néanmoins toujours une efpece de^/Z/ec donwrflique,
mais qui fut .bornée au droit de correÛion plus ou
moins étendu, félon l’ufage de chaque peuple.
Pour cequi.eft delayK/ùcepublique, elle a toujours
été regardée comme un attribut du fouverain ; il
doit lajufiice à fes fujets, & elle ne peut être rendue
que .par le prince même, ou par ceux fur lefquels il
le décharge d’une partie de cette noble & pénible
fonftion.
L’adminiftration de la jufiice a toujours paru un
objet fi important, que dès Je teins de Jacob le gouvernement
de chaque peuple,étoit confidéré comme
une judicature. Dan judicabit populumfuum ., dit la
Genefe , ch. xlix.
Moïfe , que Dieu donna aux Hébreux pour conducteur
& pour juge, entreprit d’abord de remplir
feul cette fonûion pénible ; il donnoit audience certains
jours delà femaine,, depuis le matin jufqu’au
foir, pour entendre tous ceux qui avoient recours à
lui ; mais la fécondé année fe trouvant accablé par
le grand nombre des affaires, il établit, par le conieil ?
de Jethro , un certain nombre d’hommes fages &
craignans D ieu , d’une probité connue, & fur-tout
ennemis du menfonge & de l’avarice, auxquels il
confia une partie de ion autorité.
Entre ceux qu’il choifit pour juges, les uns étoient
appelles centurions., parce qu’ils étoient prépofés fur
cent familles ; d’autres quinquegenarii, parce qu’ils
n’étoient prépofés qu’à cinquante ; d’autres decani.,
q.ui n’étoient que fur dix familles. Ils jugeoient les
moindres affaires ., & dévoient lui référer de celles
qui étoient plus importantes, qu’il décidoit avec
ion confeilcompote de foixante-dix des plus anciens
, appellés feniores & magifiri populi.
Lorfque les Juifs furent ésablis dans laPaleftine, les
tribunaux ne furent plus réglés par familles : on établit
dans chaque ville un tribunal fupérieur compofé
de fept juges, entre lefquels il y en avoit toujours
deux lévites ; les juges inférieurs, au lieu d’être prépofés
comme auparavant fur un certain nombre de
familles , eurent chacun l’intendance d’un quartier
de la ville.
Depuis Jofué jufqu’à l’établilTement des rois , le
peuple juif fut gouverné par des perfonnages illuf-
tres , que l’Ecriture - fainte appelle juges. Ceux-ci
n’étoient pas des magiflrats ordinaires, mais des ma-
giftrats extraordinaires, que Dieu envoyoit, quand
il lui plaifoit, à fon peuple, pour le délivrer de fes
ennemis, commander les armées ; & en général pour
le gouverner. Leur autorité étoit en quelque chofe
femblableà celle des rois, en ce qu’elle leur étoit donnée
à vie, & non pas feulement pour un tems. Ils gou-
vernoientfeuls & fans dépendance, mais ils n’étoient
point héréditaires ; ils n’avoient point droit abfolu
de vie & de mort comme les rois, mais feulement
félon les lois. Ils ne pouvoient entreprendre laguerre
que quand Dieu les envoyoit pour la faire, ou que
le peuple ledefiroit. Ils n’exigeoient point de tributs
& ne fe fuccédoient pas immédiatement. Quand un
juge étoit mort, il étoit libre au peuple de lui donner
aufïi-tôt un lucceffeur ; mais on Iaiffoit fouvent plu-
fieurs années d’intervalle. Ils ne portoient point les
marques de fceptre ni de diadème, & ne pouvoient
faire de nouvelles lo ix, mais feulement faire obier-
ver celles de Moïfe : enforte que ces juges n’avoient
point de pouvoir arbitraire.
On les appella juges apparemment parce qu’alors
juger ou gouverner félon les lois étoit réputé la même
chofe. Le peuple hébreu fut gouverné par quinze
juges , depuis Ôthoniel, qui fut le premier, juiqu’à
Héh , pendant 1 eipace de 34® années, entre ief-
quelles quelques-uns diftinguent les années des juges
c eft a-dire de leur judicature ou gouvernement &
les années où le peuple fut en feryitude.
Le livre des juges eft un des livres de I’Ecriture-
fainte , qui contient l’hiftoire de ces juges. On n’eft
pas certain de l ’auteur ; on croit que c ’eft une col-
le&ion tirée de différens mémoires ou annales par
Efdras ou Samuel.
Les Efpagnols donnoient auffi anciennement le
titre de juges à leurs gouverneurs , & appelloient
leur gouvernement judicature.
On -s’exprimoit de même en Sardaigne pour défi-
gner les gouverneurs de Cagliari & d’Oriftagne.
Menés, premier roi d’Egypte, voulaiït policerce
pa ys, le divifa en trois parties, & fubdivifa chacune
en dix provinces ou dynafties, & chaque dynaftie
en trois jurildiéHons ou nomos, en Jatin proefecluroe :
chacun de ces lièges étoit compofé de dix juges, qui
étoient préfidés par leur doyen. Ils étoient tous choi-
fis entre les prêtres, qui formoient le premier ordre
du royaume. Ils connoiflbient en première inftance
de tout ce qui. concernoit la religion , & de toutes
autres affaires civiles ou criminelles. L’appel deleurs
jugemens étoit porté à celle des trois nomos ou jurif-
diâions fupërieures de Thebes, Memphis ou Héliopolis
, dont ils relevoient.
Chez les Grecs les juges ou magiftrats avoient en
même tems le gouvernement. Les Athéniens choi-
fiffoient tous les ans cinq cent de leurs principaux citoyens
dont ils formoient le fénat qui de voit gouverner
la république. Ces cinq cent fénateurs étoient
divifés en dix claffes de cinquante chacune, qu’ils
nommoient prytanes ; chaque prytane gôüvernoii
pendant un dixième de l’année.
Pour l’adminiftration de la jufiice, ils ehoififfoitnt
au commencement de chaque mois , dans les neuf
autres prytanes , neuf magiftrats qu’ils nommoient
archontes : on en tiroit trois au fort pour adminiftrer
la jufiice pendant le mois ; l’un pour préfider aux affaires
ordinaires des citoyens , & pour tenir la main
à l’exécution des lois concernant la police & le bien
public ; l’autre avoit l’intendance fur tout ce qui
concernoit la religion ; le troifieme avoit l’intendance
delà guerre, connoiffoit de toutes les affaires militaires
& de celles qui furvenoient à cette occafion
entre les citoyens & les étrangers. Les fix autres archontes
fervoient de confeil à ces premiers.
Il y avoit d’autres juges inférieurs qui connoif-
foienr de différentes matières, tant civiles que cri-,
minelles.
Le tribunal fouverain établi au-deffus de tous ces
juges, étoit l’arégpage : il étoit compofé des archontes
fortis de cha^e : ces juges étoient perpétuels :
leur falaire étoit égal & payé des deniers de la république.
On donnoit à chacun deux, trois oboles pour
une caufe. Ils ne jugeoient que la nuit , afin d’être
plus recueillis, & qu’aucun objet de haine ou de pitié
ne pût furprendre leur religion.
Les juges ou magiftrats de Lacédémone étoient
tous appellés vofxoipûXa.xtt , dèpojîtairts 6* gardiens
de l'exécution des lois. Ils étoient divifés en deux
ordres ; l’un fupérieur, qui avoit infpeûion fur les
autres, & les juges inférieurs, qui étoient feulement
prépofés fur le peuple pour le contenir dans fon devoir
par l’exécution des lois. Quelques-uns des juges
inférieurs avoient chacun la police d’un quartier
de la ville. On commit auffi à quelques-uns en particulier
certains objets ; par exemple, l’un avoit l’inf-
peélion fur la religion & les moeurs ; un autre étoit
chargé de faire obferver les lois fomptuaires fur le
luxe des habits & des meubles, fur les moeurs des
femmes, pour leur faire obferver la modeftie & réprimer
leurs débauches ; d’autres avoient infpedion
(ur les feftins & fur les affemblées ; d’autres, fur la
fureté & la tranquillité publiques, fur les émotions
populaires, les vices, affemblées illicites, incendies,
maifons qui menaçoient ruine , & ce qui pouvoit
Êaufer des maladies populaires ; ^’autres vifitoïeni
les marchés publics , étoient chargés de procurer
l’abondance,d’entretenir la bonne-foi dans le commerce
; d’autres, enfin , avoient infpeéHon fur les
poids & mefures. On peut tirer de-là l’orioinë des
juges d’attribution, c’eft-à-dire de ceux auxquels la
connoiffance de certaines matières eft attribuée.
Le»..premiers juges ou magiftrats des Romains furent
les fenateurs qui rendirent la jufiice avec les
rois , & enfuite avec les confuls qui fuccéderent aux
rois» Ils ne connoiflbient point des matières criminelles
; le roi ou les confuls les renvoyoient au peuple
, qui les jugeoit dans fes affemblées. On les ren-
voyoit à des commiffaires ; le préfet de la ville ren-
doit la jufiice en l’abfence du roi ou des confuls.
On établit enfuite deux quefteurs pour tenir la
main à l’exécution des lois , faire la recherche des
crimes, & toutes les inftru&ions néceffairespour les
faire punir ; & le peuple ayant demandé qu’il y eût
auffi des magiftrats de fon ordre, on créa les tribuns
& les édiles , qui furent chargés chacun de certaine
partie de la police., Voye^ Ediles & T ribuns»
Quelque tems après on créa deux cenfeurs ; mais
tous ces officiers n’étoient point juges : le pouvoir de
juger n’appartenoit qu’aux confuls , aux fenateurs $
au peuple, & à ceux qui étoient commis à cet effer.
Vers l an 388 de Rome , les confuls firent créér
un préteur pour rendre en leur place la jufiice dans la
ville. Ce préteur connoiffoit des affaires civiles &
de police. Il commettoit quelquefois les édiles & autres
perfonnes pour l’aider dans l ’inftru&ion ou dans
le jugeme&y mais c ’étoit toujours lui qui le pronon-
çoit & au nom duquel on le faifoit exécuter.
Quelque tems après le p réteur, pour être plus en
état de juger les queftions de droit, choifit dans chacune
des trente - cinq tribus cinq hommes des plus
verfes dans l’étude des lois , ce qui fit en tout cent
foixante-quinze perfonnes, qui néanmoins pour une
plus facile prononciation , furent nommés centum
viri9 centumvirs , entre lefquels il prenoit des aflef-
feurs ou confeillers pour les queftions de droit , au
lieu que pour les queftions de fa it , il en choififfoit
indifféremment dans tous les ordres.
L’an 604 le peuple remit au préteur le foin de punir
les crimes ; & les quefteurs, qui furent rendus
perpétuels, continuèrent leurs fondions fous les ordres
du préteur.
Les édiles , dont le nombre fut augmenté $ exer-
çoient auffi enfon nom certaines parties de la police.
Il y avoit auffi un préteur dans chaque province,
lequel avoit fes aides comme celui de Rome.
Sur la fin de la république, les tribuns & les édiles
curules s’attribuèrent une jurifdiéfion conrentieufe$
indépendante de celle du préteur.
L autorité de celui-ci avoit déjà été diminuée en
lui donnant un collègue pour connoître des caufes
des etrangers , fous le titre de proetor peregrinus ; on
lui adjoignit encore fix autres préteurs pour les caufes
capitales. Les préteurs provinciaux prenoient
auffi féançe avec eux pendant un a n , avant que
de partir pour leurs provinces, feus prétexte de les
inftruire des affaires publiques. On inftitua auffi deux
prêteurs pour la police des vivres en particulier.
Enfin, fous le triumvirat il y avoit jufqu’à foixahte
quatre prêteurs dans Rome qui avoient tous leurs
tribunaux particuliers , de même que les tribuns &
les édiles.
Un des premiers foins d’Augufte, Iôrfqu’il fe vit
paifible pofleffeur de l’empire, fut de réformer la
jufiice. II réduifit d’abord le nombre des préteurs de
la ville à feize , & établit au-deffus d’eux le préfet
de la v ille , dont la jurifdiélion fut étendue jufqu’à
cinquante ftades autour de la ville. Il connoiffoit
leul des affaires où quelque fénateur fe trouvoit in-
Tome IX .
ferèffe, & dèfc cHûiés commis dans toute l’éténdué
de fa province. Il avoit feul la police dans la ville,
& 1 appel des fentenees des préteurs fé relevoit par-
devant lui.
Les édiles furent d’abord réduits à fix : on leiir ôtâ
la police & tout ce qu’ils avoient ufurpé de jurif-
diétion fur Je préteur ; & dans la fuite Cbnftântiri
les fupprima totalement j on donna au préfet de la
Ville d ’autres aides au nombre de quatorze i qui furent
nommes curatores urbis , ou adjutorts protfecll
urbis. Ils étoient magiftrats du fécond ordre , màgif-
tratus minores. La ville fut divifée en autant de quartiers
qu’il y avoit de curateurs, & chacun d’eux fut
charge de faire la police dans fon quartier. On leur
donna à chacun deux liéteurs pour marcher devant
e u x , & faire exécuter leurs ordres. L’empereuf
Sévere créa encore quatorze autrés curateurs ; &
pour les faire confidérer davantage, il voulut qu’ité
Füffent choifis dans les familles confulaires.
Leprefet delà ville ne pouvant connoître par lui»
meme de toutes ehofes, dn- lui donna deux fubdé-
legues , 1 un appelle preefeelus annoncé, qui avoit la
police des vivres ; l’autre appellépreefeelus vigilumç
qui commandôit le guet. Celui-ci avoit une efpece
de jurifdiétion fur les voleurs, filoux, malfaiteurs, 8t
gens iufpeéts qui commettaient quelque défordre
pendant la nuit ; il pouvdit les faire arrêter & conf»
tituer prifonniers, même les faire punir fur-Ie-champ
s il s agiffoit d’une faute légère ; mais fi le délit étoit
grave ou que l’accufé fût une përfonne de quelque
confidération j il devoit en référer au préfet de la
ville.
Chaque prbvifleé étoit gouvernée par uri préfi-
dent ouproconful, félon qu’eile étoit du département
de I’empéreur ou de celui du fénat. Ce magiftrat
étoit chargé de l’âdminiftration de la jufiice : lespro-
confuls avoient chacun près d’eux plufieurs fubdé-*
légués qu’on appelloit legatiproconfalu/n, parce qu’ils
les envoyoiènt dans les différens lieux dè leurs gou-
vernemens. Ces fubdélégués ayant été diftribués
dans les principales villes & y étant devenus féden-
taires , furent appellés fenatores loci, ou judices or du
narii, & quelquefois fimplement ordinarii. C eux des'
villes moins confidérables furent nommès judicespe-
danei; & enfin les juges des bourgs & villages furent
nommés magifiri pagorurti.
L’appel des juges des petites villes & des bourgs
& villages , étoit porté au tribunal de la ville capitale
de la province , de la capitale à la métropole^
de la métropole à la primatie,d’où l’on poy voit encore
en certains cas appellef à l’empereur ; mais
comme cela engageoit dans des dépenfes exceffives
pour ceux quidemeuroïent dans les Gaules, Conf-
tantin y établit un préfet du prétoire pour juger en
dernier reffort les affaires que l’on portoit auparaj
vant à l ’empereur»
Sous l’empire d’Adrien les magiftrats romains qui
étoient envoyés dans les provinces, furent appellés
comités quaji de comitatu principis, parce qu’on les
choififfoit ordinairement dans le confeil du prince;
Ceux qui avoient le gouvernement des provinces
frontières furent nommés duces, parce qu’ils avoient
le commandement des armées. - '■
Lorfque les Francs eurent conquis les Gaules, ils
y conferverent le même ordre que les Romainsy
avoient établi pour la divifion des gouveriiemens &
pour l’adminiftration de lajufiice. Les officiers François
prirent les titres de ducs & de comtes attachés
aux gouvernemens qui leur furent diftribués ; mais
les officiers d’un raug inférieur ne trou vant pas allez
de dignité dans les titres de jugespedanei vel magifiri
pagorum , qui étoient ufités chez les Romains, eon-
ferverent leurs titres de eenreniers, de cinquante«
niers & clixainiers , & fôus ces mêmes titres ils ren«
M ij