-de trente-neuf zéros , nombre beaucoup plus que
mille millions de fois plus grand que celui des fables
que pourrait contenir la terre entière , en fuppofant
qu’il tienne cent parties de fable dans la longueur
d’un pouce.
L ’expanlion ou l’étendue de la propagation des
parties de la lumière eft inconcevable : le dotteur
Hook montre qu’elle n’a pas plus de bornes que l’univers,
& il le prouve par la diftance immenfe de
quelques étoiles fixes, dont la lumière eft cependant
fenfible à nos yeux au moyen d’un télefcope. Ce
ne font pas feulement, ajoute-t-il , les grands corps
du foleil & des étoiles qui font capables d’envoyer
ainfi leur lumière jufques aux points les plus recules
des efpaces immenfes de l’univers, il en peut être
de même de la plus petite étincelle d’un corps lumineux,
du plus petit globule qu’une pierre à fufil aura
détaché de l’acier.
Le dofteür Gravefande prétend que les corps lu-
mineux font ceux qui dardent le feu , ou qui donnent
un mouvement au feu en droite ligne ; & il fait
cohfifter la différence de la lumière 8>c de la chaleur,
en ce que pour produire la lumière, il faut félon lui,
que les particules ignées viennent frapper les yeux,
& y entrent en ligne droite , ce qui n’eft pas nécef-
faire pour la chaleur. Au contraire, le mouvement
irrégulier femble plus propre à la chaleur ; c’eft ce
qui paroît par les rayons qui viennent dire&ement
du foleil au fommet des montagnes , lefquelles n’y
font pas à beaucoup près autant d’effet, que ceux
qui fc font fentir dans les vallées, & qui ont auparavant
été agités d’un mouvement irrégulier par plu-
•fieurs réflexions. Voyc^ F e u & F e u é l e c t r i q u e .
O n d em an d e s’i l p eu t y a v o i r d e la lumière fan s
c h a l e u r , o u d e la c h a le u r fan s lumière ; n o s fen s n e
p e u v e n t d é c id e r fu ffifam m en t c e t te q u e f t io n , la c h a le
u r é ta n t u n m o u v em e n t q u i e ft fu fc e p t ib le d’u n e
in fin i té d e d e g r é s , & la lumière Une m a t iè re q u i p e u t
ê t r e in fin im en t r a r e & f o ib l e ; à q u o i il f a u t a jo u te r
q u ’ i l n’y a p o in t d e c h a le u r q u i n ou s fo i t f e n f ib le ,
fan s a v o i r en m êm e tem s p lu s d’ in te n fi te q u e c e l le
d é s o rg an e s de n o s fen s . Voye^ C h a l e u r .
M. Newton obfe'rve que les corps & les rayons
de lumière agiflent continuellement les uns fur les
autres; les corps fur les rayons de lumière , en les
lançant, les réfléchiflant, & les réfra&ant ; & les
rayons de lumière fur les corps, en les échauffant,
& en donnant à leurs parties un mouvement de vibration
dans lequel confifte principalement la chaleur
: car il remarque encore que tous les corps fixes
lorfqu’ ils ont été échauffés au-delà d’un certain degré
, deviennent lumineux , qualité qu’ils paroiffent
devoir au mouvement de vibrations de leurs parties
; & enfin, que tous les corps qui abondent en
parties terreftres & fùljMuireufes , donnent de la lumière
s’ils font fuffifamment agités de quelque maniéré
que ce foit. Ainfi la mer devient lumineufe
dans une tempête ; le vif-argent lorfqu’il eft fecoué
dans le vuide ; les chats & les chevaux, lorfqu’on
les frotte dans l’oblcurité ; 1èrbois, le poiffon, & la
viande , lorfqu’ils font pourris. Voye[ PHOSPHORE.
Hawksbée nous a fourni une grande variété d’exemples
delà produftion artificielle de la lumière par
l’attrition des corps qui ne font pas naturellement
lumineux, comme de flambre frotté fur un habit de
laine, du verre fur une étoffe de laine, du verre fur
du verre , des écailles d’huitres fur une étoffe de
laine, & de l’étoffe de laine fur une autre, le tout
dans le vuide.
Il fait fur la plupart de ces expériences les réflexions
fuivantes, que différentes fortes de corps donnent
diverfes fortes de lumières , qui different foit
eu couleur, foit en force ; qu’une même attrition a
divers effets, félonies différentes préparations des
corps qui la fouffrent, ou la différente maniéré de
les frotter, & q u e les corps qui ont donné une certaine
lumière en particulier, peuvent être rendus par
la friâion incapables d’en donner davantage de la
même efpece.
M. Bernoulli a trouvé par expérience que le mercure
amalgamé avec l’étain, & frotté fur un verre,
produifoit dans l’air une grande lumière, que l’or
frotté fur un verre en produifoit auffi & dans un
plus grand degré ; enfin , que de toutes ces efpeces
de lumières produites artificiellement, la plus parfaite
etoit celle que donnoit l’attrition d’un diamant,
laquelle eft auffi vive que celle d’un charbon qu’on
fouftle fortement. Veye{ D i a m a n t , & E l e c t r i c
i t é .
M. Boyle parle d’un morceau de bois pourri &
brillant, dont la lumière s’éteignit lorfqu’on en eut
fait fortir l’air , mais qui redevint de nouveau brillant
comme auparavant, lorfqu’on y eut fait rentrer
l’air. Or il ne paroît pas douteux que ce ne fut-
là une flamme réelle, puifqu’ainfi que la flamme
ordinaire, elle avoit befoin d’air pour s’entretenir
ou fe conferver. f'oye^ P h o s p h o r e .
L ’attraûion des particules de la lumière par les
autres corps, eft une vérité que des expériences innombrables
ont rendues évidentes. M, Newton a
obfervé le premier ce phénomène ; il a trouvé par
des obfervations répétées, que les rayons de lumière
dans leur paflage près des bords des corps, foit opaques
, foit tranfparens, comme des morceaux de
métal, des tranchans de lames de couteaux, des verres
caftes, &c. font détournés de la ligne droite.
Voye-{ D i s t r a c t i o n .
Cette aâion des corps fur la lumière s’exerce à une
diftance fenfible, quoiqu’elle foit toujours d’autant
plus grande, que la diftance eft plus petite ; c’eft ce
qui paroît clairement dans le paflage d’un rayon
entre les bords de deux plaques minces à différentes
ouvertures. Les rayons de lumière lorfqu’ils paflent
du verre dans le vuide , ne font pas feulement fléchis
ou pliés vers le verre ; mais s’ils tombent trop
obliquement, ils retournent alors vers le verre, 6c
font entièrement réfléchis.
On ne fauroit attribuer la eaufe de cette réflexion
à aucune réfiftance du vuide ; mais il faut convenir
qu’elle procédé entièrement de quelque force
ou puiflance qui réfide dans le verre, par laquelle
il attire 6c fait retourner en-arriere les rayons qui
l’ont traverfé, & qui fans cela pafleroient dans le
vuide. Une preuve de cette vérité, c’eft que fi vous
frottez la furface poftérieure du verre avec de l’eau,
de l’huile, du m iel, ou une diflolution de vif-argent,
les rayons qui fans cela auroient été réfléchis, paf-
feront alors dans cette liqueur & au-travers ; ce qui
montre auffi que les rayons ne font pas encore réfléchis
tant qu’ils ne font pas parvenus à la fécondé
furface du verre ; car fi à leur arrivée fur cette fur-
face , ils tomboient fur un des milieux dont on vient
de parler ; alors ils ne feroient plus réfléchis, mais
ils continueroient leur première route, l’attraâion
du verre fe trouvant en ce cas contre-balancée par
celle dé la liqueur. De cette attraéfion mutuelle entre
les particules de la lumière, & celles des autres
corps ,-naiffent deux autres grands phénomènes, qui
font la réflexion & la réfra&ion de la lumière. On (ait
que la direélion du mouvement d’un corps , change
néceflairement s’il fe rencontre obliquement dans
fon chemin quelqu’autre corps ; ainfi la lumière venant
à tomber fur la furface des corps folides, il pa-
roîtroit par cela feul qu’elle devroit être détournée
de fa route, & renvoyée ou réfléchie de façon que
fon angle de réflexion fût ég a l, ( comme il arrive
dans la réflexion des autres corps ) à l’angle d’inci-
dençe; ç’eft auffi ce que fait yoîtl’expérience, mais
la caufe en eft différente dé celle dont nous venons
de faire mention. Les rayons de lumière ne font pas
réfléchis en heurtant contre les parties des corps
mêmes qui les réfléchiflent, mais par quelquespuif-
fances répandues également fur toute la furface des
corps , & par laquelle les corps agiflent fur la lumière
, foit en l ’attirant, foit en la repouffant, mais
toujours fans eontaél : cette puiflance eft la même
par laquelle dans d’autres circonftances les rayons
font réfraétés. Voye\ R éflexion <5* Ré f r a c t io n .
M. Newton prétend que tous les rayons qui font
réfléchis par un corps ne touchent jamais le corps,
quoiqu’à la vérité ils en approchent beaucoup. Il
prétend encore que les rayons qui parviennent réellement
aux parties folides du corps s’y attachent, &
font comme éteins & perdus. Si l’on demande comment
il arrive que tous les rayons ne foient pas réfléchis
à la fois par toute la furface , mais que tandis
qu’il y en a qui font réfléchis, d’autres paflent à-
travers,êc foient rompus :
Voici la réponfe que M. Newton imagine qu’on
peut faire à cette queftion. Chaque rayon de lumière
dans fon paflage à-travers une furface capable
de le brifer, eft mis dans un certain état tranfitoire,
qui dans le progrès du rayon fe renouvelle à intervalles
égaux ; or à chaque renouvellement le rayon
fe trouve difpofé à être facilement tranfinis à-travers
la prochaine furface réfraôante. Au contraire , entre
deux renouvellemens confécutifs, il eft difpofé
à être aifément réfléchi : & cette alternative de réflexions
& de tranfmiffions , paroît pouvoir être oc-
cafîônnée par toutes fortes de furfaces & à toutes
les diftances. M. Newton ne cherche pas par quel
genre d’àétion ou de difpofition ce mouvement peut
être prôdüit;; s’il confifte dans un mouvement de
circulation ou de vibration, foit des rayons, foit!
du milieu, ou en quelque chofe de femblable ; mais
il permet à ceux qui aiment les hypothèfes, de fup-
pofer que les rayons de lumière lorfqu’ils viennent à
tomber fur une furface réfringente ou réfraélante,
excitent des vibrations dans le milieu réfringent ou
réfraâant, & que par ce moyen ils agitent les par-'
lies folides du corps. Ces vibrations ainfi répandues
dans le milieu, pourront devenir plus rapides1
que le mouvement du rayon lui-même ; & quand-
quelque rayon parviendra au corps dans ce moment'
de la vibration ,- où le mouvement qui forme celle-
c i , confpirera avec le fien propre, fa vitefîe en fera
augmentée, de façon qu’il paflera aifément à-travers
de la furface réfraftante ; mais s’il arrive dans l’autre
moment de la vibration,dans celui où le mouvement
de vibration eft contraire au-fien propre, il fera aifément
réfléchi ; d’où s’en fui vent à chaque vibration
des difpofitions fucceffives dans les rayons , à être
réfléchis- ou tranfinis. Il appelle accès de facile réflexion
, le retour de la difpofition que peut avoir
le rayon à être réfléchi, & accès de facile tranfmif-
Jion, le retour de la difpofition à être tranfmis ; &
enfin, intervalle des accès, l’cfpacè de tems compris
entre les retours. Cela pofé, la raifon pour laquelle
les furfaces de tous les corps épais & tranfparens
réfléchiflent une partie des rayons dé lumière qui y
tombent & en réfraûent le refte, c’eft qu’il y a des
rayons qui au moment de leur incidence fur la fur-
face d u corps, fe trouvent dans des accès de réflexion
facile, & d’autres qui fe trouvent dans des accès
de tranfmiffion facile.
N o u s a v o n s d é jà r em a rq u é à l’ a r t ic le C o u l e u r ,
q u e c e t te th é o r ie d e M. N e w t o n , q u e lq u e in g é n ie u fe
q u ’ e l le f o i t , e ft e n c o r e b ie n é lo ig n é e d u d e g r é d ’é v i d
e n c e n é c e f fa i r e p o u r fa t is fa i r e l’e fp r it fu r ie s p ro p r ié té
s de la lümiere r é f lé c h ie .^ .R É F L E X iO N & M i r o i r .
Un rayon de lumière qui pafle d?un .milieu dans
un autre de différente denfité, & qui dans fon paffag
e , fé meut dans une dire&ion obliqué à la furfaeô
qui fépare les deux milieux , fera réfrafté ou détourné
de fon chemin, parce que les rayons font plus
fortement attirés par un milieu plus denfe que par
un plus rare. f'oyeçRÉFRACTiON.
Les rayons ne font point réfra&és en heurtant
contre les parties folides des corps, & le font au
contraire fans aucun contaft, & par la même force
par laquelle ils font réfléchis, laquelle s’exerce différemment
en différentes circonftances. Gela fe prouve
à-peu-près parles mêmes argumens qui prouvent
que la réflexion fe fait fans contaft.
f Pour les propriétés de la lumière rompue ou réfractée
, ■ Poyei R é f r a c t i o n & L e n t i l l e .
On Oblèrve dans le cryftal d’Iflande, une efpece dé
double réfra&ion très-différente de celle qu’on remarque
dans tous les autres corps. Voye[ à l'article
C r y s t a l d ’I s l a n d e , le détail de ce phénomène ,
& les conféquences que M. Newton en a tirées.
M. Newton ayant obfervé que l’image du foleil
projetée fur le mur d’une chambre obfcure par le$
rayons de cet aftre, & tranfmife à-travers un prif-
me , étoit cinq fois plus longue que large, fe mit à
rechercher la raifon de cette difproportion ; & d’expérience
en expérience , il découvrit que ce phénomène
provenoit de ce que quelques-uns des rayons
de lumières étoierit plus réfra&és que d’autres , ôe
que cela fuffifoit pour qu’ils repréfentaffent l’image
du foleil allongée. Voye{ P r i s m e .
De-là il en vint à conclure , que la lumière elle-
même eft un mélange hétérogène de rayons différemment
refrangibles, ce qui lui fit diftinguetr la
lumière en deux efpeces ; celle dont les rayons font
egalement refrangibles, qu’il appella lumière homo-
gene, Jimilaire ou uniforme ; & celle dont les rayons
font inégalement refrangibles , qu’il appella lumière
hétérogène. Voye{ R É F R A N G IB IL IT É .
Il n a trouvé que trois affeûions par lefquelles les
rayons de lumière différaflent les uns des autrés ; fça»
v o ir , la réfrangibilité, la réflexibilité & la couleur ;
or les rayons qui conviennent entr’eux en réfrangi-
bilites, conviennent auffi dans les autres affeêHons ,
d’où il s’enfuit qu’ils peuvent à cet égard être regardés
comme homogènes , quoiqu’à d’autres égards,
il fût poflible qu’ils fuffent hétérogènes.
Il appelle de plus , couleurs homogènes, celles qui
font reprefentees par une lumière homogène , & couleurs
hétérogènes, celles qui font produites par une
lumière hetérogene. Ces-définitions expliquées, il en
déduit plulieurs propofitions. En prdmier lieu , que
la lumière du foleil confifte en des rayons qui different
les uns des autres par des degrés indéfinis de ré-
frangibilités. Secondement, que les rayons qui different
en réfrangibilité , différeront auffi à proportions
dans les couleurs qu’ils repréfenteront lorfqu’ils
auront été féparés les uns des autres. Troifié;
mement, qu’il y a autant dé couleurs fimples & homogènes
, que de degrés de réfrangibilité ; car à chaque
degré différent de réfrangibilité, répond une couleur
différente.
Quatrièmement, que la blancheur femblable à
celle de la lu'nàere immédiate du foleil , eft un com-
pofé de fept couleurs primitives. Voye^ C o u l e u r .
Cinquièmement, que les rayons de lumière ne
fouffrent aucunes altérations dans leurs qualités par
la réfraûion.
Sixièmement, que là réfraéHori ne fauroit déeônl-
pôfér la lumière en couleurs qui n’y auroient pas été
mélées auparavant, puifque la féfraâion ne change
pas les qualités des rayons, mais qu’elle fépare feulement
les uns des autres ceux qui ont différentes
qualités , par le moyen de leurs différentes réfrangi-
bilités'.
Nous avons déjà obfervé que les rayons de lumière