçlle qui n’eft ni caffee ni fele e,
dans laquelle il ne fe trouve ni fil, ni veine courante
ou traverfante ; on le connoît facilement par le fon
qu’elle rend ,en la frappant avec le marteau. ^
Pierre trouée, poreufe, ou choqueufe, celle qui étant
taillée eft remplie.de trous dans fes paremens, tel
que le ruftic de Meudon, le tu f, la meulierç, &c.
Pierre geliffe ou verte, celle qui eft nouvellement
tjrée de la carrière, & qui ne s’eft pas encore dépouillée
de fon humidité naturelle..
Pierre de couleur, celle qui tirant fur quelques
couleurs, caufe, une variété quelquefois agréable
dans les bâtimens,
. De la pierre félon fes défauts* Il n’y a point
de pierre qui n’ait des défauts capables de la faire
rebuter, fort par rapport à elle-même, foit par la
négligence ou mal-façon des ouvriers qui la mettent
en oeuvre, ç’eft pourquoi il faut éviter d’employer
celles« que l’on appelle ainfi.
Des défauts de la pierre par rapport à elle-même.
Pierre de cielt celle que l’on tire du premier banc des
carrières ; elle eft le plus fouvent défettueufe ou
compoféede parties très-tendres & très-dures indifféremment
, félon le lieu de la carrière où elle s’eft
trouvée.
Pierre coquilleufe ou coquillitre, celle dont les paremens
taillés font remplis de trous ou de coquillages.
, comme la pierre de S. N om, à Verfailles.
Pierre de fouprét celle du fond de la carrière de
S. Leu, qui eft trouée, poreufe , & dont on ne peut
fe fervir à caufe de fes mauvaifes qualités.
Pierre de fouchet, en quelques endroits, celle du
fond de la carrière, qui n’étant pas formée plus que
le bouzin,. eft de nulle valeur.
Pierre humide , celle qui n’ayant pas encore eu
le tems de fécher, eft fujette à fe feuilleter ou à fe
§e^er* • - n .
Pierre graffe, celle qui étant humide, eft par con-
féquent fujette à la gelée , comme la pierre de cli-
quart.
Pierre feuilletée, celle qui étant expofée à la gelée,
fe délite par feuillet, & tombe par écaille, comme
la lambourde.
Pierre délitée , celle qui après s’être fendue par un
fil de fon lit, ne peut être taillée fans déchet, & ne
peut fervir après cela que pour des arrafes.
Pierre moulinée,, celle qui eft graveleufe, & s’égraine
à l’humidité, comme la lambourde qui a particulièrement
ce défaut.
Pierre fêlée , celle qui fe trouve caffée par une
veine ou un fil qui court ou qui traverfe.
Pierre moyêe, celle dont le lit n’étant pas également
dur, dont on ôte la moye & le tendre, qui diminue
fon épaiffeur, ce qui arrive fouvent à la pierre
de la chauffée.
Des défauts de la pierre, par rapport à la main-d'oeuvre.
On appelle pierre gauche, celle qui au fortir de
ta main de l’ouvrier, n’a pas fes paremens oppofés
parallèles, lorfqu’ils doivent l’être îuivant l’épure(r),
ou dont les furfaces ne fe bornoyent point, & qu’on
ne fauroit retailler fans déchet.
Çt) Une«/>u« eft un dèffein oudéveloppement géométrique
des lignes droites 6c courbes des voûtes.
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Pierre coupée, celle qui; ayant été mal taillée, &
par conféquent gâtée, ne peut fervir pour l’endroit
où elle avoit été, deftinée.
Pierre en délit, ou délit en joint, celle qui dans un
cours d’affifes, n’eft pas pofée fur fon lit delà même
maniéré qu’elle a été trouvée dans la carrière, mais
au contraire fur un de fes paremens. On diftingue
pierre en délit de délit tri joint, en ce que l’un eft
lorfque la pierre étant polee, le parement de lit fait
parement de face, & l’autre lorfque ce même parement
de lit fait parement de joint.
De la pierre félon fes façons. On entend par façon
la première forme que reçoit la pierre , iorfqn’elle
fort de la çarrierç pour arriver au chantier, ainfi
que celle qu’on lui donne par le fecours de l’appa*
reil, félon la place qu’elle doit occuper dans le bâ-
tifment ; c’eft pourquoi on appelle.
Pierre au binard, celle qui eft en un fi gros volume
, & d’un fi grand poids, qu’elle ne peut être tranf-
portée fur l’attelier, par les charrois ordinaires, 6c
qu’on eft obligé pour cet effet de tranfporter fur un
binard, efpece de chariot tiré par plufieurs chevaux
attelés deux à deux, ainfi qu’on l’a pratiqué au Louvre
, pour des pierres de S. Leu, qui pefoient depuis
douze jufqu’à vingt-deux & vingt-trois milliers,
dont on a fait une partie des frontons.
Pierre d'échantillon, celle qui eft afliijettie à une
mefure envoyée par rappâreillenr aux carrières,
& à laquelle le carrier eu obligé de fe conformer
avant que de la livrer à l’entrepreneur ; au lieu que
toutes les autres fans aucune mefure conftatée, f*
livrent à la voie, & ont un prix courant.
Pierre en debord, celle que les carriers envoient
à l’attelier, fans être commandée.
Pierre velue, celle qui eft brute, telle qu’on l’a
amenée de fa carrière au chantier, & à laquelle on
n’ a point encore travaillé.
Pierre bien faite, celle où il fe trouve fort-peu dé
déchet en l’équariffant.
Pierre èbouffnée, celle dont on a ôté tout le tendre
& le bouzin.
Pierre tranchée, celle où l’on a fait une tranchée
avec le marteau ,fig. 89. dans toute-fa hauteur, â
deffein d’en couper.
Pierre débitée , celle qui eft fciée. La pierre dure
& la pierre tendre ne fe débitent point de la même
maniéré. L’une fe débite à la feie fans dent ,fig. /4J,«
avec de l’eau 6c du grais comme le liais , la pierre
d’Arcueil, &c. 6c l’autre à la feie à dent, fig. 14S.
comme le S. L eu , le tuf, la craie , &c,
Pierre de haut & bas appareil, celle qui porte plus
ou moins de hauteur de banc,après avoir été atteinte
jufqu’au vif.
Pierre en chantier, celle qui fe trouve callée par
le tailleur de pierre, & difpofée pour être taillée.
Pierre efmillêe, celLe qui eft équarrie & taillée
groffierement avec la pointe du marteau, pour être
employée dans les fondations ,• gros murs, &c,ainfi
qu’on l’a pratiqué aux cinq premières aflifes des fon,-
demens de la nouvelle églife de Sainte Génevieve,
& à ceux des bâtimens de la place de Louis X V .
Pierre hachée, celle dont les paremens font dref-
fés avec la hache A du marteau bretelé fig. $3*
pour être enfuite layée ou ruftiquée.
Pierre layée, celle dbnt les paremens font travail-
lés au marteau bretelé, fig. 31. , .
Pierre ruftiquée , celle qui ayant été equarne êc
hachée, eft piquée groffierement avec la pointe dt&
marteau, fig. 8$,. # #
Pierre piquée , celle dont les paremens font piques.
avec la pointe du marteau-, fig. $1.
Pierre ragrée aufer , ou ri fi le , celle-qui a été paffise
au riflard, fig -1 14& iif»