de Judà, les Mages vinrent d’Orient à Jérufalem
pour s'informer du lieu de la naiffance , le nommant
roi des Juifs : ubi ejl qui natus efi rex Judaorum? qu’Hé-
rode & toute la ville en furent allarmés; mais que ce
prince prenant le parti de' diffimuler, fit affembler les
principaux d’entre les prêtres, pour favoir cl’eux
öïi de voit naître le Chrift ; que les prêtres lui répondirent
que c’ëtoit à Bethléem de Juda ; qu’Kérode
la'iffa partir les Mages poür aller adorer le Meflie nouveau
né’; qu’il fe contenta de leur demander avec
inftance de s’informer avec foin de tout ce qui con-
cernoit Cet enfant, afin qu’étant lui-même inftriiit',
il pût , difoit-il, lui rendre auffi fes hommages ; mais
que fon deffein fecret étoit de profiter de ce qu’il apprendrait,
pour lui ôter plus fûrement la vie ; que
les Mages, après avoir adoré Jefus-Chrift* & lui
avoir offert leurs préfens, avertis par Dieu meme,
prirent pour s’ en retourner une route differente de
celle par laquelle ils etoient venus, évitant amli de
reparaître à la cour d’Hérode ; que Jofeph reçut par
Un ange l’ordre de fe fouftraire à la colcre de ce
prince en fuyant en Egypte avec fa famille ; qn’Hé-
rode voyant enfin que les Mages \va avoient manque
de parole, fit tuer tous.les enfans de Bethléem &
des environs depuis l’âge de deux ans & au-dcflous,
félon'lë tems de l’apparition de l’étoile ; qifaprès la
mort de ce prince, Jofeph eut ordre de retourner
avec l’enfant & (a mere dans.la terre d Ifraël; mais
qu’ayant appris qu’Archelaiis fils d Herode, regnoit
dans la Judée, il craignit, & n’ofa y aller demeurer;
de forte que fur un fonge qu’il eut la nuit, il réfolut
de'fé retirer en Galilée, & d’établir fon féjour à
Nazareth, afin que ce que les Prophètes avoient dit
fût accompli, que Jefus feïoit nommé Nazaréen : &
i>cnit in ttrram Jfracl, audiens autem quod Archüaus
ttenant in Judæi pro Herode pâtre fuo, timens illb ire,
& admonïius J'onims, fecefftt in partes Galiléts & Vf-*
niens habitavit in civitate quod vocatur Nazareth , ut
adimplerettir quod-diüum eji per Propketas, quoniam
Nardreus vocabitur.
L’évangéliftë diftingùe là Bethléem par le terri-
foirefoù elle,étoit fituée, afin *qu’on ne la confondît
pas avec une autre ville de même nom , fituée dans'
la G alilée, & dans la tribu de Zabulon.
Saint Luc commence fon évangile par nous affurer
qu’il a fait une recherche exacte & particuliere de
tout ce qui regardoit notre Sauveur, ajjecuto àprin-
cipiô omnia diligenter. En effet, il eft le feul qui nous
ait raconté quelque chofe de l’enfant Jefus. Après
ce prélude fur fon exactitude hiftorique , il dit que
l’ange Gabriel fut envoyé de Dieu dans une ville
de Galilée, nommée Nazareth, à une vierge nommée
M arie, époufe de Jofeph, de la famille de David;
que Céfar ayant enfuite ordonné par un édit,
que chacun fe feroit inferire, félon fa famille, dans
les regiftres publics dreffés à cet effet : Jofeph &
Marie montèrent en Judée, & allèrent à Betheléem
Je faire inferire, parce que c’étoit dans cette ville
que fe tenoient les regiftres de ceux de la famille de
David ; que le tems des couches de Marie arriva
précifément dans cette circonftance ; que lés bergers
de là contrée furent avertis par un ange de la
naiffance du Sauveur ; qu’ils vinrent auffi-tôt l’adorer
; que huit jours après on circoncit l’enfant, qui
fut nornmé Jefus ; qu’après le tems de la purification
marqué par la loi de Moïfe, c’eft - à-dire fept jours
immondes & trente - trois d’attente, on porta l’enfant
à Jérufalem pour le préfenter au Seigneur, &
faire l’offrande accoûtumée pour les aînés ; que ce
précepte de la loi accompli, Jofeph & Marie revinrent
en Galilée avec leur fils, dans la ville de Nazareth
leur demeure, in civitatemfuam Nazareth; que
l’enfant y fut élevé croiffant en âge & en fageffe ;
que fes parens ne manquoient point d’aller tous les
ans une fois à Jérufalem ; qu’ils l’y perdirent lorf-
cju’il n’avoit que douze ans; & qu’après • l’avoir
cherche avec beaucoup d’inquiétude, ils le trouvèrent
dans le temple difputant au milieu des doèteurs ,
& ut pcrficerunt omnia fecundum legem Domini, reverji
funt in Galïleam in civitatem fuam Nazareth. Puer autem
crefcebat & confortabatur plenusJapientiâ, & gratia
. Dei erat in illo, & ibant parentes ejus per omnes annos
in Jérufalem , in die folemni pafehæ.
Tels font les récits différens des deux évangéliftes.
Examinons-les maintenant en détail. i°. S. Mathieu
ne dit rien de l’adoration des bergers, mais il n’oublie
ni cëlle des Mages , ni la cruauté d’Hérode j
deux événemens qui mirent Jérufalem dans le mouvement
& le trouble. S. Luc qui fe pique d’être minutieux
, comme il le dit lui-même, multi quidem
coriati funt ordinare narrationem quoe in nobis complétez
faut reniTil ; vifum efi & mihi ajfecuto omnia à principio
diligenter : ex ordine, tibi feribere , optitne Théophile, ut
cognofcas eorum verborùm de quibus eruditüs es verita-
tem; cependant il fë tait & de l'adoration des Mages
& de la fuite de Jofeph en Egypte, & du maffacre
des innocens. Pouvoir-il ignorer des faits fi publics ,
fi marqués, fi finguliers,’ s’ils font véritablement arrivés
? & s’il n’a pu les ignorer,quelle apparence que
lui, qui affeûe plus d’exaftitude que les autres, les
ait obmis ? n’eft-ce pas là un préjugé contre faint
Matthieu ?
i ° . S. Mathieu dit qu’après le départ des Mages de
Bethléem, Jofeph alla en Egypte avec l’enfant & Marie,
& qu’il y demeura jufqu’à la mort d’Hérode. Saint
Luc dit qu’ils demeurèrent à Bethléem jufqu’â ce que
le terris marqué pour la purification de 1-a femme accouchée
fût accompli ; qu’alors on porta l’enfant à
Jérufalem pour l’offrir à D ieu dans le temple, oii Si-
méon & la prophéreffe Anne eurent le-bonheur de le
voir ; que de-là ils retournèrent à Nazareth, où Jefus
fut élevé au milieu de fa famille ; & que fes parens ne
manquoient pas d’aller chaque année à Jérufalem ÿ
dans le tems de la pâque, avec leur fils, à qui il arriva
de fe dérober une fois de leur compagnie poui*
aller difputer dans les écoles des do&eurs, quoiqu’il
ri’eût encore que douze ans. Quand eft-il donc allé
en Egypte ? quand eft-ce que les Mages l’ont adoré ^
Ce dernier fait s’eft paffé à Bethléem, à ce que dit
S. Matthieu ; il faut donc que ce foit pendant les
quarante jours que Jofeph & Marie y féjournerent
en attendant le tems de la purification. Pour le
voyage d’Egypte, fi Jofeph en reçut l’ordre immédiatement
après l’adoration des Mages, enforte qu’en
même tems que ceux - ci évitoient la rencontre
d’Hérode par un chemin, celui-ci en évitoit la colère
en fuyant en Egypte : comment ce voyage
d’Egypte s’arrangera - 1 - il avec le voyage de Beth-.
léem à Jérufalem, entrepris quarante jours après la'
naiffance de Jefus, avec le retour à Nazareth, &c les
voyages faits tous les ans à la capitale, expreffé-
ment annoncés dans S. Luc? Pour placer la fuite en
Egypte immédiatement après l’adoration des Ma-
oes, reculera-1-on celle-ci jufqu’après la purification,
lorfque Jefus ni fa famille n’étoient plus à
Bethléem ? Ce feroit nier le fond de l’hiftoire pour,
en défendre une circonftance. Reculera-t-on la
fuite de Jofeph en Egypte jufqu’à un tems plus commode
, & les prômenera-t-on à Jérufalem & de-là à
Nazareth, comme le dit S. Luc ? Mais combien de
préjugés contre cette fuppofition? Le premier, c’eft
que le récit de S. Matthieu femble marquer précifément
que Jofeph alla de Bethléem en Egypte immédiatement
après l’adoration des Mages, & peu de
tems après la naiffance de Jefus. Le fécond, qu’il ne
falloir pas un long tems pour qu’Hérode fût informé
du départ des Mages, Bethléem n’étant pas. fort
éloignée de Jérufalem, & la jaloufie d’Herode le te-;
bant très-attentif ; auffi ne tarda-t-il guère à exercer
la cruauté ; fon ordre inhumain d’égorger lés enfans
fut expédié auflî-tôt qu’il connut que les Mages
l’avoient trompé, videns quod illufùs effet à Magis ,
rrtifit, &c. On rie peut donc lâiffér à Jofeph le tems
d’aller à Jérufalem & dé-là à Nazareth, avant que
d’avoir prévenu par fa fuite les mauvais déffeins
d’Hérode. Le troifieme, c’éft que le commandement
fait à Jofeph preffoit, puifqri’il partit dès la nuit,
qui confurgens accepït püerutti & matrem ejus hocle , &
fecefjit in Egyptum. Et comment dans la riéceflité
préflan te d’échapper à Hérode lui auroit-il été enjoint
d’aller de Nazareth en Egypte, c’eft-à-dire dé
retourner à Jérufalem oii étoit Hérode t & de paf-
fer du côté de Bethléem oii ce prince devôit chercher
fa proie, afin de traverfer toute la terre d’Ifraël
& le royaume de Juda-, pour chercher l’Egypte à
l’autre bout ; car on fait que c’eft là le chemin. Etant
a Nazareth, il étoit bien plus fimple de fuir du côté
de Syrie, & il y a toute apparence que S. Matthieu
n’envoye Jefus en Egypte que parce que cettë contrée
étoit bien plus voiiine du lieu où Jofeph féjour-
noit alors ; c’eft-à-dire que cet évangélifte fuppofe
manifeftement par fon récit que le départ de la tainte
famille fut de Bethléem & non de Nazareth. Le quatrième
, c’eft qu’Hérode devoit chercher à Bethléem
&: non à Nazareth ; que ce fut fur cette première
ville & non fur l’autre que tomba la fureur du tyran,
& que par conféquent Jofeph ne devoit fuir avec
fon dépôt que' de Bethléem & non de Nazareth, où
il étoit en fureté. Le cinquième, c’eft que S Luc
nous fait entendre que Jefus, après fon retour à
Nazareth, n’en fortit plus que pour aller tous les
ans à Jérufalem avec lès parens, & que c’eft là que
fe pafferent les premières années de Ion enfance, &
hon en Egypte.
3°. Il femble que S. Matthieu ait ignoré que Nazareth
étoit le féjour ordinaire de Jofeph & de Marie,
& que la naiffance de Jefus à Bethléem n’a été qu’un
effet du hafard ou de la Providence, une fuite de là
defeription des familles ordonnée par Céfar. Car
après avoir dit Amplement que Jefus vint au monde
dans la ville de Bethléem , y avoir conduit les Mages
& l’avoir fait fauver devant la perfécution d’Hérode ;
quand après la mort de ce prince, il fe propofe de
le ramener dans fon p ays, il ne le conduit pas directement
à Nazareth en Galilée, mais dans la Judée
où Bethléem eft fituée , & ce n’eft qu’à l’occafiori
de la crainte que le fils d’Hérode n’eût hérité de la
cruauté de fon pere, que S. Matthieu réfout Jofeph
à fe retiter à Nazareth en Galilée, & non dans ion
ancienne demeure, afin que les prophéties qui di-
foient que Jefus feroit nommé Nazaréen fuffent accomplies.
De forte que la demeure du Sauveur dans
Nazareth n’a été, félon S. Mathieu, qu’un événement
fortuit, ou la fuite de l’ordre de Dieu à l’ôcca-
fion de la crainte de Jofeph, pour l’accompliffement
des prophéties. Au lieu que dans S. Lu c, c’eft là
naiffance du Sauveur à Bethléem qui devient un événement
fortuit, ou arrangé pour l’accompliffement
des prophéties à l’occafion de l’édit de Célàr ; & fon
féjour à Nazareth n’a rien de fingulier, c’eft une
chofe naturelle ; Nazareth eft le lieu où demeurait
Jofeph & Marie, où l’ange fit l’annonciation, d’où
ils partirent pour aller à Bethléem fe faire inferire,
& où ils retournereat, après l’accompliffement du
précepte pour la purification des femmes accouchées
& l’offrande des aînés.
Voilà les difficultés qu’ont fait naître, dé la part
des antichrétiens, la diverfité des évangiles fur l ’adoration
des Mages, l’apparition de l’étoile, la fuitè
de Jofeph en Egypte , & le maffacre des innocens.
Que s’enfuit - il ? rien ; rien ni fur la vérité de la religion
, ni fur la fincérité des hiftoriens facrés.
Tom e IX %
Il y a bien de la différence entre la vérité de la reli-
gion.&la vérité de l’hiftoire, entre là certitude d’un
fait, & là fincérité dé celui qui le raconte.
La foi & la m orale, c’eft-à-dire le culte que nous
devons à Dieu par la foumiffion du coeur & de l'ef-
prit, font l’unique & le principal objet de la révélation,
& , autant qu’il eft polfible & raiforinable ;
lés faits & lés circonftances hiftoriques qui en accompagnent
le récit.
C ’eft en ce qui regardé cè culte divin & fpirituel
qüe Dieu a inlpiré les écrivains facrés , & conduit
leur plume d’ürie maniéré particulière 6c infaillible;
Poür ce qui eft du tiffu de l’hiftqire & des faits qui y
font mêlés , il les a laiffé écrire naturellement, comme
d’honnêtes gens écrivent * dans la bonne foi
& félon’leurs lumières, d’après les méritoires qu’ils
ont trouvés & crus véritables.
Ainfi les faits n’ont qu’une certitude morale plus
ou moins forte, félon la nature des preuves & les
réglés d’une critique fage & éclairée ; mais la religion
a une certitude infaillible, appuyée non-fèiilement
fur la vérité des faits qui y ont connexion, mais encore
fur l’infaillibilité de la révélation & l’évidencô
de la taifori.
Le doigt de Dieu fe trouvé marqué daris tout cè
qui eft de lui. Le Créateur a gravé lui-même dans
la créature ce qu’il infpiroit aux prophètes & aux
apôtres, & la raifon eft le premier rayon dé fa lumière
éternelle , une étincelle de fa fciencé. C ’eft delà
que la religion tient fà certitude, & non des faits
que M. l’-abbé d’Houteville, ni Abadie , ni àiicuri
autre doéteur ne pourra jamais mettre hors dé toute
atteinte, lorfque les difficultés feront propofées dans
toute lévir force;
M a g e s étoile des, ( Écrit, fac. ) Il y a différens ienti-
mens fur la nature de l’étoile qui apparut aux Mages.
Beaucoup de favans ont penfé que cetté étoitè
étoit quelque phenomene en forme d’aftrè, qui ayant
été remarqué par lés Mages avec des cifèonftancés
extraordinaires, leur parut être l’étoile prédite par
Bàlaam, & conféquemment ils fe déterminèrent à
la fuivre pour chercher le roi dont élle annonÇoit
ia venue; mais l’opinion particulière de M. Benoiftt
illuftre théologien, né à Paris dans lé dernier fiecle *
& mort en Hollande en 1718, m’a para d’Uri goût fi
fingulier, &rémplie d’idées fi neuves, qué jé ctois
faire plaifir à bien dès perfonnes, au liéu dé l’ex^
pofer ici dans toute fon étendue, de lés fénvoyer-à
ce qu’eo a dit M; Ghaufepié dans fon dictionnaire.
M A G E , ( Jurifprudé) Juge-mage , quafi major judex>
eft le titre que l’on donne en quelques villes dé Languedoc,
comme àTouIoufe au lieutenant du Sénéchal.
(dt)
MAGÉDAN, (Géàg. facrief liëii dé laPàîeftirie*
dans le canton de Dalmànutha. Saint Marc, c. viij.
Ÿ x. dit que jefus-Chrift s’étarit embarqué fur là
mer de Tibériade avèc feë difciples,. vint à Dalma-
riutha (faint Matthieu dit Magedan, & dans le grec
Magdala.) Il éft affez vrai-femblabié qué Médan,
Magedam , Delmana, ôc Delmdnutha font un mêmè
lieu près dé la fourcé dü.Jourdain nommé Dan, ait
pié dù morit Liban.’ (D . / .) t
MAGELLAN, Détroit de (Géogé) célèbre dans
l’Amérique feptentrionalëi
Cè fut en 1519, daris lé comffiëncement deS cOri**
quêtes éfpagnoles én Amérique, & au milieu des
grands fuccès des Portugais enÂfiè & en Afrique,
que Ferdinand Magalhaens , que riOUs nommons
Magellan y découvrit pour l’Efpagne le fameux détroit
qui porte fon nom ; qu’il entra lé premiér dans
la mer dii Sud; &t qü’eri voguant de l’Ocèident à
l’orient, il trouva les îles qù’ori nommé depuis Ma-
riahnes, & une des Philippines, Où il perdit la vie.
Magellari étoit un portugais auquel on avoit refufé
h