dont chaque chapitre eft une bobeche. Voye? Volf»
Bibl.hebr. tom. I lL p - s S y . L’autre le compare à une
porte brifée qui s’ouvre à deux battans pour introduire
le leâeur dans une dichotomie. R. Schabfai *
labra dormientium apud W olf. Üb. cit. inprcef. p. 12.
Waltherus regarde fon livre, officina biblica, comme
une boutique; en conféquence, il divife & arrange
fes matériaux fur plulieurs tablettes, & con-
fidere le leéleur comme un chaland. Un autre compare
le lien à un arbre qui a un tronc, des branches,
des fleurs, & des fruits. Les vingt-quatre
lettres de l’alphabet formant les branches, les diffé-
rens mots tenant lieu de fleurs, Sc cent-vingt discours
qui font inférés dans ce livre en étant comme
le fruit. Caflian. à S. Elia, arbor opinionum omnium
moralium quce ex trunco pullulant, tôt ramis quotfunt
litterce alphabeti , cujus flores funt verba , fruclus J'unt
120 condoms, & c. Venet. 1688, fol, Voyt{ giorn. de
Parma ann, 1 ($88, pag. 60.
Nous n’avons rien d’affuré fur la première origine
des livres. De tous ceux qui exiftent, les livres de
Moïfe font inconteftablement les plus anciens, mais
Scipion, Sgambati & plufieurs autres foupçonnent
que ces mêmes livres ne font pas les plus anciens de
tous ceux qui ont exifté, & qu’avant le déluge il y
en a eu plufieurs d’écrits par Adam, Seth , Enos,
Caïnaan , Enoch , Mathufalem , Lamech , Noé Sc
fa femme , Chatn , Japhet & fa femme, outre d’autres
qu’on croit avoir été écrits par les démons ou
par les anges. On a même des ouvrages probablement
fuppofés fous tous ces noms , dont quelques
modernes ont rempli les bibliothèques, & qui paf-
fent pour des rêveries d’auteurs ignorans, ou im-
pofteurs, ou mal - intentionnés. Voye^ les Mem. de
P Acad. des bell. Lear. tom. VI. pag. 32. tom. VIII.
pag. 18. Sgambat. arckiv. veter. teflam. Fabricius cod.
pfeudepig. veter. teflam. paffim.Heuman,viaad kifi. litt.
c. iij. para g. I II. pag. 29.
Le livre d’Enoch eft même cité dans I’épître de S.
Jude , verf. 14. & i5 . fur quoi quelques-uns le fondent
pour prouver la réalité des livres avant le déluge.
Mais le livre que cite cet apôtre eft regardé
par les auteurs anciens & modernes, comme un livre
imaginaire, ou du moins apocryphe. Voye£ Saal-
bach.fched. de libr. vet. parag. 42. Reïmm. idea fyfl.
ant. litter. pag. ,233..
Les Poèmes d’Homere font de tous les Livres profanes
, les plus anciens qui foient paffés jufqu’à nous.
Et on les regardoit comme tels dès le tems de Sex-
tus Empiriçus. Voye^ Fabric. bibl. grctc. üb. I. c. j .
part. I . tom. I . pag. 1. Quoique les auteurs grecs
faffent mention d’environ foixante-dix livres antérieurs
à ceux d’Homere, comme les livres d’Hermès
, d’Orphée, de Daphné, d’Horus , de Linus ,
de Mufée, de Palamede , de Zoroaftre , &c. mais
il ne nous refte pas le moindre fragment de la plupart
de ces livres , ou ce qu’on nous donne pour tel
eft généralement regardé comme fuppofé.LeP. Har-
douin a porté fes prétentions plus loin en avançant
que tous les anciens livres, tant grecs que latins ,
excepté pourtant Cicéron, Pline, les géorgiques de
Virgile, les fatyres & les épures d’Horace, Hérodote
& Homère , avoient été fuppofés dans le treizième
fiecle par une fociété de favans , fous la direction
d’un certain Severus Archontius. Harduini
de numm. herodiad. in proluf. Acl. erud. Lipf. ann.
ty io. pag. lyo.
On remarque que les plus anciens livres des Grecs
font en vers ; Hérodote eft le plus ancien de leurs
auteurs qui ait écrit en profe , & il étoit de quatre
. cens ans poftérieur à Homere. Le même ufage fe
remarque prefque chez toutes les autres nations ,
& donne pour ainfi parler , le droit d’aîneffe à la
poefie fur la profe, au moins dans les monumens
publics. Vofei Strüv. geogr. üb. I. Hauban lib. cit/
parag. 20. pag. 69. parag. 2 1.pag.S2. Voye^aufji
l'article POESIE.
On s’eft beaucoup plaint de la multitude prodi-
gieufe des livres, qui eft parvenue à un tel degré,
que non-feulement il eft impofîible de les lire tous,
mais même d’en favoir le nombre & d’en connoître
les titres. Salomon fe plaignoit il y a trois mille ans
de ce qu’on compofoit fans fin des livres ; les favans
modernes ne font ni plus retenus', ni moins féconds
que ceux de fon tems. Il eft plus facile, dit un des
premiers, d’épuifer l’occan que le nombre prodigieux
de {ivres&c de compter les grains de fable ,
que les volumes qui exiftent. On ne pourroit pas
lire tous les livres , dit un autre , quand même on
auroit la conformation que Mahomet donne aux
habitans de fon paradis , où chaque homme aura
70000 têtes, chaque tête 70000 bouches, dans chaque
bouche 70000 langues , qui parleront toutes
70000 langages différens. Mais comment ce nombre
s’auginente-t-il ? Quand nous confidérons la multitude
de mains qui font employées à écrire , la
quantité de copiftes répandus dans l’orient, occupés
à tranfcrire, le nombre prefqu’infini de prefles
qui roulent dans l’occident ; il femble étonnant que
le monde puiffe fuffire à contenir ce que produi-
fent tant de caufes. L’Angleterre eft encore-plus
remplie de livres qu’aucun autre pa ys, puifqu’ou-
tre fes propres productions, elle s’eft enrichie depuis
quelques années de celles des pays voifins. Les
italiens & les François fe plaignent, que leurs meilleurs
livres font enlevés par les étrangers. Il fem-
blent, difent-ils , que c’eft le deftin des provinces
qui compofoient l’ancien empire romain, que d’être
en proie aux nations du nord. Anciennement elles
conquéroient un pays & s’en emparoient ; préfen-
tement elles ne vexent point les habitans, ne ravagent
point les terres, mais elles en emportent les
fciences. Commigrant ad nos quotidie callidi homi-
nes, pecunicî injlrucliffirni, & prceclaramillam mufarum
fupelleclilem , optirna volumina nobis abripiunt ; artes
etiam ac difciplinaspaulatim abducluri alib ,| nifi Jludio
& diligentiâ refifiatis. Voye£ Barthol. de libr. legend.
differtat. S. pag. y. Heuman. via ad hiflor. litter. c. vj,
parag. 43. pag. 338. Facciol. orat. t. mem. de Trev.
ann. iy3 Q.pag. iy$3 .
Les livres élémentaires femblent être ceux qui fe
font le moins multipliés, puifqu’une bonne grammaire
ou un dictionnaire, ou des inftitutions en quelque
genre que ce foit , font rarement fuivis d’un
double dans un ou même plufieurs fiecles. Mais on
a obfervé qu’en France feulement, dans le cours de
trente ans, il a paru cinquante nouveaux livres d’é-
lémens de Géométrie , plufieurs traités d’Algebre ,
d’Arithmétique, d’Arpentage , & dans l’efpace de
quinze années on a mis au jour plus de cent grammaires
, tant françoifes que latines, des dictionnaires
, des abrégés , des méthodes, &c. à proportion.
Mais tous ces livres font remplis des mêmes idées,
des mêmes découvertes , des mêmes vérités , des
mêmes fauffetés. Mém. de Trév. année 1734. page
804.
Heureufement on n’eft pas obligé de lire tout ce
qui paroît. Grâces à Dieu, le plan de Caramuel qui
fe propofoit d’écrire environ cent volumes in-folio,
& d’employer le pouvoir fpirituel & temporel des
princes, pour obliger leurs iujets à les lire, n’a pas
réuffi. Ringelberg avoit aufli formé le deffein d’écrire
environ mille volumes differens. Voyeç M.
Baillet, en fans célébrés ,feH. iz.jug. des fav. tom. V.
part. I.pag. 3y 3 . & il y a toute apparence, que s’il
eût vécu aflez long-tems pour compofer tant de livres
, il les eût donnés au public. Il auroit prefqu’é-
galé Hermès Trifmégifte , qui , félon Jamblique ,
écrivit trentc-fix mille cinq cens vifigt-cinq livres t
luppofé la vérité du fa it, les anciens auroient eu
infiniment plus de raifon que les.modernes p de fe
plaindre de la multitude des livres.
Au refte, de tous ceux qui exiftent, combien peu
méritent d’être férieufement étudiés. ? Les uns né
peuvent fervir qu’occafionnellemcnt, les autres qu’a
amufer les leCteurs. Par exemple , un mathématicien
eft obligé de favoir ce qui eft contenu dans les
livres de Mathématique ; mais une connoiffance générale
lui fuffit, & il peut l’acquérir aifément en
parcourant les principaux auteurs , afin de pouvoir
les citer au belôin ; car il y a beaucoup de chofes
qui fe confervent mieux par le fecours des livres i
que par celui de la mémoire. Telles font les obfer-
vations aftronomiques, les tables, les réglés, les
théorèmes, &c. q u i, quoiqu’on en ait eu connoiffance,
ne s’impriment pas dans le cerveau, comme
un trait d’hiftoire ou une belle penfée. Car moins
nous chargeons la mémoire de chofes , & plus I’ef-
prit eft libre & capable d’invention. Voyei Cartes.
Epifi. dhogel. apud. Hook, phil. collecl. n°, S.p. 144.
& fuiv.
- Ainfi un petit nombre de livres choifis eft fuffifant;
Quelques-uns en bornent la quantité au feul livre de
la bible, comme contenant toutes les fciences. Et
les Turcs fe réduifent à l’àlcoran. Cardan croit que
trois livres fuflifënt à une perfonné qui ne fait pr^?. j.
féflîon d’aucune fcience , favoir, une vie des faints
Sc des autres hommes vertueux, un livre de poëfie
pour amufer l’efpnt, & un troifieme qui traite des
régies de la vie civile. D ’autres ont propofé de fe
borner à deux livres pour toute étude ; favoir , l’écriture
, qui nous apprend ce que c’eft que Dieu ,
& le livre de la création , c’eft-à- dire , cet univers
qui nous découvre fon pouvoir. Mais toutes ces ré- ^
gles,. à force de vouloir retrancher tous les livres fu-
perflus , donnent dans une autre extrémité , & en
retranchent aufli de nécefîaires. Il s’agit donc dans
le grand nombre de choifir les meilleurs , & parce
que l’homme eft naturellement avide de favoir, ce
qui paroît fuperflu en ce genre peut à bien des égards
avoir fon utilité. Les livres par leur multiplicité nous
forcent en quelque forte à les lire , ou nous y engagent
pour peu que nous y ayons de penchant. Un
ancien pere remarque que nous pouvons retirer cet
avantage de la quantité des livres écrits fur le même
fujet : que fouvent ce qu’un lefteur ne faifit pas v ivement
dans l’un, il peut l’entendre mieux dans un
•autre. Tout ce qui eft éc rit, ajoute-t-il, n’eft pas
également à la portée de tout le monde , peut-être
ceux qui liront mes ouvrages comprendront mieux
la matière que j’y traite , qu’ils n’auroient fait dans
d’autres livres fur le même fujet. Il eft donc nécef-
faire qu’une même chofe foit traitée par différens
.écrivains, & d e différentes maniérés; quoiqu’on parte
des mêmes principes , que la folution des difficultés
foit jufte , cependant ce font différens chemins
qui mènent à la connoiffance de la vérité. Ajoutons
à cela , que la multitude des livres eft le feul
moyen d’en empêcher la perte ou l’entiere deftruc-
tion. C ’eft cette multiplicité qui les a préfervés des
injures du tems , de la rage des tyrans , du fanatif-
me des perfécuteurs , des ravages, des barbares, &
qui en a fait paffer au moins une partie jufqu’à nous,
- à-travers les longs intervalles de l’ignorance ô£ de
l’obfcurité.
Solaquc non norunt liacmonumenta mori.
Voye£ Bacon , augment. Scient. Üb. 1. t. III. pag.
43. S. Auguftin. de Trinit. lib. 1. c. iij. Barthol. de
lib. legend.differtat. .1. pag. 8. & fuiv.
A l’égard du choix & du jugement que l’on doit
faire d’un livre ,, les auteurs ne s’accordent pas fur
les qualités néfieffaircs pour conftituer la bonté d*uri
livre. Quelques-uns exigent,feulement d’un auteur
qu’il ait du bon fens, & qu’il traite fon fujet d’une
maniéré convenable. D ’autres , comme Salden, défirent
dans un ouvrage la folidité, la clarté & lacon-
cifion ; d’autres l’intelligence & l’exaélitude. Laplu^
part des critiques affurent qu’un livre doit avoir toutes
les perfections dont l’el’prit humain eft capable i
en ce easy auroit-ilriende plus rare qu’un bon livre }
Les plus raifonnables cependant conviennent qu’un
livre eft bon quand il n’a que peu de défauts : optimus
ille qui minimis ürgetur vitiis ; ou du- moins dans lequel
les chofes bonnes ou intéreffantes excédent notablement
les mauvaifes ou les inutiles. De même un Livré
n.e peut point êtreappellé mauvais, quand il s’y ren-1
contre du bon à-peu-près également autant que d’auJ
très chofes. Voyc{ Baillet,/’«g. desfeav. t. I.part. I.
c. vj.p. 7.C).- & fuivi Honor. riflix.fur les réglés de crit-.
diffère. 1.
Depuis la décadence delà langue latine,les aiiteurs
femblent être moins curieux de bien écrire que d’é-3
crire de bonnes chofes ; de forte qu’un livre eft
communément regardé comme bon, s’il parvient
heureufement au but que l ’auteur s’étoit propofe ,
quelques fautes qu’il y ait d’ailleurs. Ainfi un livre
peut être bon, quoique leftyle en foit mauvais * par
conféquent un hiftorien bien informé, vrai & judicieux
; un philofophe qui raifonne jufte & fur des
principes fûrs ; un théologien orthodoxe, & qui ne
s’écartent de l’Ecriture , ni des maximes de l’Eglife
primitive, doivent être regardés comme de bons auteurs,
quoique peut-être on trouve dans leurs écrits
des défauts dans des matières peu effentielles , des
négligences, même des defauts de ftyle. Voye{ Bail*
l e t , jug. des fav. 1 .1 . c. vij. p. 24. & fuiv.
Ainfi plufieurs livres peuvent être confidérés comme
bons& utiles, fous ces diverfes maniérés de les
envifager, de forteque le choix femble être difficile #
non pas tant par rapport aux livres qu’on doit choifir
, que par rapport à ceux qu’il faut rejeîter. Pline
l’ancien avoit coutume de dire qu’il n’y avoit point
de livre quelque mauvais qu’il fût , qui ne renfermât
quelque chofe de bon*’: nullurn librum tam rnalum eff 'cy
qui nonaliqudex parte profit. Mais cette, bonté a des
.d.egrés , & dans ..certains livres elle eft fi médiocre
qu’il eft difficile de s’en reflentir ; elle eft ou cachée
•fi profondément, ou tellement étouffée par les maù-
vaifes chofes, qu’elle ne vaut pas la peine d ’être recherchée.
Virgile difoit qu’il tiroir de l’or du fumier
d’Ennius ; mais tout le monde n’a pas je même talent,
ni la même dextérité. Voye^ Hook, collecl. n. 5.pag.
izy & / j i . Pline , epifi. 5 . 1. I I I . R.eimman, bibl.
acrom.inproefat. parag. y.'pag. 8 & fuiv. Sacchin , de
ration, lib. legend. c. iij pag. 10 & fùiv,
Ceux-là femblent mieux atteindre à ce but, qui récommandent
un petit nombre des meilleurs livres, &
qui confeillent de lire beaucoup, mais non pas beaucoup
de chofes •j.fâuieum legere, non multa. Cependant
après cet avis , la même quéftion revient toujours
: comment faire ce choix i Pline,epifi. c).. l.V II.
Ceux qui ont établi des réglés pour juger des Ü*
vres, nous confeillent d’en obferver le titre, le nom
de l’auteur, de l’éditeur, le nombre des éditions, les
lieux & les années où elles ont paru, Cé quidans les
livres anciens eft fouvent marqué à la fin, le nom de
l’imprimeur , fur-tout fi c’en eft un célébré. Enfuite
il faut examiner la préface & le deffein de l’auteur ;
la caufe ou l’occafion qui le détermine à.écrire ; quel
eft fon pays, car chaque nation a fon génie particulier.
Barth. diff. 4. pag. ic>. Baillet, c, vij* p. 228 &
fuiv. Les perfonnes par l’ordre defquelles l’ouvrage
a été compofé, ce qu’on apprend quelquefois par L’é-
pître dédicatoire. Il faut tâcher de favoir quelle étoit
la vie de l’auteur , fa profeflion, fon rang,; fi quel