dans l’acide nitreux ; on met cette dilTolution dans
line cornue , on y ajoute de l’acide vitriolique 8c
du mercure. On pouffe le feu fortement ; d’abord
il paffe un peu de mercure dont une partie demeure
unie avec les acides , mais il s’attache au col de la
cornue un vrai cinnabre. En répétant plufieurs fois
cette opération , la quantité du cinnabre qui s’attache
au col de la cornue augmente, 6c à la fin on ne
retrouve plus d’argent. M. Rouelle trouve que ce
procédé démontre que l’acide vitriolique s’unit avec
le phlogiftique de l’argent , ce qui fait du foufre , 6c
c e foufre en le combinant avec le mercure forme un
vrai cinnabre.
De l’argent pur expofé à un feu très-violent pendant
un mois n’a perdu qu’un de fon poids ; au
lieu que l’or pur , expôlé à ce même feu pendant
trois riiois , n’a fouffert aucun déchet;
L’argent fe diffout dans l’acide nitreux, dans l’acide
vitriolique 6c dans l’acide du fel marin , mais
ce métal n’eft point attaqué par l’eau régale. Les
acides tirés des végétaux agiffent fur l’argent, pourvu
que fon aggrégation foit rompue , c’eft-à-dire ,
pourvu qu’il foit dans un état d’atténuation 8c de
divifion. Pour faire diffoudre ce métal dans l’acide
nitreux, il faut le réduire en lames bien minces que
l’on fera rougir pour les rendre plus nettes, 8c que
l ’on trempera dans de l’efprit de nitre étendu d’eau ;
il fe fera une effervefcence, 6c lorfqu’elle fera finie
la diffolution fera faite ; elle fera claire 6c un peu
jaunâtre , fi l’argent eft parfaitement pur , mais elle
deviendra verdâtre fi l’argent contient du cuivre.
Si l’argent contient de l’or , ce dernier métal tombera
au fond du vaiffeau fous la forme d’une poudre
; c’eft fur cette expérience qu’eft fondée la maniéré
de féparer l’or d’avec l’argent. Voy&{ D é p a r t
& Q u a r t a t i o n .
L’acide vitriolique 6c l’acide du fel marin ont
plus de difpofition à s’unir avec l’argent, que l’acide
nitreux ; ainfi lorfcjue l’argent a été diffout dans de
l ’eau forte", mêlée d’acide vitriolique 6c d’acide du
fel marin ; ces derniers acides s’emparent de l’argent
& fe précipitent fous la forme d’un fel, cela fournit
un moyen de purifier l’eau forte des autres acides
qui y font mêlés, ce qui fe fait en verfant quelques
gouttes de diffolution d’argent faite par l’acide nitreux,
dans l’eau forte que l’on veut purifier, ce que
l’on continue jufqu’à ce qu’il ne fe précipite plus
rien ; alors l ’eau forte s’appelle précipitée, 6C elle eft
beaucoup plus pure qu’auparavant.
L’argent diffout dans l’acide nitreux, verfé dans
une eau minérale, eft très-propre à faire connoître
fi cette eau contient le fel appellé féléniteux , qui
eft une combinaifon de l’acide vitriolique 6c d’une
terre calcaire ; fi une eau contient de ce fe l, elle fe
trouble 6c devient laiteufe aufli-tôt qu’on y verfe
quelques gouttes de diffolution d’argent, parce qu’a-
lors l’acide vitriolique contenu dans la félénite,quitte
la terre calcaire pour s ’unir avec l’argent.
L ’argent diffout dans l’àcide nitreux , noircit la
peau. On peut s’en fervir pour former des deffeins
fur l’agathe 6C le caillou ; fecret dont on fe fert quelquefois
pour tromper les curieux qui font des collerions
d’hiftoire naturelle fans connoiffance de
caufe.
En faifant évaporer cette diffolution, on obtient
des cryftaux blancs , eompofés de lames qui s’unil-
fent à angles droits , 6c q ui, lorfque l’évaporation
s’-eft faite doucement reffemblent affez à ceux du nitre
quadrangulaire ; c’ eft-là ce que quelques Chi-
miftes ont nommé affez mal à-propos vitriol de lune,
on les appelle avec plus de raifon cryjlaux de lune.
Lorfqu’avant de faire évaporer la diffolution, on y
a joint un peu d’efprit de v in , ces cryftaux fe nomment
hydragogue d'angélus fala ou f i l metailorum
parce qu’ils ont un goût amer ; ce remede qui eft
peu sûr, eft corrofif 6c paffe pour un puiffant diurétique.
Si on met des cryftaux de lune dans du plomb
fondu , 6c qu’on leur donne le tems de s’y incorporer
par la fufion, tout l’argent paffera dans le plomb.
C’eft une des fourberies des Alchimiftes qui s’en
fervent pour perfuader aux fimple%, qu’ils favent
convertir le plomb en argent.
Si l’on joint du mercure à de l’argent qui a été diffout
dans l’acide nitreux, on obtiendra une végétation
métallique que l’on nomme arbre de Diane.
Les cryftaux de lune unis avec de la diffolution de
mercure , étendue dans une grande quantité d’eau,
teignent les cheveux en noir. Si on fait évaporer
jufqu’à ficcité la diffolution d’argent par l’acide nitreux
dans une capfule de verre , garnie de terre
graffe que l’on place à feu nud ; les cryftaux àe lune
entreront en fufion : en verfant la matière fondue
dans des moules, on aura ce qu’on appelle le caujli-
que lunaire o\i la pierre infernale. Il faut pour cela de
l’argent très-pur, parce que s’il étoit mêlé de cuivre,
la pierre infernale attireroit l’humidité de l’air;
Cette méthode eft celle de M. Rouelle.
Kunckel dit dans fon laboratoire chimique , que fi
l’on fait fondre la pierre infernale dans un creufet,
6c que l’on y joigne de l’efprit d’urine avec de fon
fel j fpiritum urina cum fuo fale , en donnant un
degré de chaleur convenable, il fe fait une maffe
tenace d’un rouge de fang , 6c que l’on peut plier
comme un fil autour du doigt.
L ’argent qui a été diffout dans l’acide nitreux
fe précipite par l’alkali fixe , par l’alkali volatil ;
mais il ne faut en mettre que ce qui eft néceffaire
pour faturer l’acide nitreux, fans quoi l’argent qui
aura été précipité fe diffoudra de nouveau. Cette
précipitation fe fait encore par les terres calcaires ,
par le zinc , le fer , le cuivre , le plomb , le bif-
muth, le mercure ; par ce moyen on a de l’argent
très atténué 6c très-pur que l’on pourra édulcorer
avec de l’eau chaude, pour lui enlever l’acide nitreux
qui lui eft demeuré attaché, 8c enfuite avec
du vinaigre pour en enlever les petites molécules
de cuivre qui peuvent encore lui être jointes.
Cette diffolution de l’argent fe précipite encore
par le moyen de l’acide vitriolique , l’argent tombe
fous la forme d’une poudre blanche. Quand on
veut diffoudre l ’argent dans l ’acide vitriolique , il
faut que ce diffolvant foit chauffé 6c que l’aggréga-
tion de ce métal ait été rompue. Le fel produit par
la combinaifon de l’acide vitriolique 6c de l’argent
eft fufible , comme la lune, cornée , dont nous allons
parler.
Kunckel d i t , que fi on fait diffoudre de l’argent
dans de l’efprit de nitre ; qu’on précipite ce métal
par le cuivre, qu’on édulcore 6c qu’on faffe fécher
le précipité ; qu’on y verfe enfuite d'eux parties d’acide
vitriolique concentré ; on mettra le tout au
bain de fable, 8c on donnera le degré de feu néceffaire
pour faire bouillir le diffolvant 6c pour l’évaporer
, jufqu’à ce que la matière foit fluide comme
de la cire. Si on joint à cette diffolution du mercure
v if , elle prendra la confiftence d’une pierre , 6c
elle deviendra rouge 6c malléable. En ajoutant plus
d’acide vitriolique , cette maffe devient fi folide ,
qu’il n’y a plus que le feu de fufion qui puiffe la dé-
compofer. Voyeç le laborat. chtmiq.
Si dans une diffolution d’argent par l’acide nitreux
on verfe de l’acide du fel marin, ou du fol marin
diffout dans de l’eau, il fo fait une effervefcence, le
mélange devient trouble 8c il fo forme une efpece
de matière coagulée , qui n’eft autre chofo que de
l’argent combiné avec l’acide du fol marin ; c’eft ce
qu’on nonïme lune cornée, parce qu’elle entre en fu-
Aon à un feu affez foible , 8c alors elle forme Une
«fpece de verre femblable à de la corne. Cette matière
eft volatile au feu , infoluble dans l’eau. M.
Henekel a cru que cette lune cornée étoit une efpece
de verre malléable fi recherché par les anciens, vû
que cette fubftance a de la fléxibilité. Les Alchimiftes
ont regardé la lune cornée comme un moyen
de parvenir à la calcination de l’argent ; ils ont expofé
cette fubftance pendant long-tems au feu de
réverbere fans la laiffer entrer en fufion, 6c ils fo
promettent de grands effets de cette chaux.
La volatilité de la lune cornée , la rend très-difficile
à réduire > il faut pour cela recourir à des intermèdes.
On met de l’antimoine dans une cornue avec
la hine cornée ; on donne un feu très-violent, par ce
moyen l’acide du fol marin s’unit à l’antimoine 8c
forme du beurre d’antimoine , 8c l’argent refte au
fond de la cornue uni avec un peu d’antimoine, dont
on le fépare en le faifant détonner avec du nitre.
On peut encoré faire cette réduftion de la lune
cornée, en mettant avec elle du plomb dans une cornue
, la réduction eft faite aufti-tôt que le plomb a
été fondu. Il fo forme au-deffus du plomb une feo-
rie qui reffemble beaucoup à de la lune cornée , 8c
qui en a le poids ; expérience ,qui fuivant M. Zimmermann
, mérite l’attention des Chimiftes.
Le foufre s’unit avec l’argent, 6c le rend fi fufible
6c fi divifé , qu’il perce les creufots , 8c en même-
tems il devient fi caffant, que l’on peut le pulvérifier,
C ’eft fur la difpolition que le foufre a de s’unir
à l’afgent, qu’eft fondée l’opération par laquelle l’on
dégage l’oî d’avec l’argent par la voie feche, parce
que le foufre ne touche point à l’or. Voye[ , fépara-
tion ou départ par la voie fiche. Lorfque l’argent eft
uni avec le foufre , l’eau forte n’agit plus fur ce métal
, parce qu’il eft alors entouré d’une enveloppe
graffe » qui le défend contre l’aéfion de l’acide. On
peut dégager l’argent du foufre, en le faifant fondre
avec du cuivre , auquel on pourra joindre un peu
de limaille de fer à la fin de l’opération. On peut
encore dégager ce foufre par le moyen de l’alkali
fixe, en prenant garde de ne point faire du foie de
foufre qui diffoudroit l’argent : ce foufre fe dégagera
auffi, fi on joint du mercure fublimé avec l’argent
fulfuré, alors le foufre s’unira au mercure 8c
fera du cinnabre , tandis que l’argent s’unira à l’acide
du fol marin avec qui il fera la lune cornée.
Les Alchimiftes, toujours occupés de myfteres,
ont donné plufieurs noms différens à l’argent; ils ont
défigné ce métal fous le nom de luna, lumen minus,
regina , Diana , mater D iana , fermentum album. Ils
ont cru que pour être de l’or , il ne lui manquoit
qu’un foufre colorant , mais ils n’ont point jugé à-
propos de nous expliquer ce qu’ils entendoient par-
là.
Les Chimiftes difont, que Fargent eft compofé,
i° . d’une terre fine qui fe démontre par fa fixité au
fou , & par la difficulté qu’on a de le calciner,
i ° . d’une terre inflammable qui eft le phlogiftique ,
3°. d’une terre mercurielle qui lui donne la fufibi-
lité.A
l’exception de la pierre infernale, l’argent n’eft
d’aucun ufage dans la Médecine 8c dans la Pharmacie
; les prétendues teintures lunaires dont parlent
quelques auteurs, font des remedes très-fufpefts,
vû que Fargent par lui-même ne donne point de couleur
, 8c lorfqu’il en donne une, elle eft dûe au cuivre
avec qui il eft mêlé.
Les ufages de Fargent dans les arts 6c métiers,
font très-étendus 8c très-connus de tout le monde,
on ne s’arrêtera pas à les décrire i c i , vû qu’il en
fora parlé aux articles où Fon traite ces différens
arts.
Quand on voudra argenter une piece à froid, on
Tome IX . .
n*aura qu’à faire diffoüdre de Fargent dans de l’eau-
forte ; on précipitera la diffolution par le cuivre ;
on mêlera Fargent qui fo fera précipité, avec parties
égales de fol ammoniac 8c de fol marin ; on frottera
avec ce mélange la piece de cuivre jaune que Fon
voudra argenter. D ’autres artiftes font dans Fufage
de fe forvir de fol marin 6c de crème de tartre, au
lieu du mélange précédent..
L u n e c o r n é e , ( Chimie Métall. ) les Chimiftes
nomment ainfi Fargent qui a été diffout dans l’efprit
de nitre, 8c précipité par de Fefprit de fol , par
une diffolution de fol marin, ou de fol ammoniac*
Pbur cette opération, on fait diffoudre de Fargent
dans de Fefprit de nitre ; enfuite on fait diffoudre
du fol marin ou du fol ammoniac dans de l’eau ; on
verfe l’une de ces diffolutions, ou bien Amplement
de Fefprit de fol dans l’êfprit de nitre chargé d’argent,
il devient trouble & laiteux ; on ajoute de l’eau clair
e , 8c on laiffe repofor ce mélange. Au bout de quelque
tems il tombe au fond du vaiffeau une poudre
ou un précipité blanc; on décante la liqueur qui fur-
nage , 6c on verfe de nouveau de Fefprit de nitre >
ou de Fefprit de fol fur le précipité, 8c Fon fait chauffer
le tout au bain de fable ; on décante cette nouvelle
liqueur ; on verfe de l’eau chaude fur le précipité
; on le fait bouillir ; on réitéré la même chofo
plufieurs fois, jufqu’à ce que l’eau foit entièrement
infipide ; on la décante, 6c Fon fait fécher la poudre
blanche ou le précipité qui a été ainfi édulcoré; c’eft-
là ce qu’on nomme lune cornée. C’ eft de Fargent combiné
avec l’acide du fol marin : cette combinaifon
de Fargent eft très-aifée à mettre en fufion ; 6c quand
elle a été fondue, elle forme une maffe qui reffemble
à de la corne ; c’eft ce qui lui a fait donner le
nom de lune cornée. Cette matière conferve une certaine
flexibilité ; de là vient que M. Henekel a cru
que ce pouvoit être-là le verre malléable des anciens.
Il n’y a point de moyen plus sûr d’avoir un argent
bien pur & dégagé de toute partie cuivreufe , que
de le mettre en lune cornée. On peut enfuite en retirer
ce métal ou le réduire, en mettant la lune cornée
dans un creufet enduit de lavon ; on y joint la moitié
de fon poids de fol de tartre bien foc & pulvérifé,
que l’on couvrira d’huile, de fuif, ou de quelque
matière graffe , on placera le creufet dans un fourneau
de fufion ; on ne donnera d’abord qu’un degré
de feu fuffifant pour faire rougir le creufet ; on
l’augmentera enfuite, 8c Fon remettra de tems en
tems de nouvelle matière graffe ; lorfqu’il ne partira
plus de fumée du creufet, on le vuidera à l’ordinaire
dans un cône de fer enduit de fuif. Voye{ la
Chimie pratique de M. Maquer.
L u n e , ( Mythologie. ) Pindare FappeHe ingé-
nieufement T ail de la nuit , 6c Horace, la reine
du filence, Diana, qua jilentium regis J C ’étoit après
le foleil, la plus grande divinité du paganifme : Hé-
fiode la fait fille de T h éa , c’eft-à-dire , de la divinité.
Une partie des peuples orientaux l’hono-
roient fous le titre Uranie, ou de Célejle, C ’eft
elle que les Egyptiens adoroient fous le fymbole du
boeuf Apis ; les Phéniciens fous le nom d’Aftarté ;
les Perfes fous le nom de Militra ; les Arabes fous le
nom d'Alitât ; les Africains fous le nom du dieu
Lunus ; les Grecs 6c les Romains fous le nom de
Diane.
L ’Ecriture-fainte parle fouvent du culte que Fon
rendoit à la reine du ciel, car le foleil en étoit le
roi ; 6c Macrobe a prétendu que toutes les divinités
despayens pouvoient fo rapporter à ces deux aftres.
Du moins il eft sûr qu’ils firent l’un 6c l’autre les
premiers objets de l’idolâtrie chez laplûpart des peuples
de la terre.
Les hommes frappés de ces deux globes lumineux
B B b b b